Le nouvel accord de paix avec les FARC signé en Colombie

Le nouvel accord de paix avec les FARC signé en Colombie

Le texte devra être ratifié par le Parlement, et non par référendum comme le précédent. L’opposition reste opposée à cette nouvelle mouture.

Le Monde
| 23.11.2016 à 02h01
Mis à jour le
24.11.2016 à 20h59
|

Par Marie Delcas (Bogota, correspondante)

En Colombie, gouvernement et guérilla ont signé la paix pour la deuxième fois en un peu moins de deux mois. La première version de l’accord de paix négocié avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) avait été refusée par une très courte majorité d’électeurs le 2 octobre. La nouvelle version a été signée à Bogota, jeudi 24 novembre, et sera soumise au vote du Congrès.

Selon les négociateurs, le texte a été « profondément remanié » pour tenir compte des objections et des propositions de ses détracteurs qui avaient fait campagne pour le non lors du référendum. Menée par l’ex-président Alvaro Uribe, la droite ultraconservatrice dénonce, elle, un simple maquillage de forme.

« Je regrette que les plus radicaux des partisans du non continuent de s’opposer à l’accord de paix », a déclaré le président, Juan Manuel Santos, mardi 22 novembre à la télévision. Mais, a-t-il insisté, « le temps presse ». Le conflit armé colombien a duré plus d’un demi-siècle. Les négociations plus de quatre ans. Le chef de l’Etat a évoqué « le risque, qui grandit chaque jour, de voir tout ce qui a été obtenu s’effondrer, étant donné la fragilité du cessez-le-feu ». La trêve bilatérale définitive entrée en vigueur fin août a été respectée pendant plus de deux mois. Mais mercredi 16 novembre, le gouvernement a annoncé que dans le centre du pays, deux guérilleros ont été tués au cours d’un incident, que l’ONU chargée de superviser le cessez-le-feu tente d’éclaircir.

La recrudescence des assassinats de responsables paysans et de défenseurs des droits de l’homme trois au cours du week-end a également contribué à assombrir le panorama. « Des vies ont été perdues, d’autres sont en danger. Nous nous devons d’agir avec diligence et fermeté pour corriger cette situation », a continué M. Santos.

« Le moment est à l’union »

Les partisans de la paix négociée n’ont pas oublié le massacre des militants de gauche qui avait suivi la première tentative de paix avec les FARC, dans les années 1980. Depuis le début de l’année, plus de cinquante responsables d’organisations sociales ont été assassinés dans les régions touchées par le conflit.

C’est par un bref communiqué conjoint que FARC et gouvernement ont annoncé mardi la décision de soumettre le nouveau texte au Congrès. M. Santos y dispose d’une confortable majorité. « Une nouvelle campagne polariserait de manière dangereuse le pays. Le moment est à l’union, pas à la division », a déclaré le président, en rappelant que tous les départements et toutes les forces politiques sont représentés au Congrès.

L’accord de paix a été renégocié à La Havane. Les chefs guérilleros ont fait de nombreuses concessions, mais ils ont refusé de céder sur les conditions de leur participation en politique. « C’est la raison d’être de toute négociation de paix », insiste le conseiller présidentiel Sergio Jaramillo. Les « uribistes » voudraient voir les chefs guérilleros payer de lourdes peines de prison avant de pouvoir briguer un mandat.

Pendant six heures, lundi, les négociateurs du gouvernement ont tenté de convaincre le camp du refus des vertus du nouvel accord. Sans succès. Alvaro Uribe et ses alliés désapprouvent le document et exigent un nouveau référendum. « Sans consultation populaire, le nouveau texte est illégitime », considère le sénateur Alfredo Rangel.

Au terme de la réunion, Alvaro Uribe a surpris en se déclarant prêt à dialoguer avec le gouvernement « et avec les FARC », ce qu’il avait refusé de faire il y a deux mois. Pour les anti-uribistes, l’ex-président fait de la politique politicienne, les yeux rivés sur la présidentielle de 2018. Une campagne qui ne facilitera pas la mise en application de l’accord remanié.

La paix se fera sans consensus de la classe politique ni de la société colombienne. Jeudi, le nouvel accord a été signé dans le théâtre Colon du centre de Bogota, au cours d’une modeste cérémonie, loin des fastes de la première signature. L’enthousiasme manque désormais à l’appel.

Lire notre entretien avec Juan Manuel Santos :
 

« Pour le gouvernement, la seule ligne rouge est celle du retour de la guerre »

Leave A Reply