Internet au secours des doudous perdus

Internet au secours des doudous perdus

Votre enfant a perdu Dudule et c’est le drame. Heureusement, sur la Toile, des solutions existent pour recoller son petit c’ur brisé.

L’idée lui est venue lorsque sa fille Hannah a perdu son « doudou chéri, un lapin de marque inconnue » « le plus moche et gros qui soit », convient Pascal Regimbaud. Désespoir. Larmes. Puis joie immense, lorsque la bébête est réapparue, sous le siège de la voiture. Pour épargner à d’autres ses péripéties, Pascal Regimbaud a créé, en 2002, le site SOSDoudou, qui héberge les appels de détresse parentaux. Aujourd’hui, les deux tiers de ses 1 900 annonces concernent des recherches, le dernier tiers des « doudous ramassés », des messages très pointus pour la plupart : « J’ai trouvé un doudou plat, nounours beige un peu fatigué et usé au niveau des pattes. Il était sur la route, à Louvres dans le Val-d’Oise, perpendiculairement à la rue Saint-Justin. C’était ­samedi 7 mai à 13 heures. »

Un substitut de parent

« Mon site est celui de la dernière chance », explique ce cadre commercial qui constate que les parents se tournent spontanément vers Twitter, Facebook, Instagram, ou encore Leboncoin et eBay. Pourtant, « c’est bel et bien grâce aux annonces qu’on ­retrouve le propriétaire d’un doudou », plus rarement par l’intermédiaire d’avis de recherche, observe M. Regimbaud.

Lange en tissu, éléphant élimé, fringante poupée, nounours moelleux ou hideuse marmotte, le doudou est un indéfectible prolongement de l’enfant. Que le « précieux » déjoue sa vigilance, se dérobant des petites mains, glissant sur la chaussée, se carapatant sous une banquette ou restant là, planté au beau milieu d’une allée d’un grand magasin, et c’est le drame. Objet transitionnel, défini comme tel en 1951 par le pédiatre et psychanalyste britannique Donald W. Winnicott, le doudou est un substitut du parent, et constitue une parade aux peurs liées à la séparation. Ce qui explique le lien ténu établi avec cet allié, et son statut si privilégié.

« Avoir perdu doudou revenait à avoir égaré un petit bout de ma fille », témoigne Déborah, maman de trois enfants qui, grâce à son message en ligne, a récolté un total de trois doudous à l’identique de celui égaré, sans compter « l’originel » « retrouvé depuis dans un rayon d’un magasin de bricolage ». Mais les épilogues ne sont pas toujours aussi heureux. Hélène Baron, chargée de communication qui officie depuis décembre 2013 derrière la page Facebook Oukilé Mon Doudou et le compte Twitter@sos_doudou, assure que « passé trois jours, en ville comme sur les réseaux, il y a peu d’espoir de retrouver le doudou perdu ».

« Je pratique des tarifs raisonnables, sans tirer parti de la détresse des parents. » Caroline Kerbellec, fondatrice de 123doudou

« Il revient avant tout au parent de dédramatiser la situation et d’assurer l’enfant qu’il met tout en uvre pour retrouver son doudou », explique la psychologue Catherine Pierrat. Des parents prêts à tout pour remettre la main sur Doudou avec un grand D, Flapi, Tidou, Meuh-Meuh, Crapouille, ­Dudule ou Yaya, ou lui trouver un digne remplaçant et sosie parfait. Certains sites marchands l’ont bien compris. Derrière les enseignes virtuelles ­d’Ileaudoudou, Milledoudou, Doudoumalin, Calindoudou, Doudous perdus ou encore 123doudou, ce sont autant de cavernes d’Ali Baba qui engrangent jusqu’à 6 500 références et 300 marques. Quelques clics suffisent pour retrouver l’élu, neuf ou d’occasion, livrable dans les quarante-huit heures.

A défaut, les sites comme 123doudou se mettent en quête du Graal, ajustant leurs tarifs en fonction de la difficulté de la requête : ­modèle collector, coloris ou dimension spécifique, état, etc. « Il n’existe pas d’Argus à proprement parler pour le marché du doudou, explique ­Caroline Kerbellec, autoentrepreneuse aux manettes de 123doudou depuis sept ans. Je pratique des tarifs raisonnables, et sans tirer parti de la détresse de parents parfois prêts à tout pour combler le chagrin de leur petit bout. »

Même état d’esprit chez Doudou et Compagnie, le leader du marché français chez qui deux salariées officient à temps complet pour répondre aux seuls avis de recherche. « Malgré notre base musée’ qui conserve des doudous bien après l’arrêt de la fabrication, le stock peut s’épuiser, convient Déborah Vital, responsable commerciale et développement. Nous estimons toutefois à plus de 75 % les demandes satisfaites, sur une fourchette comprise entre 15 à 30 sollicitations quotidiennes. » Une fois la merveille récupérée, « le mieux est de multiplier le doudou, ce qui lui confère une judicieuse ubiquité, conseille la psychologue Catherine Pierrat. Ce sont les parents qui donnent un caractère exclusif au doudou, pas l’enfant. Le parent doit lui faire savoir qu’il a LE doudou mais pas UN doudou, ce qu’il discerne aisément ! »

Un sosie sur mesure

Dernière solution : recréer la bestiole, d’après photo. C’est ce que propose Marie-Jean Simon-Deforge, qui fabrique des doudous à la ­demande, au sein de son entreprise artisanale ­M-Peluches à Argenton-sur-Creuse (Indre). « Le doudou ressemblant satisfait pleinement les parents. Il est souvent plus gros, et les coloris et matières diffèrent », souligne-t-elle. Ici, le caractère urgent des commandes se heurte aux incompressibles délais de fabrication, compris entre dix et douze semaines actuellement. « Si nous nous entendons sur les délais, si j’arrive à distinguer les formes, souvent partielles, d’après les photos que les parents m’envoient, tout est possible », avance-t-elle. Mais, pour cette fée du patronage, rien n’a plus de valeur que le doudou qu’un parent peut fabriquer de ses mains et reproduire à l’envi, en cas d’usure, de détérioration ou de perte. Le doudou de son petit dernier ‘ « Je l’ai ­fabriqué en quatre exemplaires. Pour l’instant. »

Jamais sans mon doudou

Doudou dessiné

Tout comme Marie-Jean Simon-Deforge de M-Peluches, Sidonie Bencik, aux manettes de l’atelier Zut !, réalise des doudous uniques à partir des dessins de vos enfants. Compter pour cette uvre à quatre mains 120 euros + frais de port. www.atelier-zutfrance.com

Doudou connecté

A doudou connecté, doudou mieux protégé ! Oliba est « la chouette complice des enfants et du doudou », et l’alliée de la quiétude des parents. Ce gros badge lumineux la nuit s’attache au doudou et permet de le géolocaliser par appli interposée. 45 euros, frais de port en sus. Oliba.fr

Doudou tatoué Le concept développé par Doudou Tatoo revient à coudre une étiquette sur le doudou, munie d’un code unique d’identification et d’un numéro vert d’appel indélébiles. Un simple enregistrement permet de valider cette immatriculation. Le tatouage : 7,50 euros, doudoutatoo.com

Leave A Reply