Un nouvel accident affaiblit le modèle SpaceX d’Elon Musk

Un nouvel accident affaiblit le modèle SpaceX d'Elon Musk

Le Monde
| 02.09.2016 à 10h39
Mis à jour le
02.09.2016 à 12h25
|

Par Dominique Gallois

Accident industriel pour SpaceX dans sa course aux étoiles. En quinze mois, deux de ses fusées Falcon-9 ont explosé : la première en juin 2015, alors qu’elle se dirigeait vers la Station spatiale internationale pour la ravitailler, la seconde, jeudi 1er septembre, lors d’essais sur son pas de tir. Ces déboires déstabilisent le modèle conçu par Elon Musk pour s’imposer rapidement sur le marché des lanceurs en cassant les prix face à Ariane et au russe Proton. L’accident du 1er septembre provoque aussi des dégâts collatéraux chez ses clients que sont l’opérateur de satellite israélien Satcom et le français Eutelsat associé à Facebook.

Car ce n’est pas simplement une fusée neuve qui a été détruite, mais aussi le satellite de télécommunication Amos-6, de Satcom. Habituellement, les derniers tests sur le pas de tir se font avec le seul lanceur pour éviter tous dégâts en cas d’incidents. Cette fois, la charge utile avait déjà été installée, elle a été soufflée par la déflagration et 200 millions de dollars (178 millions d’euros) sont partis en fumée. Au-delà du satellite, c’est l’avenir de Satcom qui est remis en cause : la société devait être reprise par un fonds chinois, qui avait conditionné son acquisition’ à la réussite du lancement d’Amos-6.

Lire aussi :
 

L’Europe ne suivra pas Space X dans le cosmos’ pour l’instant

Les défis à relever

L’explosion affecte aussi les utilisateurs. Dans ce satellite destiné à couvrir l’Afrique subsaharienne, Eutelsat, en partenariat avec Facebook, avait loué un réseau pour diffuser des services haut débit à partir du début de 2017. Dans un communiqué, Eutelsat estime à environ 5 millions d’euros l’effet de cet accident sur son chiffre d’affaires pour l’exercice 2016-2017. Il ira croissant, passant de 15 millions d’euros pour l’exercice suivant à 25 à 30 millions pour la période 2018-2019. Sur sa page Facebook, Mark Zuckerberg, le patron fondateur du réseau social, a réagi :

« Alors que je suis ici en Afrique, je suis très déçu d’apprendre que le lancement raté de SpaceX a détruit notre satellite, qui aurait pu offrir une connexion à tant d’entrepreneurs et à tout le monde à travers le continent. »

Pour SpaceX, les défis à relever sont multiples. En termes d’image, il faut remonter à 1959 pour trouver une fusée américaine explosant sur son pas de tir. « La perte de Falcon est intervenue durant les opérations de remplissage des réservoirs, a tweeté Elon Musk, le 1er septembre. L’origine [de l’explosion] se situe autour du réservoir d’oxygène de l’étage supérieur. Cause pour le moment inconnue. »

Garder la confiance des clients

Nul doute que les raisons de l’accident seront trouvées et corrigées, mais le patron de SpaceX devra faire plus s’il veut garder la confiance de ses clients. Dans l’immédiat, certains d’entre eux vont devoir trouver d’autres lanceurs pour mettre en orbite leur satellite. Ariane 5 n’a pas de créneau disponible avant 2018, Proton a connu des difficultés et décalé des tirs, et l’Américain Atlas, tout comme le japonais MHI, sont plus chers.

Les premières interrogations sur la fiabilité des lanceurs de SpaceX sont apparues après l’explosion en vol de 2015. Elles concernaient les risques de défaillances liés au rythme soutenu d’innovation et de production. Elon Musk reconnaissait que son entreprise était peut-être devenue « un peu trop confiante ». Les doutes s’estompaient progressivement après la reprise des vols en décembre de la même année et les neuf lancements consécutifs réussis depuis.

Le patron de SpaceX impressionnait par sa nouvelle audace, SpaceX parvenant à ramener, sur une barge en pleine mer, le premier étage de la fusée haut de 70 mètres, pour la réutiliser. Une manière de réduire un peu plus les prix de lancement face à Ariane et Proton.

Lire aussi :
 

Le 1er étage d’une fusée de SpaceX se pose sur une barge en mer

Un pas supplémentaire venait d’être franchi, ce mardi 30 août, avec la signature d’un contrat avec l’opérateur de satellites luxembourgeois SES. Le leader mondial du secteur accepte de mettre un satellite dans sa première fusée réutilisable, dont le lancement était prévu à la fin de l’année.

Cette explosion devrait stopper momentanément ces projets de fusée low-cost et a contrario conforter les lanceurs traditionnels, principalement Ariane. Mais Elon Musk ne devrait pas pour autant renoncer, le milliardaire californien a toujours pour projet d’aller sur Mars.

Lire aussi :
 

Spatial’: les Européens prêts à affronter SpaceX

Leave A Reply