La menace du coup de la pompe

La nuit, se promène dans les couloirs de l’Élysée le spectre du 21 avril 2002. Mais en journée, ils sont bien plus nombreux à peupler les esprits de la majorité. Le spectre du CPE a surgi avec les violences dans les manifestations. Celui de la campagne législative de 1993, la plus violente dans les mémoires d’éléphants socialistes, revient avec les dégradations en cascade des permanences de députés. Et c’est désormais 1995 qui vient hanter la majorité. Les blocages des raffineries conduiront-ils à la paralysie du pays

Les affrontements peuvent à tout moment basculer

Le CPE a été retiré, la gauche a connu l’une de ses défaites les plus lourdes en 1993 et Alain Juppé a dû reculer en 1995. Autant dire que les parallèles historiques ne prêtent guère à l’optimisme pour le projet de loi El Khomri.

Le gouvernement pourra-t-il combattre tous ces spectres en même temps Alain Vidalies a tenté dimanche de s’attaquer à l’un d’eux. Le régime «
dérogatoire
» des routiers ne sera pas modifié, a assuré le secrétaire d’État aux Transports. Leurs heures supplémentaires resteront majorées au minimum de 25 %, quand le texte prévoit de laisser les autres entreprises descendre à 10 % après négociations. Les automobilistes devraient échapper à la pénurie. Par ailleurs, les transports en commun conservent une grande fluidité. Les opposants au projet de loi sont loin de neutraliser l’économie.

Si le chasseur de spectre écarte l’un d’entre eux, celui de 1995, il en restera d’autres. L’incendie d’une voiture de police a montré que les affrontements peuvent à tout moment basculer dans le drame. Compter sur l’Euro de football paraît hasardeux. Si la compétition ne parvient pas à divertir les esprits, le continent aura les yeux tournés vers notre pays divisé. Le gouvernement devra gérer manifestations et 49-3 pendant le rendez-vous sportif. En espérant ne pas créer une nouvelle peur de réformer pour les gouvernements futurs.