Le faux  retour  de la tuberculose en France dû aux arrivées de migrants

Le faux  retour  de la tuberculose en France dû aux arrivées de migrants

Le Monde
| 10.06.2016 à 10h49
Mis à jour le
10.06.2016 à 10h55
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Par Adrien Sénécat

Près de 2 000 personnes ont été évacuées lundi 6 juin du campement de fortune des jardins d’Eole, dans le 18e arrondissement de Paris. Des migrants notamment afghans, soudanais, somaliens ou encore érythréens y dormaient depuis la reconstitution du camp, environ un mois plus tôt. Cette décision a été précipitée par la découverte de quatre cas de tuberculose sur les lieux, selon la préfecture.

Plusieurs figures d’extrême droite se sont rapidement indignées de cette information. L’avocat Gilles-William Goldnadel estime par exemple que cette information a été « cachée » par les médias (ce qui, comme l’a montré arretsurimages.net, est très exagéré).

D’autres avancent le spectre de ce qui constituerait une véritable menace d’épidémie liée à l’immigration, selon eux :

POURQUOI C’EST EXAGÉRÉ

La tuberculose est responsable d’environ 1,5 million de morts chaque année, selon l’organisation mondiale de la santé (OMS). « C’est l’une des grandes maladies mondiales, mais sa distribution dans le monde est hétérogène », explique Jean-Paul Guthmann, épidémiologiste à Santé publique France, responsable du programme tuberculose.

« En 2014, 58 % des nouveaux cas diagnostiqués se situaient en Asie du Sud-Est et dans le Pacifique Ouest, tandis que 28 % se situaient en Afrique. L’Union européenne est beaucoup moins touchée, avec 58 000 cas », soit moins de 4 % des nouveaux cas.

Contrairement à certaines idées reçues, cette maladie reste un problème de santé publique en France, rappelle l’épidémiologiste. « Elle n’a jamais complètement disparu, mais la tendance est à la baisse année après année. On est passé de 5 578 cas en 2004 à 4 827 cas en 2014. » Selon lui, cette tendance ne s’est pas inversée en 2015.

La persistance de la tuberculose en France, même à un niveau relativement faible, fait que le vaccin est toujours recommandé par les autorités, à défaut d’être obligatoire.

Très contagieuse, la maladie a la particularité de pouvoir se déclarer des années après la contamination par le bacille tuberculeux. 60 % des nouveaux cas recensés en France concernent des personnes nées à l’étranger. Ces personnes « ne sont pas forcément arrivées malades. Ce sont les conditions de la précarité qui précipitent le déclenchement », explique au Figaro Jeanine Rochefort, déléguée Ile-de-France de Médecins du monde. D’une manière générale, de moins bonnes conditions socio-économiques favorisent l’apparition de la maladie, confirme Jean-Paul Guthmann.

Dans tous les cas, présenter une poignée de cas dans un camp de réfugiés à Paris comme une menace imminente paraît disproportionné, dans un contexte où la tuberculose recule sur le plan national.

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