2017 , la course d’obstacles de Cécile Duflot
Ce sera son septième congrès depuis qu’elle est entrée chez les Verts en 2001. Il n’est pourtant pas sûr que Cécile Duflot, qui a dirigé le parti de 2006 à 2012, se rende samedi 11 juin à Pantin (Seine-Saint-Denis), où se déroule le congrès d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV).
Si elle s’affiche en retrait, Mme Duflot n’est pas pour autant absente des débats. Elle a signé la motion que dirige son bras droit, David Cormand, qui assure l’intérim à la tête du parti depuis le départ d’Emmanuelle Cosse au gouvernement.
Mais les temps ont changé. Finie l’époque où ses deux vieux complices, Stéphane Sitbon-Gomez et Jean-Vincent Placé, qui ont tous deux mis les voiles, arrangeaient ses affaires en interne. Face à quatre autres textes, celui de M. Cormand est arrivé en première position, mais n’a recueilli que 34,9 % des voix. S’il veut rester secrétaire national, celui-ci est contraint à une alliance.
La préparation du congrès aura offert un bien mauvais spectacle. Quatre des listes partageaient une ligne commune aucune alliance avec le Parti socialiste (PS) et un candidat écolo en 2017. Mais elles n’ont pas été capables de s’entendre en amont et ont donné l’image d’un parti balkanisé, le tout sur fond de luttes des places.
« Ce n’est pas comme si, le 26 juin, il y avait un sujet important avec le référendum de Notre-Dame-des-Landes [Loire-Atlantique] et comme si, trois jours plus tôt, l’Europe pouvait tomber en lambeaux avec le Brexit’ », se désole Julien Bayou, porte-parole. De quoi décourager leurs derniers militants : seuls 3 000 d’entre eux sur 6 000 à jour de cotisation se sont prononcés.
« Il faut distinguer le suicide de l’assassinat »
Pour Cécile Duflot, c’est une bien mauvaise nouvelle. En quatre ans, le mouvement a perdu plus de la moitié de ses députés européens et de ses conseillers régionaux. Une bonne partie de la formation a claqué la porte pour se rapprocher du PS, à commencer par leur secrétaire nationale, Emmanuelle Cosse, qui a rejoint le gouvernement en février contre l’avis d’EELV. Aucun bilan n’a été tiré de la période.
Pour ne rien arranger, fin mai, leur groupe à l’Assemblée nationale a explosé à la suite de l’affaire Baupin. L’ex-coprésidente du groupe, qui siège désormais en non-inscrite, a immédiatement accusé le président de la République, François Hollande, d’avoir orchestré « une tentative d’assassinat » de l’écologie politique. Ce qui a fait sourire le chef de l’Etat qui a confié à des proches : « Il faut distinguer le suicide de l’assassinat. »
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Cécile Duflot n’en a cure. La députée de Paris juge qu’il y a un espace entre François Hollande et Jean-Luc Mélenchon. Selon elle, les deux hommes ont tout intérêt à éliminer la concurrence ce qu’elle appelle le « Yalta de la vieille gauche ». « L’année 2017 ne peut pas se résumer au face-à-face entre l’opposition de gauche et la gauche libérale, explique son entourage. Les écologistes, et Duflot en particulier, sont capables de faire un score à deux chiffres. »
Depuis des mois, elle répète qu’elle se prépare pour 2017. Lundi 6 juin, elle a franchi un pas supplémentaire sur France Info, affirmant qu’elle est désormais « prête ». Elle a toujours affirmé qu’elle soutiendrait la candidature de Nicolas Hulot si ce dernier décidait de se présenter. Mais le calendrier de l’ancien animateur d’« Ushuaïa », qui se prononcera « avant la fin de l’année », commence à lui poser problème. « Ce n’est pas tenable pour nous, reconnaît M. Cormand. Si on attend la fin de l’année et qu’il n’y va pas, il n’y aura pas du tout de candidat écologiste en 2017. »
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Les obstacles restent nombreux sur la route de Mme Duflot, qui doit désormais faire face à l’offensive de Jean-Luc Mélenchon sur l’environnement. « Pour elle, ce n’est pas un positionnement de campagne », estime son entourage. Il y a aussi ces sondages qui ne sont pas bons : entre 1 % et 3 % des intentions de vote. « Elle dit que si elle se présente aujourd’hui, elle va faire l’inverse de Joly, commencer à 2 % et finir à 10 % !, assure Daniel Cohn-Bendit. Elle a le melon ! »
Dans le parti, sa candidature ne va pas non plus de soi. Certains appellent à une primaire en interne. « On ne peut pas avoir une candidate qui considère que c’est elle et personne d’autre, critique Annie Lahmer, conseillère régionale d’Ile-de-France. Pourquoi pas, mais si elle est choisie par les militants. » M. Cormand, lui, n’est pas favorable à ce mode de désignation. « Je ne considère pas que ce soit l’idée du siècle. En 2011, ça a massacré nos deux candidats potentiels », juge l’actuel numéro un d’EELV.
Le PS ne lui fera pas de cadeau
Il lui faudra aussi réunir les cinq cents parrainages nécessaires pour pouvoir se présenter. Si le Nouveau Parti anticapitaliste y parvient depuis 2002, les écologistes devraient aussi pouvoir s’en sortir mais cela suppose de s’y prendre tôt et d’y mettre des forces.
Exangue, le parti ne pourra pas non plus mettre la main à la poche, même s’il a enfin vendu son siège parisien. Mme Duflot devra se contenter de l’argent alloué par l’Etat pour les candidats ayant réuni les signatures soit 800 000 euros en 2012 et des dons de ses soutiens.
La députée de Paris entend enfin sauver son siège : elle a déjà annoncé qu’elle serait candidate aux législatives. Si les promesses du congrès sont tenues, elle ne pourra pas compter sur un accord, même technique, avec le PS. Et ce dernier ne lui fera pas de cadeau. « Elle se dit que si elle appelle à voter pour Hollande au second tour, ils la soutiendront dans sa circonscription, juge François de Rugy, député écologiste de Loire-Atlantique. Tout ça c’est bien gentil mais encore faudrait-il qu’il y soit. »