Des enfants Roms privés de rentrée scolaire par le maire de Maubeuge

Des enfants Roms privés de rentrée scolaire par le maire de Maubeuge

«
C’est ma position aujourd’hui. Ne sachant pas si ces enfants habitent Maubeuge, je ne suis pas tenu de les scolariser.
» Arnaud Decagny se veut inflexible. L’année dernière, sept jeunes Roms ont pourtant été répartis dans les établissements de Sous-le-Bois. Un accord reconduit, pour cette rentrée 2016. «
Eux font partie d’un programme de réinsertion, on est dans la continuité.
» Mais pour les demandes supplémentaires que la mairie (en charge des inscriptions dans les écoles) a reçues, c’est non.

Conscient de flirter avec l’illégalité, l’élu pointe «
une situation intolérable dans un quartier déjà précaire, des riverains excédés
» et des démolitions à la faveur de la rénovation urbaine qui traînent «
parce que des maisons sont occupées de façon illicite par des Roms. J’en ai ras le bol
». Seulement, l’école est obligatoire dès six ans, et c’est au maire que revient le devoir d’y inscrire les enfants dès lors qu’ils résident dans sa commune.

« Je n’ai pas la responsabilité de les prendre »

«
Quand on veut faire des inscriptions scolaires, là on sait à peu près où ils habitent. Mais quand on veut lancer les procédures d’expulsion, là on ne sait plus où sont les occupants, parce que ça bouge sans cesse, et que tout change. C’est très agaçant. On me dit qu’ils sont sur ma ville, moi je n’en suis pas sûr.
» C’est sur ce flou que s’appuie Arnaud Decagny pour refuser les domiciliations, indispensables à la scolarisation. D’ordinaire, les centres communaux d’action sociale les délivrent sous conditions, pour les populations «
sans domicile stable, qui ont un lien suffisant avec la commune
». «
Le CCAS de Maubeuge (présidé par le maire) refuse de les donner
», regrette une riveraine, qui a tenté de venir en aide à ces familles Roms.

«
Il faut que l’État prenne ses responsabilités et trouve des solutions. Il y a des maisons en situation de péril, Sous-le-Bois est un quartier qui est en train de mourir, il faut aller vite dans les destructions
», juge Arnaud Decagny. La non-scolarisation des enfants Roms comme moyen de pression «
Le vrai problème, c’est celui de leur sécurité dans ces squats. Je n’ai aucune preuve qu’ils habitent ma commune, je n’ai pas la responsabilité de les prendre.
» Sauf que tous les enfants ont le droit d’être scolarisés. Sur ce point, l’Éducation nationale est formelle. Le maire botte en touche. «
Libre aux directeurs d’écoles de les inscrire de façon temporaire.
»

Le point sur les inscriptions

À Maubeuge, sept enfants Roms sont scolarisés. À Louvroil, ce sont une dizaine de jeunes qui sont inscrits à l’école Suzanne Lannoy-Blin. Les effectifs sont désormais complets (188 écoliers), et sauf à ouvrir une classe supplémentaire, il n’y a plus de possibilités d’accueil dans cet établissement. À Jeumont et à Hautmont, aucune inscription d’enfant Rom n’a été pour l’heure enregistrée.

«Le chien qui court après sa queue»

Des membres du Collectif Roms Sambre-Avesnois déplorent ce refus de la municipalité de scolariser plusieurs enfants et cette attitude du «
chien qui court après sa queue. Ils exigent des justificatifs de domicile que les familles sont dans l’incapacité de fournir, puisqu’elles vivent dans des squats
». Eux assurent avoir rédigé des attestations sur l’honneur, pour tenter de débloquer la situation. «
L’année dernière, ils avaient accepté. L
à, ça ne suffit pas,
ils demandent des factures à la même adresse.
»

« Le droit d’être scolarisés »

«
Les enfants Roms sont des enfants et à ce titre, ils ont le droit d’être scolarisés
», indique Christine Maiffret, inspectrice de l’Éducation nationale et reponsable académique du CASNAV (qui accompagne la scolarisation des enfants nouvellement arrivés en France). Comme pour tous les autres écoliers, certaines conditions sont posées, telles que la vaccination. Sans domicile établi, les familles Roms peuvent se tourner vers les centres communaux d’action sociale des villes dans lesquelles elles se sont installées, afin de demander une domiciliation (valable un an).

Une procédure qui leur permet d’obtenir une adresse administrative et d’avoir accès à certains droits fondamentaux, comme la scolarisation. «
Le CCAS d’une commune n’est toutefois obligé de les domicilier que si (les requérants) ont un lien suffisant avec elle
», peut-on lire sur la réglementation en vigueur.

Leave A Reply