Natascha Kampusch prisonnière de son histoire

Natascha Kampusch prisonnière de son histoire

Enlevée à l’âge de 10 ans, elle avait raconté dans un livre ses huit années de séquestration. L’Autrichienne de 28 ans relate dans un nouvel ouvrage son difficile retour à la vie normale.

Lorsque Natascha Kampusch sort un livre, c’est toujours un événement. Même dix ans après. La jeune victime d’enlèvement et de séquestration est de nouveau sous le feu des médias en Autriche et en Allemagne, depuis la parution, cet été, de son second ouvrage, qui revient sur ses 3 652 jours de liberté. La traduction française sortira le 28 septembre (10 ans de liberté, éd. JC. Lattès).

Le premier tome de ses écrits (3 096 jours, Livre de poche), sorti en 2010 et qui a rencontré un grand succès, racontait ses huit ans et demi de réclusion dans la cave de son ravisseur, Wolfgang Priklopil. Cet adulateur d’Hitler l’a traitée comme si elle vivait dans un camp de concentration. Enlevée sur le chemin de l’école à l’âge de 10 ans, elle s’était sauvée seule, le 23 août 2006.

Bulle protectrice

En Autriche, le temps a passé, mais la curiosité est toujours vive. Le documentaire diffusé à une heure de grande écoute par la télévision publique le jour de la sortie du livre a été très suivi. On y voit Natascha, 28 ans aujourd’hui, dans la bulle protectrice qu’elle s’est construite, faisant du cheval, fabriquant des bijoux fantaisie ou discutant avec ses amis de l’école, ceux d’avant que sa vie bascule. Un petit cercle soigneusement choisi qui semble bouleversé de pouvoir aujourd’hui offrir un peu de joie et de réconfort à une personnalité qui continuera longtemps de fasciner.

Une bonne centaine d’admirateurs de la jeune fille sont venus la féliciter pour son courage dans la librairie viennoise où elle a donné une lecture publique. Il y a ceux qui l’aiment donc. Et ceux qui la détestent.

Car Natascha Kampusch divise son pays. Elle affirme avoir cessé de sortir de son domicile au bout de quelques années, ne supportant plus le regard des gens sur elle. « Rien ne semble plus débrider les fantasmes que la maltraitance sexuelle », commente-t-elle. Lettres anonymes sordides, insultes dans la rue : son quotidien ressemble parfois à une litanie de nouvelles brimades.

Victime de rumeurs malsaines

Elle l’admet : des passants lui reprochent parfois de gagner de l’argent en racontant sa vie. La jeune fille en convient. Mais elle explique ne pas avoir reçu de dédommagement de la part de l’Etat pour ses années volées. N’ayant pu être scolarisée, elle n’a pas jusqu’à présent trouvé le courage de reprendre des études. Elle veut s’accorder du temps. Surtout, elle souhaite raconter elle-même son histoire et ne pas laisser les autres le faire à sa place. D’autant plus qu’on lui oppose encore souvent les nombreuses théories du complot qui pullulent autour de son enlèvement. Certains croient toujours qu’elle a eu un enfant en captivité et lui demandent ce qu’il est devenu. Ou, persuadés que son ravisseur avait des complices, pourquoi elle les protège.

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Pourtant, après avoir rouvert deux fois le dossier, la justice autrichienne a classé l’affaire et ses 270 000 pages depuis 2013. Le FBI et la police criminelle allemande, appelés en renfort, ont écarté toutes ces affabulations. Natascha n’a pas eu de bébé. Son kidnappeur a agi seul. Mais rien n’y fait. En avril, des pseudo-experts ont relancé la thèse selon laquelle le bourreau ne se serait pas suicidé, mais aurait été assassiné. Une énième spéculation, pour une affaire hors norme.

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