En 2060 la pollution de l’air pourrait tuer 6 à 9 millions de personnes dans le monde

En 2060 la pollution de l'air pourrait tuer 6 à 9 millions de personnes dans le monde

Sans politiques et mesures rigoureuses, la pollution atmosphérique pourrait chaque année entraîner d’ici à 2060 le décès prématuré de 6 à 9 millions de personnes’ et coûter 2 600 milliards de dollars (2 280 milliards d’euros). Ces chiffres faramineux sont issus d’une étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur « Les Conséquences économique de la pollution de l’air extérieur », publiée jeudi 9 juin.

Au cours des cinquante prochaines années, avec l’augmentation du niveau de vie et une demande croissante en énergie, les émissions de la plupart des polluants vont croître sensiblement. En particulier, les émissions d’oxydes d’azote et d’ammoniac, qui contribuent à la formation des PM 2,5 (particules d’un diamètre inférieur à 2,5 microns, les plus dangereuses) à travers des réactions chimiques dans l’atmosphère, pourraient quasiment doubler.

Alors que l’air extérieur tue déjà aujourd’hui 3,7 millions personnes, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la surmortalité due à la mauvaise qualité de l’air pourrait ainsi doubler, si ce n’est tripler. Cette progression alarmante s’explique par un air de plus en plus chargé en PM 2,5 et en ozone, mais également par une urbanisation croissante soumettant de plus en plus de personnes à des niveaux élevés d’émissions, et une population vieillissante, donc plus fragile, de plus en plus nombreuse.

Pour établir ces projections, l’OCDE a utilisé ses propres outils de modélisation économique et environnementale, en utilisant les niveaux d’émissions recensés dans la base de données de l’Institut international de recherche environnementale (IIASA). Elle a ensuite utilisé le modèle du Centre commun de recherche de la Commission européenne pour calculer les concentrations attendues de particules fines et d’ozone. Les taux de mortalité à venir ont ensuite été calculés en utilisant ces concentrations ainsi que des projections démographiques et les taux de mortalité liés à la pollution, établis par l’Institut de métrologie sanitaire et d’évaluation (IHME) de l’université de Washington.

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Impacts économiques lourds

La Chine et l’Inde, où le nombre de morts prématurés pourrait quadrupler d’ici à 2060, apparaissent comment les pays les plus à risque. Tandis que les 34 nations membres de l’OCDE restent relativement épargnées : de 430 000 en 2010, le nombre de personnes décédant prématurément en raison de l’air pollué passerait, dans l’ensemble de ces pays, à 580 000 en 2060. Seule parmi eux, la Corée du Sud connaîtrait une progression significative du nombre de décès dus à l’air vicié, qui triplerait.

Les concentrations croissantes de particules et d’ozone dans l’air vont aussi entraîner une hausse des cas de maladies nécessitant une hospitalisation, et ce faisant des dépenses de santé et des jours de congés maladie. De 21 milliards de dollars en 2015, les dépenses de santé dans le monde pourraient ainsi s’élever à 176 milliards de dollars en 2060. Le nombre de jours d’arrêt maladie pourrait quant à lui quasiment tripler et atteindre 3 750 milliards.

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Outre l’augmentation des dépenses de santé, la pollution de l’air aura comme effet économique direct une réduction de la productivité au travail, et dans une moindre mesure des pertes agricoles. Elle entraînera aussi des effets indirects selon l’OCDE. « La santé entraînant des dépenses croissantes, on épargnera moins et on investira moins dans d’autres secteurs, explique Elisa Lanzi, une des auteurs du rapport. Globalement, représentant aujourd’hui 0,3 % du PIB mondial, ces coûts directs et indirects pourraient s’élever d’ici à 2060 à 1 % du PIB mondial. 1 % cela peut paraître peu, c’est tout de même l’équivalent du PIB de la France », souligne l’économiste.

Les pays les plus impactés par une baisse de leur PIB seront la Chine (- 2,6 %), la Russie (1,6 %), les pays de la région caspienne (3,1 %) et ceux de l’Europe de l’Est non-membres de l’OCDE (2,7 %). L’économie de l’Inde (- 1 %) sera moins lourdement touchée que celle de la Chine, ayant une population beaucoup plus jeune et l’épargne ne jouant qu’un faible rôle.

L’OCDE a aussi cherché à mesurer le coût des impacts non marchands, autrement dit en termes de bien-être. Elle a pour cela évalué le prix que chacun serait prêt à payer chaque année pour réduire ses probabilités d’être affecté par un problème de santé dû à l’air pollué. D’un montant moyen de moins de 500 dollars par personne en 2015, ce coût hypothétique de la pollution atmosphérique atteindrait entre 2 100 et 2 800 dollars en 2060. « C’est là encore un message fort à l’adresse des Etats, insiste Elisa Lanzi. Car si les gens sont prêts à payer autant, c’est bien qu’ils souhaitent être débarrassés de ce fléau. »

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