Primaires américaines , les républicains embarrassés par la victoire de Donald Trump

Primaires américaines , les républicains embarrassés par la victoire de Donald Trump

Ça y est ! La victoire de Donald Trump sur le Parti républicain est complète. Comme Dwight D. Eisenhower en 1952, nouveau venu en politique, le magnat de l’immobilier a littéralement « dégommé » ses concurrents dix-sept, de Rick Perry à Scott Walker, de Jeb Bush à Chris Christie et Marco Rubio , tous des élus expérimentés du Grand Old Party (le GOP). Et sans réellement avoir à combattre, il a mis à terre le « tout-sauf-Trump » organisé par certains républicains.

Cette victoire, désormais certaine après la primaire organisée dans l’Indiana mardi 3 mai, a parfois, du mal a passé dans le camp républicain. « J’assiste au suicide d’un parti politique vieux de 160 ans », se lamente ainsi Henry Olsen, analyste politique du think tank conservateur Ethics and Public Policy Center, cité par le New York Times dans un éditorial publié après la victoire de Donald Trump, .

Sur Twitter, Dave Weigel, du Washington Post, dresse pour sa part une liste de candidats républicains (« Abraham Lincoln. Teddy Roosevelt. Dwight Eisenhower. Ronald Reagan. Donald Trump ») et demande à ses followers de chercher l’erreur.

Le Parti républicain n’a rien appris de ses échecs

Le choix qui s’annonce de M. Trump comme candidat républicain à la présidentielle traduit d’abord le fossé qui s’est creusé entre le GOP et son électorat.

Après la défaite de Mitt Romney en 2012, la direction du Parti républicain, estimant avoir raté le coche du vote latino, a entrepris de résoudre la question de l’immigration, en proposant une « voie vers la citoyenneté », qui avait l’aval du monde de l’entreprise, à rebours des attentes des électeurs républicains.

Le GOP a promis d’aider les Américains de la classe moyenne qui ont perdu leur maison, leur emploi ou leur épargne après la crise des subprimes de 2008, ou ceux qui ont participé aux guerres d’Afghanistan et d’Irak et qui sont rentrés mutilés mais abandonnés par le système. Mais il n’a rien fait, alors qu’il dispose de la majorité au Congrès.

Lassés, les électeurs du parti ont préféré embrasser Donald Trump, le candidat qui écoute leurs angoisses et leur a promis de « restaurer la grandeur de l’Amérique », sans trop s’étendre sur les moyens d’y parvenir.

The Atlantic décrit la classe moyenne américaine blanche comme la population la plus mécontente des Etats-Unis. Elle se méfie de toutes les institutions : le gouvernement, les syndicats, les grandes entreprises, les partis et surtout celui pour lequel elle est censée voter.

En 2016, les électeurs républicains ont soutenu des candidats n’ayant jamais eu aucune fonction élective : outre Donald Trump, ils ont soutenu Ben Carson et Carly Fiorina.

Image dégradée du candidat

Aujourd’hui les leaders du Parti républicain doivent donc se faire à l’idée que Donald Trump les mènera à la bataille jusqu’en novembre. Le problème, c’est qu’il a contre lui son image négative. Y compris dans son propre camp.

Les sondages de sortie des urnes dans l’Indiana montrent ainsi qu’à la question « quel est votre sentiment si Trump est élu président ‘ », 24 % des électeurs républicains répondent qu’ils sont « effrayés ».

Un sondage mené par Morning Consult indique par ailleurs que seuls 39 % des Américains ont une image positive de lui (« Very Favorable » à 22 % et « Somewhat Favorable » à 17 %), 56 % une image négative et 4 % n’ont pas d’idée.

Alors qu’il s’apprête à affronter Hillary Clinton, M. Trump a réussi à s’aliéner des blocs clés d’électeurs : les Afro-Américains, les Hispaniques, les femmes. Au sein de l’électorat féminin, qui est fortement mobilisé lors des élections, rappelle le Center for American Women and Politics, il atteint un record de 70 % d’image négative, notait Gallup début avril.

Et au-delà de l’élection présidentielle, les républicains risquent de perdre le Sénat si le discours de M. Trump vis-à-vis des femmes ne change pas radicalement.

Se résoudre à faire élire Hillary Clinton

Les Républicains vont-ils, dès lors, se résoudre à vraiment faire bloc derrière leur candidat Certes, Reince Priebus, le président du Parti, qui ferraillait il y a encore peu contre le magnat de l’immobilier, semble s’être résigné à l’inéluctable et a appelé à l’unité autour de Donald Trump, le qualifiant de « candidat présumé ».

En retour, Donald Trump a loué le travail de M. Priebus et a appelé au rassemblement derrière lui, après avoir accusé, il y a quelques semaines, le GOP de vouloir lui voler la victoire lors des primaires.

Toutefois, John Kasich, gouverneur républicain de l’Ohio, reste en course et a promis de continuer jusqu’à la convention d’investiture de Cleveland. Mais il lui sera difficile d’emporter l’investiture, tellement son retard est abyssal : il n’a que 153 délégués à opposer aux 1 047 délégués de Donald Trump, à qui il ne manque que 190 délégués pour décrocher l’investiture.

John Weaver, le responsable de la stratégie de M. Kasich, a déclaré : « Notre parti est confronté à un choix limpide, entre une solution positive qui nous permettra de gagner en novembre, et une voie plus sombre, qui ne résoudra rien et mènera Hillary Clinton à la Maison Blanche, donnera le Sénat aux démocrates et une Cour suprême libérale. Tant que cela sera possible, le gouverneur Kasich se battra pour imposer sa solution. »

En attendant de connaître la position de figures du parti comme Mitt Romney, Jeb Bush, Paul Ryan ou Marco Rubio, une chose semble certaine, le rassemblement autour du « candidat présumé » ne semble pas acquis. Le site Talking Point Memo note que nombre de membres de l’équipe de campagne de John McCain en 2008 préfèrent virer de bord et disent qu’ils voteront pour Hillary Clinton.

Ben Howe, un contributeur du blog conservateur Red State, se contente de tweeter «#ImWithHer », avant d’expliquer : « Je suis fiscalement conservateur, socialement conservateur. Cela ne changera pas. Mais je ne voterai pas pour un égomaniaque autoritaire. Ça non. »

Le Washington Post constate aussi que nombre de « commentateurs conservateurs » font la grimace face la perspective de soutenir Donald Trump et s’interrogent sur ce qu’être républicain signifie aujourd’hui.

Pour certains républicains, une présidence Clinton serait plus gérable qu’une présidence Trump, non parce qu’ils soutiennent Hillary Clinton, mais parce qu’ils savent à qui ils ont affaire.

Soutenir les candidats républicains dont le siège est en jeu

Lanhee J. Chen, un conseiller diplomatique pour la campagne de Mitt Romney en 2012 et celle de Marco Rubio en 2016, dit qu’il réfléchit à des « options » hors du Parti républicain.

Une solution pour le parti serait de faire une campagne minimale pour M. Trump et de soutenir les élus républicains dont le siège sera en jeu lors des élections de novembre. Pour les sénateurs républicains pour qui c’est le cas, le choix est cornélien : s’aligner sur le « candidat présumé » et heurter une partie de l’électorat choqué par les propositions de Donald Trump, ou le rejeter et s’aliéner l’électorat en colère qui s’est reconnu dans le message destiné à « rendre sa fierté à l’Amérique ».

Le sénateur républicain du Nebraska Ben Sasse a rappelé, mercredi matin, qu’il ne changerait pas de position. Il reste fermement opposé à Donald Trump, qui divise les Américains, sans pour autant appeler à voter pour Hillary Clinton. Il incarne une improbable troisième voie pour les électeurs tentés par le vote conservateur.

Le Weekly Standard, un hebdomadaire conservateur, critique les républicains et constate surtout que les leaders du GOP n’ont aucune solution à opposer à Donald Trump.

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