L’ex-président brésilien Lula poursuivi pour corruption et blanchiment d’argent

L'ex-président brésilien Lula poursuivi pour corruption et blanchiment d'argent
L’ancien président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva lors d’une conférence de presse, le 28 mars.
Crédits : Paulo Whitaker / Reuters / REUTERS

Au deuxième jour du procès en destitution de la présidente du Brésil Dilma Rousseff, l’étau se resserre autour de son son mentor politique Luiz Inacio Lula da Silva. L’ancien chef de l’Etat a été inculpé vendredi 26 août de corruption passive et blanchiment d’argent dans le cadre du scandale Petrobras.

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Son épouse, Marisa Leticia Lula, et trois autres personnes, ont également été mises en examen dans ce dossier, qui concerne l’achat présumé d’un appartement et d’une maison de campagne, avec la collaboration de la société OAS, impliquée dans le réseau de corruption autour du géant pétrolier. Selon la police, le couple a « bénéficié d’avantages illicites de la part de l’entreprise de BTP, pour un montant de 2,4 millions de réais [656 millions d’euros environ] ».

Dénonçant une inculpation « politique », les avocats de Lula estimé que ce n’était pas une « coïncidence » que celle-ci survienne « en plein procès de destitution de la présidente, élue avec le soutien de [leur client] ». A leurs yeux, le rapport du commissaire Anselmo est une « pure fiction » et ces biens immobiliers ne sont pas la propriété de l’ancien président, mais de l’OAS : « M. Anselmo a un passif d’offenses à Lula sur les réseaux sociaux et a déjà exprimé publiquement sa sympathie pour le camp politique opposé à celui de l’ex-président. »

Lula, âgé de 70 ans et président de 2003 à 2010, fait l’objet de trois enquêtes au sein du scandale Petrobras. Une affaire qui a coûté plus de 2 milliards de dollars à la compagnie phare du pays et a bénéficié à des dizaines d’hommes politiques de divers partis, à des entrepreneurs du BTP et à des directeurs de Petrobras.

L’ancien président avait déjà été mis en examen le 29 juillet pour tentative d’entrave à la justice. C’était la première fois que l’icône de la gauche brésilienne se voyait appelé à répondre devant un tribunal dans le cadre de cette affaire. S’il était condamné, il ne pourrait plus aspirer à se présenter à un troisième mandat en 2018.

Débats tendus au Sénat

Vendredi, au Sénat, la deuxième session du procès de Dilma Rousseff s’est déroulée dans une ambiance électrique, avec un échange d’insultes entre les élus favorables et opposés à la présidente qui ont failli en venir aux mains. « Je vais user de mon pouvoir de police pour exiger le respect mutuel », a menacé le président du Tribunal suprême fédéral (STF) Ricardo Lewandowski qui dirige les débats, avant de suspendre la séance à la mi-journée. Dans l’après-midi, les sénateurs ont entendu deux des six témoins en faveur de la présidente de gauche.

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« Cette session est une démonstration du fait que la bêtise est infinie », a lancé le président du Sénat, Renan Calheiros (Parti du mouvement démocratique brésilien, centre droit), dénonçant un hémicycle transformé en « asile de fous ». Il visait tout particulièrement la sénatrice Gleisi Hoffmann du Parti des travailleurs (PT) de la présidente qui avait qualifié le procès de « farce ». La veille, elle avait déjà provoqué un tollé en demandant si, compte tenu de sa « morale », la chambre haute pouvait juger Mme Rousseff : plus de la moitié de ses membres (59 %), dont elle-même, étant soupçonnés de corruption ou visés par une enquête.

L’issue du procès, attendue mardi ou mercredi, ne fait guère de doute, une nette tendance se dégageant en faveur de la destitution, qui requiert un vote des deux tiers des sénateurs, soit 54 sur 81. Dilma Rousseff, 68 ans, première femme élue à la tête du Brésil, ex-membre de la guérilla emprisonnée et torturée sous la dictature militaire (1964-1985), n’assume déjà plus ses fonctions depuis le 12 mai, quand un vote de plus des deux tiers des élus de la chambre basse l’avait suspendue.

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Accusée d’avoir maquillé les comptes publics pour camoufler un déficit trop important et signé des décrets engageant des dépenses imprévues sans l’accord préalable du Parlement, pratique à laquelle ses prédécesseurs ont tous eu recours, la présidente se dit « innocente ». Elle se défendra en personne lundi. Selon les experts, elle s’adressera plus à la nation pour défendre son gouvernement et son image que pour convaincre les sénateurs. Lula l’accompagnera pour la soutenir, même si son image a été écornée par son inculpation dans le scandale Petrobras, qui éclabousse tout autant le PT que le PMDB du président par intérim Michel Temer et la majeure partie de l’élite politique brésilienne.

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