Effectifs policiers et  terrain  les contorsions d’Eric Ciotti

Effectifs policiers et  terrain  les contorsions d'Eric Ciotti

Pas facile, d’assumer des baisses d’effectifs policiers lorsqu’on campe un chantre de la sécurité des Français. Le camp sarkozyste en sait quelque chose : depuis longtemps, il tente de fustiger le manque de moyens de la police sous François Hollande’ qui le renvoie aux milliers de postes de policiers et gendarmes supprimés entre 2007 et 2012.

Nicolas Sarkozy avait un temps pensé avoir trouvé la parade, en prenant les effectifs de 2002 (son arrivée au ministère de l’intérieur) à 2012. Las, si cela permettait d’atténuer la baisse globale (les effectifs policiers ont augmenté de 2002 à 2007), le solde restait négatif d’environ 2 000 postes.

Mais depuis quelques semaines, un nouvel argument est mis en avant, celui de la présence des policiers et gendarmes « sur le terrain ». Eric Ciotti, soutien du président des Républicains, l’a employé plusieurs fois ces derniers jours. Ainsi, le 25 mai sur Public Sénat :

Et mardi 8 juin, sur LCP :

Pourquoi c’est plus compliqué

Une baisse d’un à deux points

De quoi parle-t-on ‘ Il existe, dans les documents d’élaboration du budget, un indicateur spécifique, qui mesure, dans le travail réalisé par des policiers et des gendarmes, celui correspondant à du temps passé « à l’extérieur ». C »est sur cet outil que s’appuie M. Ciotti.

Voici, sous forme de graphique, ce que donne cet indicateur depuis 2007, pour policiers et gendarmes.

On le voit, le taux est effectivement un peu moins bon entre 2012 et 2014 (2015 est une prévision, visiblement optimiste par rapport aux années précédentes) qu’entre 2007 et 2011. Précisément, il est en recul d’un point pour les policiers et de 1,93 point pour les gendarmes en moyenne sur ces deux périodes comparées.

Si on s’en tient à ce strict chiffre, Eric Ciotti a raison : les policiers et les gendarmes passent une proportion légèrement moindre de leur temps sur le terrain.

La part de « terrain » ne compense pas les baisses d’effectifs

Toutefois, en disant « il y avait plus de policiers sur le terrain » sous Sarkozy, M. Ciotti laisse entendre qu’il y avait, dans l’absolu, un nombre plus important de policiers. Or, on l’a vu, le « taux de présence sur le terrain » ne mesure pas le nombre de policiers qui s’y trouvent, mais la part qu’y consacrent policiers et gendarmes.

Entre 2007 et 2012, police et gendarmerie ont perdu autour de 10 000 postes (le solde varie selon les comptages et les méthodes), soit près de 5 % de leur effectif total. Une hausse de 1 % de leur « taux de présence sur le terrain » ne compense pas cette baisse.

Un indicateur biaisé

Il est enfin à souligner que cet indicateur du « terrain » souffre de quelques biais. Le rapport sénatorial de 2016 sur le budget précise : « le système d’information ne permet pas de distinguer le type des emplois », puisque « tous les personnels sont pris en compte », des administratifs, qui n’ont pas vocation à « aller sur le terrain », aux policiers des brigades d’intervention d’élite, qui font peu de « paperasserie ».

Autrement dit, si le personnel administratif est très efficace dans la réalisation de ses missions, le taux de « présence sur le terrain » diminuera. Autre biais : plus les policiers ont une activité soutenue en termes d’arrestations, plus ils doivent remplir d’actes de procédures, donc de « paperasse », là encore décomptée du « travail de terrain ». En clair, pour augmenter ce taux, le plus simple, pour les policiers, serait de passer beaucoup de temps à patrouiller, sans procéder à des arrestations.

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