Prince  un esprit romantique et punk 

Prince  un esprit romantique et punk 

Le Monde
| 22.04.2016 à 08h39
Mis à jour le
22.04.2016 à 12h07
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Par Stéphanie Binet

« Vous étiez de l’autre côté de la salle, vous dansiez si fort, je sentais votre parfum’ », susurrait, en 1986, une voix française sur le single, Girls & Boys. Cette voix, c’est celle de Marie France, la créatrice de costumes qui collaborait avec Prince depuis le tournage du film Purple Rain, en 1983.

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Le baiser d’adieu de Prince

La Française a travaillé trois ans avec le musicien de Minneapolis, le temps de trois albums, Purple Rain, Around the World in a Day et Parade, bande originale du film Under the Cherry Moon, dont le tournage se déroulait à Nice.

Marie France Drouin, pour l’état civil, avait suivi toute la troupe dans les studios de Paisley Park (Minnesota) pour préparer les costumes de ce film inspiré par les années 1930. Prince terminait d’enregistrer l’album Parade, qui devait en être la bande-son. « Il était 20 h 30, un soir, quand il a demandé à me parler, raconte-t-elle. Il voulait que je lui traduise un texte en français et que je vienne le lire au studio. Je lui ai proposé quatre versions, car sa petite déclaration pouvait être interprétée de manière différente. Et il m’a dit : Je ne comprends rien au français, Marie France, fais comme tu le sens.’ J’ai lu mon petit charabia et je me suis dit : Bon, la prochaine prise sera meilleure.’ Wendy et Lisa [membres du groupe de Prince] ont applaudi et Prince a déclaré : C’est bon, c’est dans la boîte.’ »

La collaboration la plus visible de Prince avec cette Française, qui vit à Los Angeles depuis 1979, est certainement les costumes pour le film Purple Rain. Elle avait été recrutée pour les tenues féminines par le réalisateur Albert Magnoli qui lui avait suggéré d’aider l’équipe qui s’occupait de celles de Prince : « Ils n’avaient que des costumes pour les concerts. Les tenues de scène et celles d’un film sont différentes. En concert, il faut qu’elles soient vues de loin. Au cinéma, le tissu doit être impeccable car on filme au plus près. »

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Dentelles et jabots

Au premier rendez-vous, le musicien la snobe, se cache derrière ses lunettes, écoute d’une oreille et regarde par la fenêtre : « Il s’est retourné quand j’ai dit au réalisateur que je voulais faire un bon film et pas une merde comme ceux d’Elvis Presley. C’est comme ça que j’ai pu lui montrer mes idées. A partir du moment où vous compreniez son univers musical, sa sensibilité et qu’il n’avait pas envie d’être dérangé pour des sornettes ou pour faire la conversation, tout se passait très bien. La clé, c’était de respecter son univers. »

Marie France connaissait déjà Prince pour avoir écouté l’album Controversy (1981) et vu ses premières apparitions télé : « Dans ses tenues, il y avait en même temps des choses avec des chaînes, des vêtements très noirs et puis tout d’un coup un truc très flamboyant. Il portait déjà son manteau pourpre. J’ai voulu accentuer son esprit romantique et punk à la fois. J’ai cherché à le rendre plus percutant, magnifié. »

Elle lui suggère alors de porter des dentelles, s’inspire des vêtements du XVIIIe siècle, comme les jabots pour remplacer « ses chemises assez laides avec des petits volants sur le côté ».

Après le tournage, lors duquel Prince évite les essayages en décrétant que, « de toute façon, Marie France fait la même taille que [lui], 1,60 m », elle l’a suivi sur les plateaux télé et les clips : « Prince était très espiègle, il me faisait toujours croire qu’il choisissait une autre tenue que celle que j’avais sélectionnée en loge. Et il me disait : Ces Françaises, il faut toujours qu’elles fassent des histoires.’ Il finissait toujours par porter ce que je choisissais. Je lui suis extrêmement reconnaissante. Et pour ma petite participation sur Girls & Boys, il a été très généreux. »

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