Fantasmes et  précariat  , bienvenue à la réunion annuelle du groupe Bilderberg

Fantasmes et  précariat  , bienvenue à la réunion annuelle du groupe Bilderberg

Le Monde
| 09.06.2016 à 12h34
Mis à jour le
09.06.2016 à 14h01
|

Par Luc Vinogradoff

« Who run the world ‘ », demande Beyoncé. Pas nous, assurent, chaque année, les participants du très secret groupe Bilderberg, qui se réunissent pour la 64e fois, du 9 au 12 juin, dans un hôtel ultra-sécurisé de Dresde.

« Vous savez que le Bilderberg est sur le point de commencer quand vous voyez apparaître les flingues », écrit le comédien Charlie Skelton, envoyé par le Guardian pour inspecter les alentours de ce sommet qui alimente facilement les fantasmes.

Censé « favoriser le dialogue entre l’Europe et l’Amérique du Nord », ce sommet des riches, des puissants et des très discrets est considéré par ses détracteurs comme un groupe opaque où serait décidé, dans des chambres insonorisées, un « nouvel ordre mondial » au choix par les Illuminati, les francs-maçons, les reptiliens.

Banquiers et PDG en huis clos

Que se passe-t-il vraiment pendant les trois jours de réunion du groupe Bilderberg ‘ Personne ne le sait vraiment. Les organisateurs répètent qu’il s’agit de discussions informelles et de réunions sur les grands sujets géopolitiques qui agitent la planète. Les seules informations publiques sont les très larges thèmes de discussion et la liste des participants.

Cette année, sous la présidence du PDG d’AXA, Henri de Castries, 130 personnes feront le pèlerinage, le plus souvent en jet privé, à Dresde : des chefs d’Etat et ex-ministres, des PDG et des sultans de la Silicon Valley, des capitaines d’industrie qui brassent des milliards et des milliards et des milliards, des journalistes, des intellectuels, un ancien astronaute, des banquiers des quatre coins de la planète, Henry Kissinger, un ancien patron de la CIA et le maire du Havre, Edouard Philippe.

Il ne s’agirait donc que d’une longue session de networking dans les très, très hautes sphères entre « un nombre assez important d’accros au travail extrêmement riches et puissants ». Et puis, « aucune résolution ne sera prise, aucun vote n’est organisé, aucune mesure n’est proposée », disent les organisateurs, pour essayer de dissiper les fantasmes. Mais ça ne marche jamais.

Car la presse est tenue à l’écart, des centaines de policiers sont mobilisés et les participants ne parleront jamais de ce qui a été dit à l’intérieur du Taschenbergpalais de Dresde, officiellement parce que « les participants [ne doivent] pas être liés par les conventions de leurs fonctions ». Ce qui, forcément’ alimente les fantasmes.

Comme tous les ans, des manifestants iront aussi à Dresde, camper autour des policiers avec des pancartes disant, en substance, « si vous n’avez rien à cacher, pourquoi est-ce que vous vous cachez autant ».

Les explications des Décodeurs :
 

3 questions sur le très secret groupe Bilderberg, objet de fantasmes

Thèmes classiques et un peu déprimants

Cette année, les thèmes de discussion sont très classiques et un peu déprimants. « Questions d’actualité », grands dossiers économiques et géopolitiques (par exemple « La Chine »), crise migratoire en Europe et, surtout, la montée des populismes, au choix aux Etats-Unis, aux Pays-Bas, aux Philippines, en Autriche ou en France

Pour en discuter, les organisateurs ont invité le professeur d’économie britannique Guy Standing, défenseur d’un revenu universel pour tous, qui sera sûrement assis entre des PDG milliardaires et des banquiers libéraux pour qui l’austérité reste quand même la meilleure option pour sauver l’économie.

Il exposera, devant les riches et puissants, le concept de « précariat », un néologisme formé de « précaire » et « prolétariat » qui désigne une nouvelle classe socio-économique formée des plus bas salaires, des travailleurs à mi-temps, des travailleurs étrangers, des jeunes surdiplômes et sous-employés’

Une « classe sociale en devenir », qui n’a connu que la précarité dans sa vie professionnelle, et qui promeut électoralement ces idées qualifiées de populistes.

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