Diffamation au lycée Averroès de Lille , le professeur de philosophie en appel ce jeudi

Changement de ville, de décor et, visiblement, de stratégie. En juin dernier, Soufiane Zitouni, 49 ans aujourd’hui, s’était présenté sans avocat. Il devait se défendre à propos du contenu de différents courriels échangés avec des collègues. Jeudi, l’enseignant sera défendu par l’avocat parisien Mario Stasi.

Zitouni ne rejette pas des remarques telles que : «
Je ne veux plus travailler dans ce nid de vipères.
» «
Ce n’est pas une injure
», insiste cet homme désormais en poste dans un lycée privé du Valenciennois. La position de Zitouni «
J’ai eu un échange de mails avec des collègues qui me soutenaient et une personne a remis cette correspondance à la direction.
»

Contexte post-charlie

Cette dispute entre enseignants se déroule dans le contexte post-Charlie et Hyper Cacher de janvier 2015. Dans une série de tribunes dans le quotidien Libération, Soufiane Zitouni avait alors fait part d’un certain nombre de griefs concernant Averroès, un lycée fondé par des responsables de l’Union des organisations islamiques de France, régulièrement présentée comme très rigoriste. Ces textes font l’objet d’un autre dossier judiciaire. «
J’ai été mis en examen, complète le protestataire. L’affaire sera jugée devant le tribunal de Nanterre. Là-bas, nous évoquerons les questions d’idéologie.
»

Les débats douaisiens tourneront-ils dès lors essentiellement autour de la notion de confidentialité brisée ou de la bonne foi de Zitouni

Mails et textos à la rescousse

Par forcément. Avocat du lycée Averroès, Hakim Chergui annonce que de nombreuses familles et des enseignants assisteront à l’audience. «
Si l’avocat le demande, des personnes pourront être entendues pas le président
», annonce Me Chergui. «
Notre position est simple, poursuit le défenseur parisien. Il y a eu des propos diffamatoires et injurieux. Soufiane Zitouni a été condamné pour cela. Nous attendons une confirmation en appel.
»

Des deux côtés de la barre, les adversaires devraient également mettre en avant tout une série de mails ou de textos appelés à la rescousse pour appuyer leur position.

Après les mails, les tribunes, le livre

On ne sait pas encore si la parution du livre (*) de Soufiane Zitouni sera, elle aussi, suivie d’une convocation en justice. Toujours est-il que dans un chapitre, l’enseignant reprend largement ses propos concernant son ancien établissement. Sans oublier, au passage, d’allumer quelques responsables politiques.

Ancien inspecteur d’académie, aujourd’hui élu d’opposition à la ville de Lille, Michel Soussan est qualifié de «
spin doctor
» d’Averroès. Zitouni dénonce une forme d’électoralisme, pointant «
un mariage très improbable entre l’UOIF et la droite dans le département du Nord
». Certains exemples cités dans le livre (comme la conquête de Roubaix-Tourcoing à l’issue des municipales de 2014) ne sont pas forcément heureux. À Roubaix, la gauche (PS et assimilés) a surtout consacré beaucoup de temps et d’effort à s’auto-saborder. Quand, à Tourcoing, elle a largement sous-estimé le phénomène Darmanin.

Dans la vingtaine de pages consacrées au lycée de Lille-Sud, on trouvera quelques moqueries. Un responsable de l’établissement est tablé d’ignorance pour avoir confondu la Bible avec un texte de… Céline Dion. Des allégations de bridage de la sincérité des lycéens sont pointées. Ainsi cette conférence avec un rabbin en invité principal. Les élèves auraient été briefés afin d’éviter tout dérapage. «
Ici, je veux mettre l’accent sur la situation paradoxale d’un établissement musulman à la fois sous contrat avec l’État français et inféodé à l’UOIF, accuse Zitouni, cette organisation nourrie idéologiquement par la secte islamiste des Frères musulmans.
» Prochaine explication de texte dans un prétoire L. B.

Confessions d’un fils de Marianne et de Mahomet, ed. Les Echappés, 304 p., 17 .