Le Petit Journal  de Yann Barthès l’histoire d’une rubrique devenue JT

 Le Petit Journal  de Yann Barthès l'histoire d'une rubrique devenue JT

Le Monde
| 09.05.2016 à 18h57
Mis à jour le
09.05.2016 à 20h31
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Par Daniel Psenny

Qui aurait osé imaginer que Yann Barthès, le prince de la télé impertinente sur Canal+, se retrouverait un jour sur la même chaîne que Jean-Pierre Pernaut, le présentateur du « 13 Heures » de TF1, et tête de Turc du « Petit Journal » pour ses « marronniers » journalistiques ‘ Pourquoi celui qui vilipendait « le temps de cerveau disponible » prôné un moment par les dirigeants de TF1, a t-il annoncé lui-même son départ de Canal+ pour la Une ‘

« Les temps et l’époque ont changé », répond l’entourage de Yann Barthès qui, aujourd’hui comme hier pendant ses années Canal, s’astreint toujours à un silence médiatique. « Il faut faire venir de nouveaux visages sur la chaîne et ne pas s’occuper du passé », explique-t-on à la direction de TF1.

D’ailleurs, c’est par un communiqué à l’Agence France-Presse, lundi 9 mai, au petit matin, qu’il a annoncé son départ de la chaîne cryptée, prenant de court tout le petit monde médiatique. Un monde qu’il n’a jamais, d’ailleurs, trop voulu fréquenter.

Dans « Le Petit Journal » il a décortiqué, décrypté et trituré souvent avec talent tout le discours médiatique des politiques au point d’être accusé par certains, comme Jean-Luc Mélenchon, de « tordre la réalité ». Mais, surtout, il a influencé tous les journaux télévisés qui, comme le « 20 Heures » de France 2, s’est mis à décrypter quelques séquences d’actualité avec son « ‘il du 20 Heures ».

Fils de cheminot

Né à Chambéry (Savoie) en 1974, ce fils de cheminot a bien tracé sa route. Après des études de journalisme à l’IUP de Bordeaux, il entre en 1999, comme stagiaire, au service de presse de Canal+, où il découpe les journaux pour la revue de presse. A la même époque, dans les couloirs de la chaîne, Yann Barthès croise Mélissa Theuriau qui effectue un stage à « Nulle part ailleurs ».

En 2004, après un détour par le magazine « + Clair » consacré aux médias, il se fait une petite place au « Grand Journal », l’émission phare de Canal+, présenté par Michel Denisot. A cette époque, le magazine en clair de Canal+ est la vitrine de la chaîne cryptée et le passage obligé de tous les artistes, chanteurs, écrivains, journalistes ou sportifs qui veulent « se vendre », se faire connaître.

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Yann Barthès et son équipe passent sur TF1 et TMC

Rubricard anonyme pendant deux saisons avec « Le Petit Journal People » puis « Le Petit Journal Actu » qu’il présente en voix off, Yann Barthès s’installe enfin en 2007 sur le plateau pour y présenter « Le Petit Journal », qui prendra son indépendance en 2011 et sera diffusé après « Les Guignols ».

Autour d’une petite équipe, Yann Barthès impose un nouveau ton, grâce, entre autres, à Laurent Lucas qui gère « le placard des archives ». Chaque jour, cette « mémoire vivante de la politique », comme le qualifie un des membres de l’équipe, extrait les anciens reportages sur les hommes politiques qui répètent, à l’envi, toujours les mêmes discours au mot près. Une rubrique qui va vite faire le succès de l’émission.

Au fil des saisons, le « Petit » sera plus regardé que le « Grand » et, surtout, plus repris dans « Le Zapping » et les revues de presse pour ses révélations.

Coproducteur de l’émission

En 2011, face au succès de son émission, Yann Barthès créé la société de production Bangumi (« programmes télé » en japonais), en collaboration avec Laurent Bon, producteur éditorial du « Grand Journal ». Ils produisent alors eux-mêmes l’émission ainsi que « Le Supplément », un magazine satirique présenté le week-end sur Canal+ par Ali Badou. L’émission grandit et devient un journal télévisé complet, taillé « pour la nouvelle génération » selon le souhait de Maxime Saada, directeur du groupe Canal+.

Se présentant comme « un journaliste » plutôt qu’un humoriste, Yann Barthès n’a jamais pris de position politique. Sauf contre le Front national dont ses équipes ont dénoncé les méthodes et décrypté les discours. Ils l’ont d’ailleurs payé par des coups et des blessures portés par les militants du parti d’extrême droite. « On a beaucoup discuté pour déterminer comment on allait traiter le Front national, expliquait Yann Barthès en janvier 2012 dans un entretien à M, le magazine du Monde. Avec Marine Le Pen, c’est devenu plus compliqué, parce qu’elle a bien bossé sa communication. Avec elle, les traits sont moins grossiers. Mais pour nous, effectivement, ce n’est que l’image qui a changé avec la personne. »

Dès l’annonce du départ de Yann Barthès, Canal+ a annoncé que « ‘Le Petit Journal’ reprendra à la rentrée sur Canal+ dans une formule rénovée » et a « remercié Yann Barthès et Bangumi pour les belles années passées ensemble ». Des remerciements devenus rares ces derniers mois sous le règne de Vincent Bolloré qui, depuis septembre 2015, a licencié brutalement tous les anciens dirigeants de la chaîne cryptée sans même leur rendre le moindre hommage. Mais, l’on sait que dans les affaires, il ne faut jamais insulter l’avenir’

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