Les élus Verts européens accusent Malte d’être un paradis fiscal

Les élus Verts européens accusent Malte d'être un paradis fiscal

Dans un rapport, les parlementaires dénoncent les pratiques fiscales de l’archipel méditerranéen, qui prend la présidence de l’Union européenne pour six mois.

Le Monde
| 11.01.2017 à 09h00
Mis à jour le
11.01.2017 à 10h08
|

Par Cécile Ducourtieux (Bruxelles, bureau européen)

Les élus Verts du Parlement de Strasbourg n’ont pas fait les choses au hasard. Ils rendent public, mercredi 11 janvier, un rapport sur la fiscalité particulièrement attrayante de Malte, le jour où le plus petit Etat européen inaugure symboliquement sa présidence tournante de l’Union (elle durera jusqu’au 1er juillet 2017). Jean-Claude Juncker, le président de la Commission, devait lancer l’événement mercredi depuis la capitale, La Valette, en compagnie du premier ministre maltais, Joseph Muscat.

Dans ce rapport précis et pédagogique, les Verts décortiquent les facilités proposées notamment aux sociétés de trading installées dans l’île. Principal avantage offert : leurs profits sont certes taxés comme le veut la loi maltaise à hauteur de 35 %, mais quand leurs actionnaires (qu’ils soient ou non résidents) se voient verser des dividendes sur ces profits, ces derniers sont assortis d’un remboursement, par l’Etat maltais, à hauteur des 6/7es des impôts versés initialement. Le taux d’imposition effectif pour les bénéficiaires ultimes des sociétés tombe alors à’ 5 %.

Lire aussi :
 

Lutte contre l’évasion fiscale : l’Europe passe de la théorie à la pratique

Seulement 200 millions de recettes fiscales annuelles

Malte propose aussi un régime particulièrement conciliant pour la taxation de la propriété intellectuelle et à en croire les Verts ne fait pas sérieusement la chasse à la fraude fiscale. Le pays ne vérifierait pas systématiquement que les sociétés installées sur son territoire ne profitent pas d’incohérences de traitement fiscal qui aboutiraient à des doubles « non-taxations » (elles ne sont imposées ni à Malte ni dans le pays de leur maison mère).

Toutes ces facilités pour les multinationales représentent un important manque à gagner pour l’Etat maltais. A en croire le rapport, il n’a reçu que 200 millions d’euros de recettes fiscales par an à cause du remboursement fiscal pour les actionnaires des sociétés de trading. Sans cette disposition, il aurait dû percevoir entre 3,5 milliards et 4 milliards d’euros’

Lire aussi :
 

« Panama papers » : le gouvernement maltais surmonte une motion de censure

Ces pratiques sont si contestables, estiment les Verts, que Malte aurait des raisons de figurer sur la liste des paradis fiscaux que veut dresser Bruxelles d’ici à la fin de 2017. Problème : la Commission et le Conseil la réunion des pays membres ont exclu qu’un Etat de l’Union puisse y figurer’ Et, jusqu’à présent, à Bruxelles, une certaine tolérance a prévalu en ce qui concerne les petits Etats membres, pas gâtés par leur positionnement géographique ou leurs ressources propres, dont la fiscalité est souvent le seul moyen de rendre leur territoire attrayant (l’Irlande, les pays baltes’).

Accessible à toutes les sociétés sans discrimination

Malte n’est pas non plus dans le collimateur de la Commission, contrairement au Luxembourg, à la Belgique, à l’Irlande ou aux Pays-Bas, au sujet des rulings, ces accords préalables signés entre les fiscs et les multinationales. Et pour cause : les gros cadeaux fiscaux de l’archipel méditerranéen sont accessibles à toutes les sociétés sans discrimination. Or, la Commission ne peut condamner que les pays qui privilégient un acteur économique plutôt qu’un autre (dans le cas de figure des « aides d’Etat » illégales).

Lire aussi :
 

« LuxLeaks » : voyage au paradis des multinationales

Le pays va-t-il, pour autant, prendre le relais de la Commission comme il le devrait théoriquement, puisqu’il est chargé de la présidence de l’Union et soutenir politiquement son ambitieux agenda en matière de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales de la Commission ‘

Or, les Verts relèvent que Malte fait partie de ceux qui, en décembre 2016, ont man’uvré pour que la proposition de la Commission d’un état des lieux pays par pays des profits des entreprises ne puisse être entérinée qu’à l’unanimité des Etats membres (et plus à la majorité qualifiée), rendant son adoption plus hypothétique.

Leave A Reply