Cinéma , Christopher Nolan replonge Dunkirk dans son glorieux passé

Cinéma , Christopher Nolan replonge Dunkirk dans son glorieux passé

Action ! Lundi, après des mois de préparation, Christopher Nolan (Inception, Interstellar, la trilogie Batman’) débutera à Leffrinckoucke et Dunkerque le tournage d’un film consacré à l’opération Dynamo, la plus grande opération de rembarquement de l’histoire militaire (lire ci-contre). Depuis quelques semaines, c’est surtout à un impressionnant débarquement qu’assistent les Dunkerquois.

Dunkerque en concurrence avec la Normandie et la Belgique

Tout avait commencé dans la plus parfaite discrétion, l’été dernier, avec la venue incognito de Christopher Nolan. À ce stade embryonnaire du projet, le choix de Dunkerque n’était pas une évidence. On sait comment, parfois, le cinéma peut s’arranger avec la vérité historique. Finalement, les facilités proposées par les autorités politiques et portuaires permettaient à Dunkerque d’emporter la mise face à des sites en Normandie et en Belgique.

Le secret, toujours préservé, n’allait pas résister à l’excitation du maire de Dunkerque qui annonçait publiquement, mi-décembre, «
la venue au printemps d’une superproduction et d’un metteur en scène mondialement connu ». La « traque » débutait jusqu’à l’information révélée par La Voix du Nord et confirmée quelques jours plus tard par Warner Bros : ce serait donc Christopher Nolan.

Moyens considérables

Vu le pedigree du personnage, on pouvait alors s’attendre à un projet spectaculaire. Début mars apparurent les premiers signes visibles de cet énorme projet porté par des moyens financiers considérables. On assista, progressivement, à la reconstitution de la jetée détruite en 1940, à la transformation du Kursaal en usine, au dragage du bassin pour l’amarrage des divers bateaux de guerre, à des essais de fumée, à la transformation historique d’un quartier (lire par ailleurs), à l’engagement de près de 2 000 figurants’

C’est grâce à cet énorme travail préparatoire que, ce lundi, le metteur en scène pourra lancer son premier «
Action !
».

Jusqu’à mercredi, le tournage aura pour cadre la plage de Leffrinckoucke et quelques rues de Malo. Si les détails sur le scénario sont (presque) aussi bien gardés que la recette du Coca, on sait que ces deux journées permettront de mettre en boîte des scènes d’explosions, des survols d’avions, la fuite de soldats britanniques.

Puis, jeudi et vendredi, la troupe enchaînera sur la plage avec des scènes qui risquent d’être extrêmement spectaculaires, regroupant plusieurs centaines de figurants pris sous la mitraille des avions, devant un Kursaal métamorphosé en usine.

Suivront près de trois semaines de tournage, entre la jetée et les bateaux. Action !

Métamorphosé, renvoyé en 1940, Malo se prépare à l’assaut…

Malo, en quelques jours, a remonté le temps. Et le résultat est bluffant. L’ultime phase préparatoire, pour les décorateurs, a consisté à replonger certaines rues dans les années 40. Des sacs de sable ont été empilés pour figurer des murs de protection. Parallèlement, des menuisiers et peintres poursuivent leur mission de reconstitution en masquant portes et fenêtres trop modernes, en changeant les plaques de rue, en dissimulant les passages piétons, certaines sonnettes, en recouvrant les chaussées de sable… Le diable, c’est bien connu, se cache dans les détails.

Ce travail, d’une minutie extrême, fait le bonheur des passants. «
C’est hallucinant, se réjouit Nathalie, promeneuse attentive. Si vous regardez l’usine, vous croyez qu’elle est en métal mais c’est du bois ! On ne peut s’en apercevoir qu’en touchant. Dans les rues c’est encore plus spectaculaire. Ils éliminent tous les détails d’après 1940. Quelle rigueur ! Des magiciens ! En plus, ils sont sympas.
»

La coiffure d’Harry Styles

À quelques pas de là, devant le Restaurant de la digue, établissement créé de toutes pièces (de bois) pour les besoins du tournage, des bâches protègent une foultitude d’accessoires. Des vélos rouillés, de vieilles bouteilles de vin, des caisses de munitions… Même les lampadaires en bordure de plage ont été maquillés. La métamorphose est totale.

Une autre métamorphose a secoué Dunkerque : le changement de coiffure d’Harry Styles, le chanteur de One Direction qui fera ses débuts au cinéma.

Son arrivée, lundi, a affolé les réseaux sociaux et enfiévré ses admiratrices, les « Directioners ». Depuis, des grappes de fans stationnent devant l’hôtel Borel, la traque à la limousine a débuté.

Le metteur en scène, qui serait logé dans une luxueuse villa de la digue, profite pour sa part d’une relative quiétude. On peut ainsi le voir déambuler dans les rues qui lui serviront de décor, demeurant toutefois hermétique et mutique pour la presse. Il y a quelques jours, dans un restaurant de bord de mer, deux Britanniques, voisins de table, sont venus le saluer. Au moment de payer, on leur signala que leur compatriote avait réglé la note. Avare de parole mais généreux…

LA VOIX DE BRUNO VERHEYDE : VICTOIRE

Le taxi, qui venait de le déposer sur ce bout de plage, filait déjà, comme emporté par un coussin de sable. Désormais seul dans le vent, le Japonais, hagard, regardait s’envoler ses illusions. Son périple historique l’avait mené là, sur les traces de Dynamo. En quête de signes, d’épaves, comme il en avait vu au mémorial de Pearl Harbor.

Il ignorait qu’ici, en 1940, on avait prestement effacé les traces de ce présent que l’on ne voulait pas voir survivre.

Cette opération Dynamo, sanctifiée depuis des décennies par nos voisins anglais, qui parlent encore avec émotion du fameux «
Spirit of Dunkirk
» a longtemps été, ici, synonyme de défaite.

Ces British, que l’on accuse de tout faire à l’envers, avaient rapidement considéré cet épisode comme victorieux, l’acte fondateur du succès final. Malgré tout, malgré tous, à Dunkerque, depuis des années, quelques acharnés tentent de réhabiliter avec peu de moyens, dans l’étroit Bastion 32, cette mémoire glorieuse.

Le fait qu’un Britannique, cinquante ans après Week-end à Zuydcoote, revienne sur cet épisode, n’a donc rien d’anodin. Et, comme en 1940, ces quelques jours pourraient avoir une belle influence sur le futur.

Les décideurs locaux l’ont déjà promis : ce nouvel intérêt leur donnera l’occasion de raviver la flamme. Rien que pour cela, le film de Christopher Nolan est déjà un succès.

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