En Chine près de 500 élèves malades dans un lycée situé sur un terrain pollué

En Chine près de 500 élèves malades dans un lycée situé sur un terrain pollué

Le Monde
| 19.04.2016 à 06h53
Mis à jour le
19.04.2016 à 11h27
|

Par Harold Thibault

Dans un pays où pollution et éducation comptent parmi les préoccupations majeures des familles, un sujet diffusé par la télévision publique chinoise, dimanche 17 avril, sème l’anxiété. Selon ce reportage de CCTV, 493 enfants sont malades sur les 620 qui ont subi un examen médical à l’école des langues étrangères de la ville de Changzhou, dans le très industriel delta du Yangzi. Plaques d’irritations, saignements de nez : on relève dans ce collège-lycée des cas de bronchite mais aussi de lymphome et de leucémie.

Le site accueille 2 800 étudiants depuis son ouverture en septembre 2015. Par le passé, la zone était consacrée à l’un des piliers de l’économie de Changzhou, 160 km à l’ouest de Shanghaï : la chimie.

En réalité, l’affaire qu’évoque la télévision centrale n’est pas inédite. A l’hiver 2015-2016, l’agence officielle Chine nouvelle faisait état d’une odeur pestilentielle provenant de l’autre côté de la rue. En particulier à partir de décembre, trois mois après l’inauguration du nouveau complexe d’enseignement secondaire, parents et enfants s’étaient alarmés de la multiplication des cas d’éruptions cutanées, d’irritations oculaires et de nausées.

« Guerre contre la pollution »

Les Chinois s’inquiètent particulièrement des pollutions de source chimique, dans des villes où un certain laxisme a longtemps régné, dans un contexte de course pour attirer les investissements. La lutte contre ce fléau est devenue un thème politique majeur. En mars 2014, le premier ministre, Li Keqiang, déclarait une « guerre contre la pollution ». Signe de la crainte populaire, le hashtag « école contaminée » atteignait 43 millions de références sur Weibo, le Twitter chinois, mardi 19 avril au matin.

En janvier, le site d’information Caixin, réputé pour ses enquêtes malgré la censure qui pèse sur la presse chinoise, citait un parent jugeant l’odeur insupportable même le temps de déposer les enfants le matin devant l’établissement incriminé : « Mais eux doivent rester à l’école et respirer cet air toxique toute la journée. C’est déchirant. »

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Lorsque les cours avaient repris en février après les congés du Nouvel An lunaire, certaines familles avaient hésité à y renvoyer leurs enfants, d’autres avaient cherché à les scolariser ailleurs, ce qui n’est pas évident en milieu d’année.

Dès le 29 janvier, le ministère de l’environnement avait déterminé que l’odeur provenait du site industriel abandonné, un temps partagé par trois acteurs de la chimie dont Changlong, une branche du premier producteur chinois de pesticides, Noposion, qui avait ouvert là une usine en 2000 pour la fermer en 2010.

Des déchets toxiques enterrés sur le site

Mi-février, Gao Yuefeng, le sous-directeur du bureau environnemental du district de Xinbei, où le site est implanté, avait expliqué à la presse locale qu’une enquête avait bien été conduite entre 2011 et 2013. Les autorités avaient relevé des niveaux d’hydrocarbures et de chlorure de benzyle élevés, mais M. Gao précisait que la contamination du sol n’était pas « grave », tandis que celle de l’air restait dans les normes nationales.

Pourtant, d’après l’un des articles de Caixin, plusieurs ex-salariés de l’usine aujourd’hui à la retraite, dont un nommé Xu Lixiong, racontaient dès octobre 2015 au bureau de l’environnement que l’usine avait enterré des déchets toxiques avant de déménager. Un de ses anciens collègues avait expliqué que, entre 2008 et 2010 en particulier, l’entreprise avait fait disparaître à une dizaine de mètres sous terre une quantité indéterminée de ces déchets.

L’administration locale s’était défendue contre ces accusations, soutenant avoir creusé à trente endroits et dépensé 1 million de yuans (136 000 euros) pour une investigation de quinze jours, sans rien découvrir de problématique. Mais pour M. Xu et les autres retraités lanceurs d’alerte, les officiels avaient en fait employé une carte inexacte.

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