L’auteur de l’attentat du Nouvel An à Istanbul identifié mais toujours recherché

L'auteur de l'attentat du Nouvel An à Istanbul identifié mais toujours recherché

Le ministre des affaires étrangères turc, Mevlüt Cavusoglu, n’a pas dévoilé l’identité du suspect qui était toujours en fuite mercredi.

Le Monde
| 04.01.2017 à 09h13
Mis à jour le
04.01.2017 à 11h32
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Par Marie Jégo (Istanbul, correspondante)

L’auteur de l’attentat qui a fait 39 morts dans une boîte de nuit d’Istanbul la nuit du Nouvel An a été identifié, a annoncé, mercredi 4 janvier, le ministre des affaires étrangères turc, Mevlüt Cavusoglu, à l’agence de presse progouvernementale Anatolie. Il n’a toutefois pas dévoilé l’identité de l’auteur de l’attaque revendiquée par l’organisation djihadiste Etat islamique (EI) et qui était toujours en fuite mercredi.

Le gouvernement turc, évoquant une « enquête difficile », avait déjà affirmé lundi que des « données relatives aux empreintes digitales et à l’apparence » du tueur avaient été obtenues. Seize personnes étaient en garde à vue mardi, dont l’épouse de l’assaillant présumé et deux étrangers interpellés à l’aéroport Atatürk d’Istanbul, selon l’agence de presse Dogan. Au total, 41 individus ont été placés en garde à vue dans le cadre de l’enquête.

Les informations sur l’identité du tueur restent, elles, encore confuses. Un ressortissant kirghiz, Lakhe Machrapov, 28 ans, désigné à l’envi mardi par la plupart des médias comme le suspect numéro un, a finalement été disculpé.

Un homme qui fait les cent pas avant de monter dans un taxi

Seule certitude, l’homme qui s’est introduit avec un fusil d’assaut dans la discothèque, la nuit du 1er janvier, était un tueur froid rompu au maniement des armes. Il a usé de chargeurs doubles tout en visant le haut du corps des victimes pour tuer un maximum de personnes.

Après avoir mitraillé la salle pendant sept minutes, il s’est ensuite caché dans les cuisines de l’établissement. C’est là qu’il s’est changé avant de ressortir du club avec les rescapés, laissant sur place son arme, son sac et une veste contenant une liasse de billets turcs.

Sa trace se perd à Kuruçesme, un quartier d’Istanbul situé non loin de la scène de crime, lorsqu’il claque la porte du taxi qui l’a transporté depuis la boîte de nuit. Interrogé par la police, le chauffeur du taxi a rapporté avoir débarqué l’homme qui n’avait pas d’argent sur lui pour payer la note, et qui lui a néanmoins emprunté son téléphone portable pour passer un coup de fil.

C’est à partir du numéro appelé sur le portable du chauffeur que la police a pu procéder à plusieurs interpellations, notamment dans le quartier populaire et conservateur de Zeytinburnu, où le tueur a séjourné. Des images, prises par les caméras de surveillance dans ce quartier avant la tuerie, montrent la silhouette floue d’un homme qui fait les cent pas avant de monter dans un taxi en direction de la discothèque.

Un appartement loué pour trois mois, en liquide

Selon le récit avancé par plusieurs médias, l’homme serait venu de Syrie avec sa femme et ses enfants, pour ne pas éveiller les soupçons. Le 22 novembre 2016, la famille s’est installée à Konya, une ville conservatrice et religieuse de l’Anatolie centrale. Un appartement a été loué pour trois mois, en liquide, à une agence de location dont les propriétaires ont été placés mardi en garde à vue.

La presse assure que la femme du tueur est actuellement en garde en vue, mais aucune identité n’a été dévoilée. Selon Abdulkadir Selvi, éditorialiste du quotidien Hürriyet, il ne fait aucun doute que l’auteur de l’attaque a combattu en Syrie pour le compte de l’organisation Etat islamique (EI). Le mode opératoire est néanmoins différent des précédentes attaques attribuées à l’EI.

Cette fois-ci, le tueur de la discothèque ne portait pas de ceinture explosive, et visiblement, il ne comptait pas mourir « en martyr ». Le fait qu’il se soit évaporé dans la nature indique qu’il dispose de relais à l’intérieur du pays.

Fait exceptionnel, l’EI, qui jusqu’ici ne clamait jamais la paternité des attentats qui lui avaient été attribués sur le sol turc (à Suruç et à Ankara en juillet et en octobre 2015, à l’aéroport d’Istanbul le 28 juin 2016), a revendiqué la tuerie du réveillon.

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L’état d’urgence prolongé pour trois mois

La revendication émane de l’agence centrale de l’organisation et non de l’organe de propagande Amaq, familier de ce type de proclamation. Dans son communiqué, l’EI dit avoir envoyé « un soldat du califat », pour punir la Turquie de son implication en Syrie.

L’armée turque et des rebelles syriens alliés, épaulés par l’aviation russe, sont engagés depuis des semaines à la conquête d’Al-Bab, un fief de l’EI situé à une trentaine de kilomètres de la frontière turco-syrienne.

Depuis cette intervention, la Turquie est ostensiblement devenue la cible du groupe djihadiste. Le mois dernier, l’EI a diffusé une vidéo montrant deux soldats turcs immolés par le feu. Ankara a reconnu que trois soldats avaient été capturés en Syrie par le groupe, tout en se refusant à authentifier la vidéo.

Alors que la chasse à l’homme se poursuivait mardi, le Parlement turc a prolongé pour trois mois supplémentaires l’état d’urgence imposé après la tentative de putsch du 15 juillet 2016.

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