Déjà quatre Nordistes recensés dans la carte de France des victimes des pesticides

Déjà quatre Nordistes recensés dans la carte de France des victimes des pesticides

«
Je vis au milieu des vignes et je vous confirme que l’air n’est pas respirable les jours de traitement.
» «
J’ai un potager et des abeilles en bordure de champ et je constate chaque année une mortalité anormale et alarmante.
» «
À l’école, il y avait une grosse machine et la maîtresse nous disait de mettre la main devant la bouche ou de rentrer.
» Ces témoignages sont livrés par des Français vivant aux abords de cultures utilisant des pesticides.

Générations Futures, association nationale de défense de l’environnement agréée depuis 2008 par le ministère de l’Écologie, publie ce jeudi une carte interactive qui livre 200 témoignages, anonymes, de professionnels ou de riverains victimes des pesticides. Quelque 200 témoignages supplémentaires, en cours de validation, devraient compléter la carte. À terme, l’association souhaite mettre en place une coordination nationale d’aide regroupant des organisations d’aide aux victimes.

>>> Cliquez ici pour accéder à la carte interactive des victimes de pesticides.

Maux de tête, allergies, asthmes’

L’ambition de cette carte est de prouver que l’ensemble du territoire est exposé à des produits nocifs pour l’homme qui peuvent provoquer maux de tête, allergies, asthmes et irritations. Voire favoriser le développement de cancers du poumon, de l’intestin ou de la prostate, de leucémies ou de maladies de Parkinson.

Patrick, agriculteur alsacien qui utilisait des pesticides, a développé un Parkinson précoce à l’âge de 35 ans. Laurent, ancien salarié d’une entreprise agroalimentaire dans les Côtes-d’Armor a été licencié pour inaptitude à cause d’une hypersensibilité aux produits chimiques multiples développée au contact de céréales traitées avec des pesticides. «
Ma fille a développé une puberté précoce à l’âge de 6 ans
», raconte pour sa part Madame Y, qui habite dans les Flandres, «
à moins de dix mètres de diverses cultures
». Comme elle, trois autres Nordistes, vivant du côté de Lomme, Saint-Amand-les-Eaux et Somain, témoignent (lire ci-dessous).

100.000 tonnes de pesticides dangereux

Le 20 mars 2016, l’agence internationale de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la santé (IARC) a désigné cinq pesticides aux effets cancérogènes. L’herbicide glyphosate, présent dans le produit Roundup, et les insecticides malathion et diazinon ont été classés «
cancérogènes probables chez l’homme
» par l’association. Les insecticides tetrachlorvinphos et parathion sont, quant à eux, considérés comme des «
cancérogènes possibles
».

Mais les preuves concernant le lien entre le développement de ces maladies et l’exposition aux pesticides ne sont pas suffisamment solides pour que ces produits fassent l’objet d’une interdiction en France. La plupart des agriculteurs peinent à faire reconnaître leur maladie de Parkinson ou leur cancer comme maladie professionnelle due à l’exposition aux pesticides. Et, le cas échéant, demander réparation à l’État, à l’instar de Dominique Marchal, agriculteur de Meurthe-et-Moselle, qui a été débouté, ce jeudi (lire ci-dessous).

D’après une enquête menée par Cash Investigation, diffusée sur France 2 le 2 février dernier, 100 000 tonnes de pesticides classés dangereux ou potentiellement dangereux pour l’homme sont utilisés chaque année en France.

L’agriculteur qui demandait réparation à l’État pour son cancer a été débouté

Il est l’un des visages de la lutte contre les pesticides. Ce jeudi 21 avril, Dominique Marchal a subi un revers dans le combat qu’il mène depuis plus de dix ans. Cet agriculteur de Meurthe-et-Moselle, premier exploitant dont le cancer a été reconnu comme maladie professionnelle, demandait réparation à l’Etat pour sa pathologie, qu’il impute à l’usage de pesticides. Sa demande vient d’être rejetée par la cour d’appel de Metz.

Celle-ci a estimé que les preuves de «
l’imputabilité de la maladie de M. Marchal aux effets nocifs du benzène présent dans les produits phytopharmaceutiques utilisés
» n’étaient pas suffisantes et a rejeté la demande d’indemnisation. L’avocat de Dominique Marchal, Me François Lafforgue, «
réfléchit très sérieusement à la possibilité de se pourvoir en cassation
».

Les témoignages des quatre Nordistes de la carte

Madame Y, dans les Flandres : « Nous avons un enfant et habitons à moins de dix mètres de diverses cultures : pomme, maïs, blé, haricots, pomme de terre. En période d’épandage, les pulvérisations ont lieu plusieurs fois par mois. Nos symptômes après les traitements : problèmes oculaires, problèmes respiratoires, maux de tête, fatigue répétée. En outre, ma fille a développé une puberté précoce à l’âge de 6 ans qui serait probablement due aux pesticides mais comme dit l’endocrinologue, beaucoup de causes possibles. Elle suit actuellement un traitement pour une durée de plusieurs années, suivie en centre hospitalier. Et pour ma part, j’ai des allergies aux yeux que je n’avais pas avant, des maux de tête, des vertiges inexpliqués. De plus, j’ai un poirier qui est mort, et des taches de pulvérisation sur mes arbustes et mes arbres fruitiers. Je n’ai rien engagé pour le moment. »

Monsieur Y, du côté de Lomme : « Pendant quinze ans, j’ai travaillé dans les espaces verts et j’ai été exposé aux pesticides fongicides’ J’ai eu un cancer puis une maladie neurologique est apparue, ainsi qu’une apparente maladie de Parkinson. Je suis actuellement à la retraite pour inaptitude au travail. J’ai demandé à être reconnu maladie professionnelle mais j’ai été refusé. »

Madame Y, du côté de Saint-Amand-les-Eaux : « J’habite à moins de dix mètres d’une zone de grandes cultures (blé, maïs). Les passages du pulvérisateur se font plusieurs fois par semaine en fonction de la saison. Après ces épandages, je suis souvent victime de nausées, maux de tête, fatigue répétée. J’ai improvisé un système de protection à base de hautes haies, murs, etc. Ces pulvérisations pour lesquelles j’ai demandé à être prévenue m’empêchent de vivre normalement : obligée de rester dans la maison, fenêtres et portes fermées, des journées entières, peur de recevoir de la famille à déjeuner, et pour le moment, impossibilité de discuter avec l’exploitant concerné. »

Madame Y, du côté de Somain : « Une zone non traitée de 30 mètres (ce qui est insuffisant) a été laissée par l’agriculteur entre la clôture de mon potager et son champ cultivé, ce depuis 2015. Les cultures : blé, orge, betteraves, maïs, petits pois. Les traitements ont lieu plusieurs fois par semaine sur une période de six mois (durée des cultures), ce qui représente une bonne quarantaine de pulvérisations. Nous n’avons pas de symptômes particuliers, mais nos végétaux dans le potager souffrent. Les feuilles de nos groseilliers et cassissiers le long de notre clôture sont recouverts d’une pellicule blanchâtre lors des épandages et les fruits présentent des flétrissures, les rendant immangeables. De même, certains légumes proches de la clôture sont touchés. Des riverains de notre rue, touchés eux aussi, l’ont signalé à la mairie de notre commune, laquelle a envoyé un courrier à l’intéressé, resté sans réponse. »

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