#PussyGrabsBack #NotOkay’ de l’activisme et de la catharsis contre le sexisme de Trump

#PussyGrabsBack #NotOkay' de l'activisme et de la catharsis contre le sexisme de Trump

Le Monde
| 12.10.2016 à 18h08
Mis à jour le
13.10.2016 à 10h11
|

Par Violaine Morin

Les deux cartes de l’Amérique sont parlantes et montrent le fossé entre les deux électorats dans une campagne marquée par la misogynie, les propos sexistes, vulgaires et parfois violents de Donald Trump. Dernier évènement glauque en date, les accusations d’agressions sexuelles par deux femmes dont les témoignages ont été publiés dans le New York Times.

A gauche, ce que donnerait une carte électorale si seules les femmes votaient.

A droite, la même chose pour les hommes.

Hillary Clinton est en bleu, Donald Trump en rouge.

Silver a regardé les données de chaque électorat dans douze sondages nationaux : en moyenne, Hillary Clinton devance Trump de quinze points chez les femmes, et Donald Trump domine de cinq points chez les hommes.

« Gender gap »

Historiquement, les femmes sont plus nombreuses à voter démocrate que républicain. Ce gender gap (écart entre les sexes) de l’électorat américain existe depuis 1980, lorsque la majorité des hommes (55 %) ont voté pour Ronald Reagan (contre 47 % des femmes). En 2012, le républicain Mitt Romney ne perdait que de 8 points chez les femmes.

En 2016, le gap s’est considérablement élargi. Les raisons semblent évidentes, vu les multiples propos sexistes tenus par Donald Trump depuis le début de la campagne, mais encore plus depuis la révélation d’une vidéo datant de 2005 où l’on entend Donald Trump parler de ses techniques de drague, qui se rapprochent de l’agression sexuelle pure et simple.

« Si vous êtes une star, elles vous laissent faire. Vous pouvez faire n’importe quoi. Les attraper par la chatte. Vous pouvez faire n’importe quoi. »

Les équipes de campagne de Trump ont tenté de minimiser des propos qui ne seraient que des « conversations de vestiaire ». Mais comme le rappelle Trevor Noah, le présentateur du « Daily Show », « il y a une différence entre des propos crus et la glorification des agressions sexuelles ».

Catharsis improvisée

Il est impossible de mesurer les effets de cette vidéo dans les sondages, mais ils sont clairement visibles en ligne. Les réseaux sociaux ont joué leur rôle habituel de lieu de discussion, caisse de résonance et catharsis improvisée. Quelques heures après la diffusion de la vidéo, Kelly Oxford, actrice canadienne habitant à Los Angeles, a écrit un tweet en demandant aux « femmes » de lui « tweeter leurs premières agressions ». Elle commence, en reprenant les mots utilisés par le candidat républicain :

« Un vieil homme me prend par la chatte’ et me sourit, j’ai 12 ans. »

En quelques heures, elle raconte avoir reçu des milliers de contributions, au rythme de 50 tweets par minute. Depuis vendredi, plus d’un million de témoignages ont convergé vers le profil Twitter de Kelly Oxford.

On y trouve des récits d’agressions, souvent des souvenirs de l’adolescence. De la part du coiffeur, d’un ami d’ami, d’un professeur de sport, d’un inconnu’ Des témoignages d’anonymes mais aussi d’actrices, comme Amber Rose Tamblyn, qui raconte l’agression d’un ex-compagnon sur Instagram.

« Purge collective »

Un petit tweet et le hashtag #NotOkay ont permis une prise de parole, inattendue par sa dimension, et contribué à lutter contre la « culture du viol », terme qui désigne le fait de minimiser les agressions sexuelles (notamment en renvoyant des propos au registre de la « blague »), ou de déculpabiliser leurs auteurs en rejetant la faute sur les femmes. Comme le fait ouvertement l’équipe de campagne de Donald Trump. Le New York Times évoque une « purge collective, à l’échelle nationale, de souvenirs douloureux, souvent enfouis depuis des années ».

Plus organisés, des associations et collectifs féministes ont saisi l’occasion de faire avancer la lutte contre la banalisation des agressions sexuelles. Sur Twitter, le hashtag #PussyGrabsBack, littéralement « la chatte attrape en retour », appelle à utiliser son bulletin de vote comme une réponse aux expressions et à l’attitude de Trump.

Le collectif féministe Female Collective a imprimé des tee-shirts avec une image créée par une graphiste qui a circulé sur les réseaux sociaux. Les profits générés par la vente reviendront au Réseau national contre le viol, les abus sexuels et l’inceste (Rainn).

La dernière contribution en date est une chanson intitulée Pussy Grabs Back, disponible en téléchargement payant sur le site de l’artiste, Kim Boekbinder (les profits iront également à l’association Rainn) et visible sur YouTube.

Les paroles, intercalées avec des samples de l’enregistrement de Donald Trump, appellent à une vengeance par les urnes :

« Nous ne sommes pas des filles, pas des épouses/Nous sommes des êtres humains, nous avons des vies/Et le 8 novembre, on va assurer. »

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