Apple , comment sont calculées les pénalités décidées par Bruxelles ‘

Apple , comment sont calculées les pénalités décidées par Bruxelles '

Le Monde
| 30.08.2016 à 16h53
Mis à jour le
31.08.2016 à 10h13
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Par Mathilde Damgé

La Commission européenne, gardienne de la concurrence dans l’Union européenne, a sévèrement puni Apple, mardi 30 août, pour avoir bénéficié d’accords fiscaux avantageux passés avec le gouvernement irlandais. Elle estime ces accords indus puisqu’ils ont privé l’ensemble des pays européens de rentrées fiscales et qu’ils n’en ont quasiment pas généré en Irlande non plus.

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Bruxelles inflige à Apple une amende record de 13 milliards d’euros

Bruxelles a estimé à 13 milliards d’euros les sommes qu’Apple n’a pas payées à l’Irlande et qu’elle devra restituer en vertu des règles européennes qui sanctionnent les aides d’Etat illégales.

Cette décision est une manière de répondre aux révélations « LuxLeaks », en novembre 2014, faisant état de ces généreux traitements de faveur fiscaux dont ont bénéficié des multinationales dans le Grand-Duché.

Mais, au-delà du symbole et du message, comment sont décidés les montants des pénalités de Bruxelles ‘ A quelles règles répondent-ils ‘

A quoi sert l’argent qui est versé ‘

En général, les sommes sont directement versées au budget de l’Union européenne. Dans le cas des affaires d’aides d’Etat, les amendes sont versées aux Etats eux-mêmes. Comme ici, où la commissaire chargée de la concurrence a déclaré ces « rulings » illégaux, car considérés comme des « aides d’Etat » abusives.

Concrètement, l’Etat irlandais touchera non pas une amende, mais une restitution des impôts qui n’ont pas été versés pendant ces trois années, somme qui peut elle-même être majorée d’intérêts. Ce qui, de fait, diminue l’attrait du pays en tant que « paradis fiscal » pour les entreprises.

C’est d’ailleurs pour cette raison que le gouvernement irlandais a contesté cette décision, le ministre des finances, Michael Noonan, se disant « en profond désaccord avec la décision de la Commission » et annonçant qu’il allait demander un appel.

Les dernières amendes liées à ces aides d’Etat, administrées à l’américain Starbucks et à l’italien Fiat, condamnés en octobre 2015, avaient aussi donné lieu à un appel de la décision de l’exécutif européen par les deux pays concernés, les Pays-Bas et le Luxembourg.

Comment est calculé le montant de la sanction

Cela dépend de la nature de l’amende. Dans le cas d’Apple, le groupe américain a bénéficié d’un taux exceptionnellement bas (entre 0,005 % à 4 % d’impôt, au lieu des 12,5 % officiels), grâce à un accord dérogatoire négocié avec les autorités. Pour calculer le montant de la restitution, la Commission européenne estime ce que l’entreprise aurait dû payer avec le taux officiel. Apple devra ainsi « rembourser » un montant record de 13 milliards d’euros, à quoi pourraient s’ajouter des intérêts le précédent record était de 1,4 milliard d’euros qu’EDF a dû verser à la France.

Dans le cas, plus courant, d’amendes à des entreprises pour des infractions au droit de la concurrence, les sommes sont proportionnelles à la « taille », à la fois du fautif et de la faute commise. Les éléments du calcul étaient détaillés ainsi dans un cas précédent, celui du cartel des camions :

« Pour fixer le niveau des amendes, la Commission a tenu compte des ventes de camions de poids moyen et lourd de chaque entreprise dans l’espace économique européen, ainsi que de la gravité de l’infraction, de la part de marché cumulée élevée des entreprises, de l’étendue géographique et de la durée de l’entente. »

Quoi qu’il arrive, l’amende est limitée à 10 % du chiffre d’affaires de l’entreprise. Ce dernier peut être calculé au niveau du groupe, si la société-mère a joué un rôle déterminant dans l’infraction.

L’amende peut-elle être négociée ‘ Peut-on y échapper ‘

Oui, en cas de « coopération ». Par exemple, l’allemand MAN (détenu par son compatriote Volkswagen), partie prenante du cartel des camions mais qui en a révélé l’existence à la Commission européenne, n’a pas eu à payer d’amende. Il a ainsi échappé à une sanction financière de 1,2 milliard d’euros. D’autres n’ont bénéficié que d’une faible réduction de l’amende, mesurée par rapport à la rapidité et l’importance de l’aide fournie à la Commission dans son enquête, de 10 à 40 % (ces réductions peuvent atteindre en principe 50 % de l’amende).

Il faut encore ajouter 10 % de réduction supplémentaire pour les entreprises qui reconnaissent leurs torts (procédure dite de « transaction », applicable uniquement pour les cas d’ententes et d’abus de position dominante). Par contre, le Suédois Scania, qui a refusé l’accord proposé par la Commission, voit l’enquête se poursuivre contre lui.

Il existe par ailleurs une procédure spéciale pour les entreprises qui peuvent prouver qu’une amende mettrait en danger leur existence même, mais dans ce cas, la Commission s’efforce « de garantir un traitement équitable et de maintenir un effet dissuasif ».

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