Streaming , Spotify dénonce les pratiques d’Apple

Streaming , Spotify dénonce les pratiques d'Apple

Le Monde
| 04.07.2016 à 11h41
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Par Jérôme Marin (San Francisco, correspondance)

La rivalité s’accentue entre Apple et Spotify. La semaine du 27 juin, les deux sociétés ont exposé au grand jour le conflit larvé qui les oppose depuis plusieurs mois. Elles se disputent le marché du streaming musical (lecture sans téléchargement), un secteur qui connaît une forte croissance alors que les habitudes d’écoute évoluent vers ces offres en ligne, gratuites ou payantes.

La start-up suédoise a lancé les hostilités. Dans un courrier adressé le 26 juin à son concurrent, elle lui reproche d’avoir récemment rejeté la dernière mise à jour de son application pour iPhone et iPad. Selon elle, cette décision constitue une nouvelle illustration des pratiques anticoncurrentielles menée par le groupe de Cupertino afin de favoriser Apple Music, le service maison lancé il y a un an. Réponse de l’intéressé : « Des rumeurs et des demi-vérités. »

Apple Music a changé la donné

Le différend porte sur les conditions d’utilisation de l’App Store, la boutique mobile d’Apple. Deux règles agacent Spotify. D’abord, le prélèvement d’une commission sur les abonnements souscrits depuis toutes les applications iOS, le système d’exploitation des iPhone et iPad. Ensuite, l’impossibilité de contourner le système de paiement d’Apple et donc de ne pas verser ces commissions en utilisant une autre plate-forme. Cette option est offerte par Android, le système d’exploitation rival développé par Google.

Pendant longtemps, Spotify a accepté ces règles, faisant payer les commissions à ses clients. L’abonnement mensuel était ainsi facturé 13 dollars depuis son application iOS, contre 10 dollars ailleurs. La donne a cependant changé avec l’arrivée d’Apple Music, facturé 10 dollars sur tous les supports. Si le groupe suédois maintient sa politique tarifaire, il risque de perdre des abonnés au profit de son rival. S’il abaisse son prix, il accentue ses pertes.

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Lancé en 2008, Spotify n’est en effet toujours pas rentable malgré plus de 100 millions d’utilisateurs. La grande majorité se contente en effet de la partie gratuite, financée par de la publicité et qui ne représente que 10 % des recettes. Environ 30 millions de personnes se sont abonnées au service. En 2015, son chiffre d’affaires a grimpé de 80 %, à près de 2 milliards d’euros. Mais ses pertes se sont accentuées, atteignant 173 millions d’euros.

Pour Spotify, ce système octroie donc un avantage déloyal à Apple Music. En un an, l’offre musicale de la firme américaine a déjà séduit 15 millions d’utilisateurs payants. Pour renforcer son attractivité, le groupe à la pomme serait par ailleurs en négociations pour racheter le service concurrent Tidal, croit savoir le Wall Street Journal. Une telle acquisition pourrait lui permettre d’obtenir des exclusivités de la part de la quinzaine d’artistes associés au service d’écoute du rappeur américain Jay Z.

Position de force

Avec sa nouvelle application, Spotify pensait avoir trouvé la parade à la mainmise d’Apple. L’inscription, réalisée en deux temps, se terminait sur son site Internet. Et non plus chez Apple. Ainsi, aucune commission ne pouvait être prélevée. Mais Apple estime qu’il s’agit d’une « violation évidente des règles », justifiant ainsi le rejet de cette mise à jour.

« Nos règles s’appliquent à tous les développeurs, poursuit la société. Nous ne les avons pas modifiées quand nous avons lancé notre service de streaming musical. Ironiquement, c’est désormais Spotify qui veut changer les choses en réclamant un traitement préférentiel. »

Sur le papier, la firme de Cupertino semble donc en position de force, car Spotify ne peut pas se passer d’iOS, sur lequel son application a été téléchargée plus de 160 millions de fois. Pour rester accessible aux utilisateurs d’iPhone et d’iPad, la société n’a pas d’autre choix que d’accepter les conditions imposées par Apple. Pour autant, la marge de man’uvre de ce dernier reste étroite.

Ces derniers mois, Spotify essaie de convaincre les régulateurs américains et européens de se pencher sur le dossier. Sans grand succès pour le moment. Mais un conflit marqué avec Apple par exemple le retrait total de son application sur iOS ne manquerait pas de lui faciliter la tâche. Mercredi 29 juin, la sénatrice démocrate Elizabeth Warren, parfois citée comme possible colistière d’Hillary Clinton, a déjà dénoncé les pratiques d’Apple sur le marché de la musique.

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