Marisol Touraine ,  Nous simplifions et sécurisons les règles des essais cliniques 

Marisol Touraine ,  Nous simplifions et sécurisons les règles des essais cliniques 

La ministre de la santé détaille les dispositions désormais en vigueur pour réaliser les tests sur les nouveaux médicaments.

Que vont changer les nouvelles règles concernant les essais cliniques ‘

Je veux mettre l’innovation au service du progrès social pour faire en sorte que les patients soient toujours mieux soignés. Ce qui s’est passé à Rennes ne peut se traduire par un renoncement à la recherche. Afin de soutenir l’innovation en France, nous simplifions et sécurisons les règles des essais cliniques. C’est l’objet des deux décrets publiés jeudi.

Les durées de mise sur pied des essais entre les laboratoires propriétaires d’une molécule et les centres de recherche ou les hôpitaux réalisant les tests sont trop longues, et les règles trop contraignantes.

J’ai instauré en 2014 la possibilité d’une convention unique qui évite aux laboratoires de perdre du temps à élaborer des conventions différentes d’un établissement à l’autre. Si la durée moyenne est ainsi passée de 120 à 55 jours, cela peut encore prendre parfois plus d’un an. A partir d’aujourd’hui, la convention devient obligatoire pour tous les établissements et doit être conclue en moins de soixante jours. Cette convention se fera en outre sur la base d’un modèle unique.

Dans les faits, en raison d’une absence de pression et de la redondance des procédures, les délais s’accumulaient, au prétexte parfois de la sécurité.

Simplifier et raccourcir les délais, n’est-ce pas justement accroître les risques ‘

Parallèlement à la simplification, il faut renforcer la sécurité des volontaires qui participent aux essais cliniques. Je m’y étais engagée avant même l’accident de Rennes. Plusieurs mesures ont été prises.

Un deuxième décret publié aujourd’hui assure l’indépendance des Comités de protection des personnes, chargés d’émettre un avis préalable sur les aspects éthiques de ces recherches sur des volontaires. Jusque-là le comité de la région était saisi systématiquement : désormais, la désignation se fera par un tirage au sort au niveau national. Cela devrait permettre de réinstaurer la distance critique nécessaire, là où des relations privilégiées ont pu s’installer au fil du temps dans certaines régions avec les promoteurs.

Des articles ont mis en cause l’autorisation de l’essai de Rennes par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANS), l’accusant aussi d’avoir édulcoré sa responsabilité. Y a-t-il eu des manquements de l’ANSM ‘

L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), que j’ai missionnée après le drame, a pointé des failles du côté de l’industriel Bial, du centre de recherche Biotrial, mais pas de manquements du côté de l’ANSM, seulement des besoins de réorganisation.

Des médias ont fait état de ce que la direction de l’ANSM aurait transmis une version modifiée des conclusions de ses experts. J’ai demandé à l’IGAS si le contenu de ces articles remettait en cause les conclusions de son rapport. Elle m’a dit que non. Je ne dispose donc d’aucun élément qui mette en cause l’ANSM. La procédure judiciaire engagée sera amenée à se prononcer le cas échéant sur les responsabilités des uns et des autres.

La consommation d’antibiotiques serait repartie à la hausse. La campagne « les antibiotiques, c’est pas automatique » n’a-t-elle pas eu assez d’effet ‘

Après la chute du début des années 2000, la consommation a recommencé à augmenter. Notre objectif est de la faire baisser de 25 % d’ici à 2018. Nous devons mobiliser tous les acteurs, car la résistance aux antibiotiques est à l’origine de 12 000 à 13 000 morts par an. Nous voulons passer sous la barre des 10 000 décès par an d’ici à 2020.

Aucune campagne, aussi excellente soit-elle, n’est éternelle. Une nouvelle sera lancée en 2017. Il va falloir inventer un autre slogan. Des messages seront inscrits sur les boîtes, pour éviter l’utilisation abusive des médicaments stockés dans les armoires à pharmacie chez certains patients.

Il y aura aussi un encadrement des prescriptions : une première prescription ne pourra être faite pour une durée supérieure à sept jours, alors qu’en moyenne elles sont aujourd’hui de dix jours en médecine de ville. Et nous allons renforcer le dépistage par tests rapides sur l’origine virale ou bactérienne des angines.

Enfin, nous allons consacrer 330 millions d’euros sur cinq ans à la recherche.

La France peut-elle se permettre l’accès de tous aux médicaments coûteux contre l’hépatite C ou les immunothérapies contre le cancer ‘

Chaque malade doit pouvoir bénéficier des mêmes chances. C’est pourquoi j’ai annoncé l’accès universel aux traitements contre l’hépatite C. La Haute Autorité de santé rendra prochainement ses conclusions sur le sujet.

Le coût des traitements est un enjeu majeur. Je souhaite garantir aux Français que demain comme aujourd’hui, ils pourront accéder à des médicaments innovants, sans rationnement, et sans file d’attente, contrairement à ce qui se pratique ailleurs.

Depuis quatre ans, je mène une politique de réduction du prix des médicaments qui ne sont plus innovants, et je l’assume. Nous ne pourrons financer les nouveaux traitements contre le cancer si nous ne baissons pas certains prix et ne prescrivons pas de génériques. C’est du bon sens.

C’est aussi du bon sens que de payer un prix juste et responsable. Un médicament qui soigne mais que personne ne peut acheter ne sert à rien. Avec le président de la République, je porte cette question au niveau international.

Mais quand je vois que tous les candidats à la primaire de la droite annoncent des déremboursements massifs et qu’au Parlement la droite a systématiquement voté contre les dispositifs de régulation des coûts que j’ai proposés, je me demande où l’on va.

Votre décision de ne pas dérembourser les médicaments anti-Alzheimer, jugés inefficaces par la Haute Autorité de santé, a été critiquée. Certains, comme Irène Frachon qui avait dénoncé le scandale du Mediator, y ont vu le poids du lobby pharmaceutique’

C’est absurde ! Jamais un médicament n’a été déremboursé du jour au lendemain. Le faire plongerait les patients et leur famille dans le désarroi, alors que la qualité de la prise en charge est très variable d’un lieu à l’autre.

C’est un sujet médical et humain. Je ne serai pas la ministre qui prendra une décision pour des raisons économiques. Aucun pays n’a déremboursé. Si la France décidait de le faire, elle serait la première. Ma décision est transitoire et doit permettre de faire évoluer en douceur notre système de prise en charge. J’ai demandé au professeur Michel Clanet de me faire une proposition en ce sens avant fin janvier.

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