Plus de 160 pays ont rendez-vous à New York pour signer l’accord de la COP21

Plus de 160 pays ont rendez-vous à New York pour signer l'accord de la COP21

Le Monde
| 21.04.2016 à 19h27
Mis à jour le
21.04.2016 à 20h13
|

Par Simon Roger

New York, envoyé spécial

C’est le premier grand rendez-vous de l’après-COP21, la Conférence des parties, à la mi-décembre 2015, à Paris, qui s’est close sur un engagement de la communauté internationale à lutter contre le réchauffement climatique. Une date cochée depuis plusieurs semaines dans l’agenda de François Hollande et de la ministre de l’environnement, Ségolène Royal, qui, au nom de la France, pilote la COP21 jusqu’en novembre. Le chef de l’Etat sera vendredi 22 avril au siège de l’ONU, à New York, pour y orchestrer la cérémonie de signature de l’accord de Paris.

A partir de 8 h 30 (14 h 30 heure de Paris), il coprésidera cette séance protocolaire dont les Nations unies sont si coutumières au côté du secrétaire général, Ban Ki-moon, et de la secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC, autrement dit, l’instance de négociations multilatérales sur le climat), Christiana Figueres.

François Hollande y retrouvera d’autres protagonistes présents eux aussi sur la photo qui les a immortalisés le 12 décembre, la négociatrice en chef de la France, Laurence Tubiana, et l’ex-ministre des affaires étrangères Laurent Fabius. Aujourd’hui à la tête du Conseil constitutionnel, ce dernier a bien failli rater ce rendez-vous new-yorkais, faute d’y avoir été convié.

Fabius invité de dernière minute

« Cette réunion sera une occasion de relancer l’effort. C’est le président de la République, Ban Ki-moon et moi-même qui en sommes à l’initiative », rappelait récemment, dans un entretien au Monde, Laurent Fabius. « J’y participerais avec plaisir, mais je n’ai pas encore reçu d’invitation de la présidence française. Cela doit être dû au courrier » ironisait-il alors. Si l’ex-locataire du Quai d’Orsay n’est plus aux manettes de la COP21, confiées lors du remaniement ministériel à Ségolène Royal, il continue d’entretenir des rapports étroits avec nombre de dirigeants étrangers. Une situation qui pourrait compliquer la tâche de la nouvelle présidente de la COP21.

Son nom ne figure pas sur la liste initiale de la délégation remise à la presse, qui comprend, au titre des « personnalités », les anciens ministres Jean-Louis Borloo et Corine Lepage et l’ancien envoyé spécial du président de la République pour la préservation de la planète, Nicolas Hulot. Mais le chef de l’Etat a pris son téléphone le 20 avril pour s’en expliquer. « Il y a eu un problème, je ne sais pas ce qui s’est passé », aurait dit François Hollande à Laurent Fabius, finalement intégré à la délégation en partance pour New York !

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Le président de la conférence de Paris en décembre 2015 pourra donc assister aux prises de parole prévues le 22 avril, qui comprendront notamment la Chine, les Etats-Unis, le Canada, la Russie, le Maroc, pays hôte de la COP22 en novembre, à Marrakech et, parmi les pays les plus vulnérables au changement climatique, Tuvalu. Quelques acteurs de la société civile seront invités à s’exprimer aussi et, pour conclure ce « show » onusien, l’Oscar du meilleur acteur et défenseur de l’environnement Leonardo DiCaprio. Plus de cent soixante pays (sur les cent quatre-vingt-quinze que compte la CCNUCC) seront représentés, dont une soixantaine de chefs d’Etat ou de gouvernement, assure l’équipe française de la COP21. « La question de l’urgence climatique continue à imprégner les décideurs, c’est un très bon signe », estime Ségolène Royal, sur place depuis lundi.

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New York, la tête dans les primaires

Jeudi 21 avril, New York se prépare sereinement à cette cérémonie de retrouvailles sur le climat. Cordons de sécurité et forces de police imposent leur présence autour du quartier général de l’ONU, bordant l’Hudson. Au lendemain de la victoire du candidat républicain Donald Trump et de la figure démocrate Hillary Clinton dans les primaires de l’Etat de New York, la métropole de la côte est se concentre davantage sur les enseignements du scrutin que sur les enjeux de la cérémonie du 22 avril.

Au siège des Nations unies, le climat est un dossier parmi d’autres. La diplomatie fait en ce moment le bilan des politiques mondiales sur les drogues et suit l’évolution de la situation de la guerre en Syrie. Barack Obama, absent le 22 avril en raison d’une tournée dans le Golfe, sera représenté par son secrétaire d’Etat, John Kerry. La Chine, premier pays émetteur de gaz à effet de serre, devant les Etats-Unis, ne dépêchera pas non plus le président Xi Jinping à New York, mais son vice-premier ministre, Zhang Gaoli. Pour autant, ces deux pays, qui multiplient les déclarations conjointes en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique, ont promis de parapher le registre de signature, ouvert pour un an à compter du 22 avril, dès ce vendredi. Ils se sont engagés par ailleurs à ratifier l’accord au plus vite.

Car l’adoption du texte à Paris, qui a mis fin à vingt ans de négociations laborieuses, « ne veut pas dire que les parties adhèrent automatiquement à l’accord », souligne Eliza Northrop, du World Resources Institute. Au geste politique que représente la signature doit succéder une démarche juridique, celle de la ratification. L’accord n’entrera en vigueur qu’une fois ratifié par cinquante-cinq pays représentant 55 % des émissions de gaz à effet de serre.

« Le temps presse »

Compte tenu des procédures propres à chaque pays, ce seuil ne devrait pas être atteint avant 2017, voire 2018. L’Union européenne devra par exemple attendre que l’ensemble de ses vingt-huit Etats membres ratifient le texte pour déposer ses instruments de ratification, un véritable casse-tête entre des pays qui souhaitent accélérer la transition énergétique (Allemagne et pays scandinaves) et d’autres Etats qui rechignent à se détourner des énergies fossiles (Pologne en tête). La France promet d’aller vite, avançant une date de ratification devant le Parlement le 17 mai.

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Le temps presse, rappelle la négociatrice Laurence Tubiana : « Nous sommes loin de l’objectif d’une hausse limitée à 2 °C », et pour garder une chance de le respecter, « les actions avant 2020 [la date d’entrée en vigueur indiquée dans l’accord de Paris] sont très importantes ». Interrogé le 21 avril par Le Parisien, Nicolas Hulot met en garde contre l’erreur consistant à résumer la lutte contre le réchauffement à des politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre. L’aide aux pays les plus vulnérables doit constituer selon lui une priorité d’action. « Il faut aider financièrement les pays du Sud à restaurer leurs écosystèmes, insiste Nicolas Hulot. Réhabiliter des millions d’hectares de terre en Afrique permettrait d’y fixer les populations, d’éviter l’exode massif de migrants et d’offrir des ressources agricoles au 1,5 milliard d’habitants supplémentaires qui sont attendus sur ce continent dans les cinquante prochaines années. »

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Attention à ne pas créer « un décalage trop important entre le temps du discours international et celui des décisions politiques concrètes », prévient Sylvain Angerand, des Amis de la Terre. Consciente de ce risque, la présidence française promet des annonces précises, le 22 avril, à l’issue de la cérémonie de signature. De nouveaux engagements pourraient être pris dans le cadre de l’Alliance solaire internationale, afin d’augmenter la part du solaire dans le mix énergétique des pays du Sud. Chefs d’Etat et entreprises pourraient aussi faire un pas de plus, vendredi, vers une tarification du prix du carbone. La rencontre de New York sera « un point d’étape sur les nombreux engagements pris » à Paris assure la lettre d’invitation envoyée le 7 mars par François Hollande, Ban Ki-moon et Ségolène Royal, à tous les chefs d’Etat de la planète.

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