Migrants , la Méditerranée redevient un cimetière

Migrants , la Méditerranée redevient un cimetière

Le Monde
| 06.06.2016 à 16h28
Mis à jour le
06.06.2016 à 16h47
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Par Maxime Vaudano

Un an après, dans le même décor macabre, le même drame est en train de se rejouer en Méditerranée. Alors que les flux migratoires s’étaient concentrés, pendant l’hiver 2015-2016, sur la « route de l’Est », passant par la Turquie, la Grèce et les Balkans, le retour du printemps a poussé des milliers de migrants à entreprendre la traversée de la Méditerranée entre l’Afrique du Nord et l’Italie.

Presque 16 morts par jour

Selon l’Organisation internationale des migrations (OIM), près de 2 500 personnes ont déjà perdu la vie sur les routes migratoires méditerranéennes sur les cinq premiers mois de l’année 2016, malgré le sauvetage de milliers de personnes par les marines italienne et grecque.

Cela représente 15,8 morts chaque jour depuis janvier, et près de 90 % des morts que l’OIM a pu documenter sur l’ensemble des routes migratoires du monde en 2016.C’est un tiers de plus que le bilan en Méditerranée à la même période en 2015, année qui avait vu périr un nombre record de 3 770 migrants (chiffre considéré comme sous-estimé en raison de la difficulté à retrouver les corps à l’issue de naufrages).

Par comparaison, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés estime que 204 000 migrants ont survécu à la traversée maritime vers l’Europe depuis le début de l’année.

Les départs de Libye se poursuivent alors que la route de l’Est se tarit

Si les arrivées en Grèce ont été considérablement freinées par l’accord Europe-Turquie du 18 mars 2016, la route de la Méditerranée centrale (menant de l’Afrique subsaharienne vers l’Italie, en passant par la Libye, la Tunisie ou l’Egypte) est redevenue le premier point d’accès vers l’Europe, comme au début de la crise migratoire.

Non que les migrants se détournent d’une route pour l’autre, mais le chemin de la Méditerranée centrale est traditionnellement moins emprunté l’hiver. Il ne fait donc que retrouver le niveau de fréquentation constaté l’année dernière à la même période.

On y retrouve beaucoup de migrants venant d’Erythrée, pays dont le régime totalitaire a développé une surveillance de masse de la population et une répression systématique de toute forme de contestation. Beaucoup de ceux qui ont entrepris la traversée ces derniers mois étaient bloqués depuis un certain temps en Libye pays dans lequel quelque 400 000 migrants seraient en transit, selon un récent rapport d’Interpol et Europol.

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Multiplication des « super-naufrages »

Outre la recrudescence des traversées, l’augmentation du nombre de drames s’explique par le fait que les passeurs recourent de plus en plus à des bateaux de pêche, parfois même sans moteur, gageant que les migrants seront secourus à leur arrivée dans les eaux internationales.

Les données récoltées par les contributeurs du projet « The Migrant Files », qui s’efforce de documenter toutes les morts et disparitions des migrants sur les routes d’Europe à partir de sources fiables, jettent une autre lumière sur ce drame. Elles montrent qu’au-delà d’une multiplication des naufrages, le drame a gagné ces dernières semaines en ampleur. Le 15 avril et le 26 mai, les naufrages de deux attelages de deux bateaux surpeuplés ont provoqué la noyade de près de cinq cents personnes à chaque fois.

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