Les métiers méconnus du luxe et de la mode recrutent

Les métiers méconnus du luxe et de la mode recrutent

Un forum se tient mercredi à Paris sur les débouchés de ce secteur économique, dans lequel 10 000 emplois sont à pourvoir.

Le Monde
| 06.12.2016 à 06h48
Mis à jour le
06.12.2016 à 11h43
|

Par Caroline Rousseau

Travailler dans la mode et le luxe ne consiste pas seulement à devenir styliste ou directeur artistique’ Les métiers sont bien plus variés et les opportunités réelles, à condition de se débarrasser des clichés. « Avec les départs en retraite dus à la pyramide des âges, quelque 10 000 emplois sont à pourvoir dans le secteur des industries du textile et de l’habillement français », interpellent les organisateurs du forum « Les dessous de la mode », qui se tiendra mercredi 7 décembre après-midi à La Fabrique, 6-8 avenue de la Porte-de-Champerret, à Paris.

Cette école des métiers de la mode et de la décoration, qui dépend de la chambre de commerce et d’industrie de Paris Ile-de-France, a été créée il y a trois ans. Son objectif : offrir une alternative aux « métiers du marketing et de la création, qui sont saturés, pour valoriser des professions qui souffrent d’un vrai déficit d’image, donc d’attractivité », explique Chantal Fouqué, la directrice de a Fabrique, qui organise pour la première fois ce forum en partenariat avec les fédérations professionnelles, Pôle emploi’

En ligne de mire, les métiers techniques de l’habillement ou du cuir, la « fashion tech », mais aussi le merchandising et la vente, à l’heure où le secteur cherche à renouveler l’expérience du consommateur lorsqu’il se rend dans un magasin. « Entre 83 % et 90 % de nos élèves trouvent un emploi dans les six mois suivant l’obtention de leur diplôme », note Mme Fouqué.

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Le geste de la « roulotteuse »

Parce qu’on parle peu de ces débouchés, les candidats tâtonnent avant de trouver leur voie. « Pas une seule fois on ne m’avait parlé de merchandising au lycée, et personne ne m’avait présenté cette voie », explique à 23 ans, Valentin Gago, qui, après avoir décroché un bac pro, suit actuellement à La Fabrique une formation en merchandising en alternance chez Ikea.

« L’alternance m’a permis de travailler dans huit entreprises différentes et d’engranger des expériences professionnelles dans un but précis : monter un concept store de déco et textile à Carthagène, en Colombie, qui mêlerait artisanat sud-américain et français, explique le jeune homme, qui vit avec un salaire d’apprenti de 1 144 euros net. C’est peu, surtout pour vivre à Paris, mais quand je pense qu’au lycée je ne savais pas vers quel métier m’orienter je suis content du chemin parcouru. »

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Claire-Marie Brulé, 22 ans, a elle aussi découvert par hasard le métier qu’elle voulait faire. Alors qu’elle terminait à La Fabrique son bac pro tapisserie ameublement, elle a fini par intégrer la classe de sept apprentis qui, après l’obtention de leur CAP, intégreront, en CDI, Hermès, chez qui ils travaillent en alternance.

Hermès, qui a conclu neuf partenariats avec des écoles (dont La Fabrique) ainsi qu’avec les Compagnons du devoir, mesure la nécessité de faire connaître ses métiers si spécifiques. Courant novembre, le sellier a organisé à Paris un événement « Hors les murs » qui a attiré 43 000 visiteurs, parmi lesquels 180 élèves de primaire, collège et lycée, et 200 élèves d’école d’art et étudiants du supérieur. Ils ont pu regarder travailler une roulotteuse (un an de formation est nécessaire à la bonne maîtrise du geste qui permet de « finir » les bords des carrés Hermès), ou encore des maîtres verriers de la Cristallerie Saint-Louis (à travers un casque de réalité virtuelle).

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« Transfert des connaissances »

« Depuis 2015, et ce sera encore le cas en 2017, nous recrutons entre 150 et 200 artisans par an pour accompagner notre croissance et renouveler les départs à la retraite, précise Emmanuel Pommier, directeur général du pôle artisanal d’Hermès maroquinerie sellerie. C’est un travail de longue haleine mené avec Pôle emploi et les écoles. 

Pour susciter les vocations « On doit évoquer l’ambiance de l’atelier, rappeler qu’un artisan peut travailler au bureau d’étude, au prototypage, comme formateur, à l’étranger pour effectuer les réparations des sacs, ou être un jour promu contremaître, explique M. Pommier. Qu’ils aient un diplôme ou pas, les candidats motivés peuvent faire un beau parcours chez nous. On en voit aussi de plus en plus venir après une première expérience professionnelle en compta, un bac + 4 ou une licence de lettres, ils se lancent en assumant pleinement le choix d’un travail manuel ou technique. »

C’est le cas de Marion Duthoit, 25 ans, aujourd’hui en CDI. Bac ES et diplôme de l’Essec en poche, elle a opté pour une formation (niveau master) à l’Ecole supérieure des industries du vêtement (ESIV). « Après le bac, je voulais travailler dans la mode, mais pour y faire quoi ‘ Je l’ignorais. L’école de commerce semblait me fermer le moins de portes’ Mais en sortant, il a fallu que je me spécialise pour me différencier. Je me suis retrouvée à l’ESIV avec des étudiants aux profils variés. Le transfert de connaissances est précieux dans ces apprentissages. Certes, aujourd’hui mon travail n’est pas technique à proprement parler. Je fais le lien entre le service patronage et les ateliers qui produisent, je comprends les enjeux et parle le même langage que les équipes. Et je travaille dans la mode. »

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