On a retrouvé Benoît Caranobe le gymnaste devenu acrobate au Moulin Rouge

On a retrouvé Benoît Caranobe le gymnaste devenu acrobate au Moulin Rouge

« New York, New York ! » La voix de Franck Sinatra imprègne de son légendaire swing les entrailles du Moulin-Rouge. A plus d’une heure du début de la revue Féerie, qui tient l’affiche du mythique cabaret parisien de Montmartre depuis 1999, Benoît Caranobe profite de l’accalmie.

L’acrobate « soliste cancan » se rase puis s’essuie le visage. Sa serviette est un vestige d’une autre époque, celle où il remportait en 2008 la médaille de bronze au concours général de gymnastique des Jeux olympiques de Pékin. La première d’un gymnaste généraliste français depuis les deux médailles de Marco Torrès (argent) et Jean Gounot (bronze) en 1920 à Anvers, à une époque où seules quelques nations se partageaient les podiums.

Au chapitre de la reconversion, le Francilien de 35 ans se distingue également. La nuit, il est le premier sportif de haut niveau de l’histoire du Moulin-Rouge. Le jour, à notre connaissance, le seul à tenir une cave à vins. Depuis 2010, associé à son père, ce passionné de bons crus a en effet ouvert son magasin à Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis), à côté du marché couvert de la ville où il a fait toute sa carrière de gymnaste.

Ne voyez aucun désir de se mettre en valeur dans ces incongruités, Benoît Caranobe est plutôt du genre discret. La plupart des artistes, des danseuses et des danseurs du « Moulin » n’ont appris sa qualité d’« olympien » qu’à l’occasion de cet article. Les dirigeants de l’institution des nuits parisiennes l’ont eux aussi embauché sans rien connaître de sa gloire sportive passée. « Lors des auditions, j’étais juste un ancien gymnaste lambda, le petit ami d’Axelle. Ils l’ont su tardivement », confirme l’athlète de poche de 1,64 m.

Après un rendez-vous manqué avec les Jeux de Londres en 2012, le corps de Benoît Caranobe crie grâce, martyrisé par les blessures. L’année d’après, il prend sa retraite sportive. Mais la monotonie de sa nouvelle vie, expurgée brusquement d’une activité physique intense, le rend mélancolique. Sa petite amie, danseuse du Moulin-Rouge rencontrée lors d’un gala de gymnastique en 2012 à Montpellier, le comprend vite.« Malgré ma passion pour la cave, je ressentais un terrible manque d’adrénaline. Axelle m’a incité à tenter ma chance en tant que soliste remplaçant au Moulin. On a travaillé ensemble le solo que je devais présenter’ ».

Au-dessus du lot techniquement, le gymnaste s’adapte avec brio aux contraintes de la scène. Il faut d’abord choisir avec soin les acrobaties à réaliser sur une surface plus restreinte et surtout beaucoup plus dure que le praticable sur lequel se disputent les épreuves au sol. Une stratégie indispensable pour celui qui a subi sept opérations chirurgicales pendant sa carrière, dont cinq pour sa seule cheville. Heureusement pour lui, les souliers qu’il chausse pour ses représentations amortissent les chocs : « Ils viennent de chez Clairvoy, une maison spécialisée juste à côté. Ils sont faits sur mesure, au plus près du pied et en cuir battu pour renforcer le talon. »

Véronique Trinquet

12 juin 1980 Naissance à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne).

1985 Commence la gymnastique dans le club de Noisy-le-Grand.

2008 Médaillé de bronze au concours général individuel des Jeux olympiques de Pékin.

2010 Ouvre sa cave à vins à Noisy-le-Grand.

2013 Prend sa retraite de sportif de haut niveau.

2016 Acrobate soliste au Moulin-Rouge (depuis l’année 2014).

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