Affaire Baupin ,  MM. Hollande et Valls prenez des mesures fortes 

Affaire Baupin ,  MM. Hollande et Valls prenez des mesures fortes 

Le Monde
| 19.05.2016 à 06h34
Mis à jour le
19.05.2016 à 17h10
|

Par Collectif

Le 9 mai, une enquête de Mediapart et France Inter publiait nos témoignages sur le harcèlement sexuel d’un député de la République. Bien rares sont les hommes politiques qui se sont exprimés publiquement sur ce sujet depuis. Claude Bartolone [président de l’Assemblée nationale] a demandé à Denis Baupin sa démission de la vice-présidence de l’Assemblée. Manuel Valls a appelé à ce que les langues se délient et a rappelé que quand une femme dit non, c’est non.

Denis Baupin conserve néanmoins son siège de député et une mission confiée par le gouvernement sur la simplification. Elle ne lui a pas encore été retirée, à notre connaissance. Faire avancer l’égalité femmes-hommes et lutter contre le harcèlement sexuel, en politique comme dans d’autres domaines, demande la plus grande exigence en la matière, tant dans les discours que dans les actes. Les mandats et les nominations en font partie.

Au-delà du cas de Denis Baupin, la tribune des femmes journalistes politiques publiée il y a un an [« Bas les pattes », en mai 2015, dans Libération] comme celle des dix-sept anciennes ministres parue le 15 mai [dans le Journal du dimanche] montrent combien le sexisme et les violences faites aux femmes sont exacerbés dans le monde politique, mais ils ne sont néanmoins pas cantonnés à une sphère en particulier. C’est un problème qui traverse notre société et qui peine à être reconnu comme tel.

Les chiffres sont édifiants : alors que les plaintes pour violences sexuelles en France ont augmenté depuis 2011 de près de 7 000, les condamnations ont, elles, diminué sur la même période de près de 1 000. La reconnaissance de ces violences semble se détériorer.

Pourtant, on estime qu’une femme est victime d’un viol ou d’une tentative de viol toutes les minutes en France. Et sur les près de 90 000 victimes en 2014, seules 5 600 ont porté plainte et ces plaintes n’ont donné lieu qu’à 1 318 condamnations. Autant dire rien en regard du problème. Concernant les agressions et le harcèlement, la difficulté de porter plainte en regard de la faiblesse du risque de condamnation renforce le sentiment d’impunité.

Changer les mentalités

Que faire ‘, nous direz-vous. Les solutions existent. Nous pouvons d’ailleurs nous inspirer d’autres politiques publiques qui ont fait, en quelques années, changer les comportements et les mentalités, de manière radicale. Sécurité routière, préservatif, tri des déchets : sur des sujets différents, la puissance publique a réussi à transformer en profondeur nos modes de vie, nos représentations et nos comportements. Pourquoi ne pas faire de même contre les violences ‘ Les associations féministes qui travaillent sur le sujet seraient sans doute ravies d’être reçues à l’Elysée ou à Matignon pour en discuter.

Extension du délai de prescription (comme c’est actuellement en discussion), possibilité donnée aux associations de porter plainte en lieu et place des victimes, protection des victimes au sein des entreprises, éducation à l’égalité et surtout campagnes ambitieuses. Mais on pourrait aussi imaginer une commission d’enquête sur le sexisme en politique, sur les violences au sein de l’Assemblée et du Sénat.

Pour que les paroles et les actes du président et du premier ministre ne soient pas jugés durement demain, nous leur demandons de prendre des mesures fortes qui ne les placent pas dans cette majorité d’hommes silencieux, mais du côté des représentants responsables. Le sujet n’est pas à prendre à la légère.

Par Isabelle Attard (députée écologiste du Calvados), Elen Debost (adjointe EELV à la mairie du Mans), Annie Lahmer (conseillère régionale EELV d’Ile-de-France), Sandrine Rousseau (porte-parole d’EELV) et Frédéric Toutain (attaché parlementaire)

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