Présidentielle 2017 , les sondages dans le flou des candidatures

Présidentielle 2017 , les sondages dans le flou des candidatures

Le Monde
| 18.05.2016 à 08h15
Mis à jour le
18.05.2016 à 12h13
|

Par Adrien Sénécat

Qui seront les candidats alignés au premier tour de la présidentielle le 23 avril 2017 ‘ Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon à part, les représentants des principales forces politiques ne sont pas connus pour l’heure. Si bien que les instituts de sondage, qui tentent de prendre le pouls des électeurs à moins d’un an de l’échéance, doivent s’adapter aux différents scénarios possibles.

Prenons trois sondages d’intentions de vote pour le premier tour de la présidentielle 2017 publiés en avril. L’un réalisé par Elabe imagine huit cas de figure, un autre de TNS Sofres-Onepoint en teste cinq et le dernier par l’IFOP en propose pas moins de dix. A elles seules, ces études envisagent pas moins de 21 cas de figure différents (17 si l’on ne tient pas compte de la présence ou non de Jacques Cheminade). Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen, Nicolas Dupont-Aignan, Nathalie Arthaud ou encore Philippe Poutou y reviennent systématiquement. Ce n’est en revanche pas le cas du côté’

du Parti socialiste, où selon les hypothèses, on trouve les noms de François Hollande, Manuel Valls, Emmanuel Macron et Arnaud Montebourg’ et parfois plusieurs d’entre eux en même temps ;de la droite, qui organise sa primaire à l’automne, avec quatre noms en balance : Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, François Fillon et Bruno Le Maire ;du centre, où François Bayrou pourrait être candidat ou non, selon le nom du représentant de la droite ;des écologistes, où le nom de Nicolas Hulot est évoqué en plus de celui de Cécile Duflot.

Une galère pour les sondeurs

Cette situation n’est pas complètement inédite. Il est fréquent que l’offre politique ne soit pas encore figée à un an d’un scrutin présidentiel. C’était par exemple le cas en 2012, tant que la primaire socialiste n’avait pas désigné le candidat de la gauche. A ceci près que l’incertitude touche cette fois les deux bords de l’échiquier. En 2011, le nom de François Fillon, premier ministre à l’époque, était parfois testé, mais il était pratiquement acquis que Nicolas Sarkozy serait candidat à sa succession.

Tout cela n’aide pas vraiment les sondeurs dans leur tâche. D’abord, parce que multiplier les hypothèses coûte cher : « Il y a des économies d’échelle, mais le prix est quand même proportionnel au nombre de cas de figure testés », explique Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion de l’IFOP.

Ensuite et surtout, enchaîner les questions soulève des problèmes méthodologiques : jusqu’à combien d’hypothèses peut-on soumettre à un même sondé ‘ « Dix, c’est un maximum, si l’on veut avoir un regard d’ensemble à un moment donné. Mais il ne faut pas trop dépasser ce chiffre, parce qu’il peut y avoir un sentiment de lassitude » qui fausserait les réponses, reconnaît le sondeur.

Les « favoris » testés en priorité

Ce trop-plein d’information ne permet d’ailleurs pas forcément d’aller dans le détail des réponses. Des dix hypothèses testées par l’IFOP fin avril, la presse a par exemple surtout retenu que M. Juppé partait favori à chaque fois qu’il était aligné. « Quand on multiplie les chiffres, on multiplie la complexité », estime Yves-Marie Cann, directeur des études politiques chez Elabe. Quand il a testé huit hypothèses de premier tour, ce dernier a donc choisi de ne pas se pencher sur le second, pour rester lisible.

Comment les sondeurs choisissent-ils les noms qu’ils vont soumettre à l’opinion ‘ « A droite, on teste systématiquement les deux favoris, M. Juppé et M. Sarkozy, et dans la mesure du possible les deux challengers », explique Yves-Marie Cann. Les autres prétendants comme Nathalie Kosciusko-Morizet ou Geoffroy Didier, ne seront en revanche pas testés, à moins de décoller dans les intentions de vote pour la primaire.

« A gauche, malgré les incertitudes sur sa candidature, qu’il a liée à la baisse du chômage, M. Hollande reste le candidat naturel. Comme le contexte fait que le jeu apparaît quelque peu ouvert, on teste aussi M. Valls, parce qu’il est premier ministre. » M. Macron est quant à lui pris en compte à cause de sa cote de popularité et du fait qu’il n’exclut pas d’être candidat.

Mais les instituts de sondage ne peuvent pas inclure tout ce beau monde à chaque fois. Alors, ils font des choix : « La plupart du temps, on essaie de faire des comparaisons à périmètre constant, en testant par exemple tous les candidats à droite face à M. Hollande », raconte Jérôme Fourquet de l’IFOP. « L’intérêt, c’est de pouvoir faire apparaître la plus-value de tel ou tel candidat. »

Le cas Bayrou divise

Le cas de François Bayrou, néanmoins, complique encore la donne. Le centriste a dit à plusieurs reprises qu’il ne serait pas candidat à la présidentielle si Alain Juppé remportait la primaire de la droite. Ce qui veut dire qu’il devrait l’être si, par exemple, Nicolas Sarkozy était désigné.

Une position qui oblige les sondeurs à quelques contorsions. Par exemple, TNS Sofres teste l’option M. Sarkozy avec ou sans M. Bayrou au premier tour, mais n’imagine pas M. Juppé face au président du MoDem. L’IFOP fait l’inverse, en testant le choix maire de Bordeaux avec ou sans présence de M. Bayrou.

Elabe, en revanche, respecte scrupuleusement les déclarations du centriste, ce qui donne mécaniquement un score plus important à Alain Juppé qu’à l’ex-président.

« C’est un cas intéressant, admet Yves-Marie Cann. On peut nous reprocher de tester M. Bayrou avec M. Sarkozy et de ne pas le faire avec M. Juppé. Mais on procède de la sorte parce que c’est ce que l’homme politique dit. Si l’on faisait les choses différemment, on irait à l’encontre de ses déclarations. »

Preuve qu’il faut toujours regarder le détail d’une étude pour en tirer la moindre conclusion, tant les facteurs qui peuvent influencer le résultat sont nombreux.

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