Les votes à la présidentielle autrichienne révèlent les clivages du pays

Les votes à la présidentielle autrichienne révèlent les clivages du pays

L’Autriche a désigné lundi 23 mai son président, après un scrutin incroyablement serré mais aussi très polarisé. Alors que les électeurs ont écarté dès le premier tour les partis traditionnels, sociaux-démocrates et conservateurs, les deux finalistes se situaient aux extrémités de l’échiquier politique. L’écologiste Alexander Van der Bellen (Verts) l’a emporté de justesse face au candidat d’extrême droite, Norbert Hofer (FPÖ).

Le récit :
 

En Autriche, l’extrême droite défaite sur le fil

Un sondage réalisé le jour du vote par l’institut SORA auprès de 1 222 personnes, dont 966 votants, nous en apprend un peu plus sur les profils très divergents des partisans des deux camps.

Les hommes votent plus pour l’extrême droite que les femmes

L’un des enseignements les plus marquants de cette étude est le fossé entre les préférences des électeurs féminins et masculins : 60 % des hommes interrogés ont ainsi choisi le candidat de l’extrême droite, alors qu’autant de femmes lui ont préféré son rival écologiste.

Un scrutin serré dans toutes les tranches d’âges

L’âge n’a en revanche joué qu’à la marge sur le vote, selon ce sondage. Le candidat écologiste aurait plutôt les faveurs des moins de 30 ans (54 %) et des personnes âgées (51 %), mais pas du reste de la population. Des écarts à relativiser puisqu’ils restent dans la marge d’erreur (environ 4 points), mais qui donnent une autre image du vote d’extrême droite : en France, on constate notamment de forts écarts selon l’âge des électeurs. Aux dernières régionales, le Front national a réalisé ses meilleurs scores chez les 18-24 ans (35 %) alors qu’il a plafonné à 20 % chez les 60 ans et plus, selon un sondage Ipsos/Sopra Steria réalisé à l’époque.

L’extrême droite largement en tête chez les ouvriers

Les clivages les plus impressionnants apparaissent en fonction des catégories socioprofessionnelles des électeurs. Le populiste Norbert Hofer capte la quasi-totalité du vote des ouvriers (86 %), alors que la classe moyenne penche davantage pour l’écologiste Alexander Van der Bellen, mais dans des proportions moins impressionnantes (60 % des employés, 55 % des cadres). Les retraités en revanche sont très partagés.

Le candidat écologiste plébiscité par les plus diplômés

Comme pour le Front national en France, on constate une corrélation forte entre le vote d’extrême droite et un faible niveau d’études. En Autriche, le système scolaire oriente rapidement les élèves entre une filière professionnelle et des études longues. Or deux tiers des électeurs qui ont choisi l’apprentissage ont voté pour l’extrême droite. A l’inverse, 73 % des titulaires d’une Matura (équivalent au bac) et 81 % des diplômés du supérieur se sont tournés vers Alexander Van der Bellen, qui est lui-même professeur d’économie à l’université.

Des électeurs d’extrême droite très pessimistes

Le sondage de SORA avance quelques explications au vote d’extrême droite : les personnes interrogées sont plutôt pessimistes sur la qualité de vie en Autriche (67 % estiment qu’elle se détériore) et leur situation personnelle (69 % de mécontents). Les électeurs de Norbert Hofer sont persuadés que leur candidat « comprend les gens comme eux » (68 %), et ont voté pour lui parce qu’il était « sympathique » (67 %) et « crédible » (62 %).

Les partisans de Van der Bellen avancent plus souvent des arguments politiques, comme sa capacité à représenter l’Autriche à l’étranger (66 %) et sa compréhension de la fonction présidentielle (62 %).

L’analyse :
 

Présidentielle en Autriche : Alexander Van der Bellen pourra-t-il rassembler et réformer ‘

Des villes plus « vertes » que les campagnes

Les divisions de l’électorat autrichien ne sont pas seulement démographiques ou socio-économiques, elles sont aussi géographiques. Les résultats du second tour publiés par le ministère de l’intérieur montrent que l’extrême droite est arrivée en tête dans presque toutes les circonscriptions rurales, alors que le président écologiste a remporté le vote des grandes villes et de l’ouest du pays. Les « poches » urbaines (Vienne, Graz, Salsbourg’) se détachent très nettement sur la carte.

L’éditorial du « Monde » :
 

L’avertissement autrichien

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