Robots au travail , 3 millions d’emplois menacés en France d’ici 2025 (VIDÉOS)

Robots au travail , 3 millions d'emplois menacés en France d'ici 2025 (VIDÉOS)

Fin mars, en Allemagne, quatre camions en file indienne sur l’autoroute roulent en pilotage automatique, reliés par Wi-Fi, à une distance toujours respectée de 15 m. Leurs chauffeurs ont lâché le volant. Ils ne sont présents qu’en cas d’urgence.

Moins d’un mois plus tard, un challenge oppose cette fois six constructeurs européens. Six convois de douze camions sur des routes d’Allemagne, de Belgique et de Suède, jusqu’aux Pays-Bas. Aux États-Unis, quatre États autorisent déjà la circulation de ces poids lourds autonomes, en phase de tests. Leur mise en service devrait être effective d’ici une dizaine d’années. Avant ou après la voiture autonome

PHOTO DAIMLER AG / GLOBAL COMMUNICATIONS COMMERCIAL VEHICLES

Robot nettoyeur, agent d’accueil, cuisinier, serveur…

En France, depuis mars, gare de Lyon, à Paris, la SNCF a mis en service un robot-nettoyeur. Plus personne ne le guide, il s’arrête automatiquement s’il y a un obstacle ou une personne sur son chemin.

Pendant trois mois, l’entreprise a également expérimenté un autre robot, Pepper, pour accueillir les voyageurs de trois gares de la région Pays de la Loire. Pepper parle plusieurs langues, renseigne les voyageurs sur les horaires et vous amuse le temps de patienter au guichet.

Et la liste d’exemples d’un monde en voie de robotisation n’en finit pas de s’allonger : aux États-Unis, 140 hôpitaux sont équipés de robots pour servir les repas aux malades.

Au Japon et en Chine, ils remplacent des cuisiniers et des serveurs.

Amazon et Google travaillent inlassablement à la livraison par drone.

Airbus a lancé son programme de recherche de robots humanoïdes dédiés à ses lignes de production aéronautique, ils sont attendus pour dans une dizaine d’années.

Une start-up américaine a présenté Tally : un robot capable, dans les supermarchés, de faire l’inventaire, identifier les produits mal placés et répertorier les ruptures de stock, le tout en un temps record.

42 % des métiers touchés d’ici 20 ans en France

Selon les études parues, cette vague de robotisation toucherait 35 % des métiers, d’ici vingt ans, au Royaume-Uni ; 42 % en France
; jusqu’à 47 % aux États-Unis.

Le phénomène n’est pas inédit : chaque siècle apporte son lot d’innovations, condamnant des métiers, en créant d’autres. L’économiste autrichien Joseph Schumpeter déjà au siècle dernier appelait cela la «
destruction créatrice
».

Montée en puissance des intelligences artificielles

Mais le mouvement actuel est sans commune mesure car l’automatisation s’accompagne d’une montée en puissance des intelligences artificielles. Les robots nouvelles générations sont capables d’accomplir des tâches toujours plus complexes, intellectuelles désormais, et sont de moins en moins chers. Leur coût a été divisé par deux entre 1990 et 2005, il l’a été d’autant entre 2005 et 2010. Le mouvement ne peut être qu’exponentiel.

De nouveaux emplois

Mais cette «
robolution
» offre aussi de nouveaux emplois et des perspectives de relocalisations de certaines activités économiques. Des chercheurs estiment que 60 % des métiers de demain n’ont pas encore été inventés. Problème : ces emplois ne se substitueront jamais, en nombre, aux emplois détruits, ni en termes de compétences ni de répartition géographique. Ainsi l’écart entre les plus riches et les plus pauvres ne ferait que s’accentuer.

Surtout, cette «
robolution » pose la question du monde que nous voulons demain : toujours plus de robots et moins d’humains Nous sommes à la croisée des logiciels.

Attention métiers en danger

Très fortement touché : la logistique. En Allemagne, la Deutsche Post (groupe DHL, leader mondial des services postaux) s’équipe de robots humanoïdes, capables de manipuler indifféremment toutes tailles de paquets. Une nouvelle étude du cabinet Roland-Berger estimait, à l’automne dernier, qu’1,5 million des emplois logistique en Europe seraient remplacés par des robots dans les dix prochaines années.

Dans la banque. Au Japon, certaines banques commencent à utiliser des robots pour conseiller leurs clients. Les conseillers financiers, courtiers en ligne sont remplacés par des logiciels capables de conseils personnalisés, de gérer des portefeuilles, comparer les offres plus vite que des conseillers de chair et d’os. Également concerné : le métier de comptable.

À Hong Kong, un fonds de pension a nommé un algorithme au sein de son conseil d’administration. et donne son avis sur les décisions d’investissements.

Dans la restauration . Des robots cuisinent, servent, nettoient déjà dans des restaurants au Japon où en Chine. Ils sont capables de façonner des hamburgers du grill au plateau. Mais en Chine, après quelques couacs, certains restaurants ont finalement fait robot arrière, jusqu’à quand

Dans les métiers de l’information. Des logiciels commencent à remplacer des journalistes financiers ou sportifs. Aux dernières élections, des médias français ont eu recours à des logiciels de traitement et d’analyse des résultats.

Menacés aussi les métiers d’archiviste, de bibliothécaire ou de marketing, avec l’automatisation de production de contenus promotionnels.

Mais aussi.
Les démarcheurs téléphoniques, les professions juridiques, les chauffeurs de taxi et livreurs, les traducteurs ; sur les terrains de sport, les arbitres.

(lire aussi notre page du 12 mai sur le chatbot)

Moins impacté.
Le métier de médecin. Si l’ordinateur Watson d’IBM établit des diagnostics (fiables à plus de 90 % pour la détection du cancer du poumon), il détruira moins le métier de médecin qu’il ne le transformera. En revanche, il impactera le personnel hospitalier, de laboratoires.

«La France ne peut se permettre de passer à côté de cette révolution»

Trois millions d’emplois menacés en France d’ici à 2025, est-ce d’une ampleur inédite

« C’est beaucoup mais, par rapport à notre histoire passée, pas autant que cela. La destruction des emplois industriels entre 1980 et 2012 a été à peu près de même ampleur et était déjà en grande partie due à l’automatisation et non à des délocalisations (lire ci-dessus). Cette nouvelle vague d’automatisation et de digitalisation pose un autre problème : la perte des métiers agricoles a été en partie compensée par la révolution industrielle et la destruction de métiers industriels par la création de métiers de service. Aujourd’hui, on ne voit pas très bien encore quels métiers, à bas niveau de qualification, peuvent les remplacer. Un problème qui ne se pose pas au Canada ou à l’Allemagne, deux pays qui n’ont pas la natalité de la France. »

Comment la France peut-elle réagir

« Les Français ne sont pas très flexibles, pour changer de métier ou de région, la France est un pays de propriétaires. Il y aurait deux choses à faire mais elles impliquent des réformes très lourdes.

La première : faire évoluer la formation professionnelle. La France ne sait pas former tout au long de la vie, contrairement aux pays scandinaves.

La seconde : la France devrait lancer des dynamiques d’emplois différents plutôt que de prioriser l’existant. Le débat bloque sur le chômage de masse or l’innovation crée peu d’emplois et des emplois très qualifiés. Pourtant, des emplois qualifiés, c’est du pouvoir d’achat et des emplois indirects. Et une plus grande productivité n’est pas seulement destructrice d’emploi, elle crée de la richesse et a un impact net sur les entreprises qui, en augmentant leurs marges, paient plus d’impôts et peuvent alors avoir une politique de baisse des prix de leurs produits. Par ailleurs, la disparition de métiers à tâches répétitives n’est peut-être pas un mal, à condition qu’on propose autre chose.

La France a des grosses entreprises de services, la digitalisation aura un impact très fort sur l’activité des banques et des assurances par exemple, elle ne peut pas se permettre de passer à côté de cette nouvelle révolution, ce qui risque de se passer à force de soutenir des industries déclinantes au détriment de nouveaux secteurs industriels. »

Trois millions d’emplois en France susceptibles d’être détruits

Le cabinet Roland-Berger a transposé à la France l’étude menée par l’université d’Oxford et le cabinet Deloitte, laquelle concluait déjà que 35 % des métiers au Royaume-Uni, 47 % aux États-Unis avaient une forte probabilité d’être automatisés dans les vingt prochaines années.

En France, ce pourcentage se situerait dans la moyenne : 42 %. Trois millions d’emplois pourraient être détruits d’ici à 2025.

Les précédentes vagues d’automatisation (et de gain de productivité) ont déjà touché les emplois industriels les moins qualifiés. Entre 1980 et 2012, elle a représenté 64 % des réductions d’emplois industriels (1,4 million), loin devant les délocalisations et la concurrence internationale.

Elle se poursuit aujourd’hui avec ce caractère nouveau, elle touche des emplois plus qualifiés, à fort contenu intellectuel. Désormais, sont aussi touchés des professions et métiers d’encadrement intermédiaires, fonctions administratives, de services’ Une évolution défavorable aux classes moyennes, aussi fragilisées désormais que les bas salaires.

Les métiers les plus préservés sont ceux de la création, artistiques, ou avec un fort capital humain (psys, métiers sociaux, enseignants).

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