Violences urbaines et mouvement social à Mayotte , le gouvernement envoie des renforts

Violences urbaines et mouvement social à Mayotte , le gouvernement envoie des renforts

«
Plusieurs éléments se superposent
», à Mayotte, a expliqué mercredi la ministre des Outre-mer George Pau-Langevin : «
un mouvement social de revendications lancé par les organisations syndicales
», et «
à côté, les comportements de certains jeunes à la dérive, qui ne sont pas encadrés et n’ont pas de perspectives
».

Une grève générale a été lancée le 30 mars pour réclamer «
l’égalité réelle
», c’est-à-dire l’alignement de Mayotte, devenue 101e département français en 2011, sur la métropole, en matière de Code du travail, de prestations sociales, de salaires ou de services publics. Un rapport de la Cour des comptes a pointé en janvier les retards de l’île dans la mise en place du droit commun.

Se greffant sur ce mouvement social, des groupes de jeunes cagoulés ont commencé le week-end dernier à caillasser chaque nuit voitures et habitations, la préfecture évoquant des affrontements entre « bandes rivales ». Mercredi, trois personnes interpellées la veille lors des affrontements ont été jugées en comparution immédiate par le tribunal correctionnel de Mayotte et condamnée à des peines allant de 1 à 8 mois d’emprisonnement. Elles ont toutes été placées sous mandat de dépôt, a annoncé le parquet dans un communiqué.

Après une nouvelle explosion de violences dans la nuit de lundi à mardi, la préfecture avait renforcé mardi soir le dispositif de sécurité dans certains quartiers de Mamoudzou, ce qui a permis selon elle de contenir les violences, même si des véhicules ont encore été dégradés.

Le ministère de l’Intérieur va envoyer des renforts dans l’île, a annoncé mercredi Mme Pau-Langevin, après une rencontre avec Bernard Cazeneuve. En 2015 et 2016 les effectifs de sécurité auront augmenté à Mayotte de 135 personnes, a-t-elle précisé.

La veille, des habitants excédés s’étaient rassemblés sur la place centrale de Mamoudzou pour dénoncer les violences. Et dans le quartier de Doujani, d’autres ont « exposé » leurs voitures caillassées.

Mercredi après-midi, le calme régnait sur Mayotte, paralysée par des barrages routiers installés au nord, au sud et au centre de l’île à l’appel des syndicats. Les écoles étaient vides, les rues quasi désertes, et l’activité tournait au ralenti. Pour la ministre des Outre-mer, il faut traiter « parallèlement » les revendications syndicales et les violences urbaines.

« Besoins incommensurables »

Concernant les jeunes, qui représentent la moitié des 220.000 habitants, elle souhaite «
renforcer la prise en charge de la protection de la jeunesse
» car «
pour l’instant ce sont des services un peu embryonnaires
».

Selon Rivomalala Rakotondravelo, syndicaliste SNUIPP, les violences sont liées au manque d’encadrement. «
Un élève en école élémentaire en métropole représente 7.400 euros (d’investissement par l’État, ndlr). À Mayotte, on est à 4.300 euros. Voilà l’injustice.
»

La ministre a rappelé que 217 classes ont été construites en 2015 à Mayotte, «
mais les besoins sont incommensurables. Beaucoup d’enfants n’ont pas une situation satisfaisante
», a-t-elle reconnu.

Elle a aussi souligné la forte immigration en partie illégale de populations comoriennes vers Mayotte, ce qui « accroît le sentiment des Mahorais d’être évincés des infrastructures créées pour eux » et nécessite « une politique de coopération » avec Anjouan.

Quant aux revendications de rattrapage social, «
on a besoin d’inventer des règles
». Par exemple, «
il faut voir comment faire pour que des personnes aient une retraite satisfaisante alors qu’elles n’ont pas cotisé
», ou comment augmenter les salaires dans l’administration et les collectivités territoriales «
alors que les collectivités sont exsangues
».

De plus, alors que l’objectif était d’adapter le Code du travail à Mayotte d’ici 2018, «
aujourd’hui, cette démarche est percutée par la loi El Khomri
», dit-elle.

Vendredi, les syndicats mahorais rencontreront à Paris les directeurs de cabinet des ministères concernés.

Mme Pau-Langevin dit comprendre l’impatience des Mahorais, «
mais c’est souvent un défi de trouver des réponses adaptées et conformes au droit
», car «
on ne peut pas mettre que des réponses d’exception
».

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