Le livre des journalistes du  Monde  sur Hollande agace et amuse

Le livre des journalistes du  Monde  sur Hollande agace et amuse

S’il fait déjà le bonheur de la presse, le livre de confidences de François Hollande, qui paraît jeudi, ne remporte pas l’adhésion dans le cercle politique plus restreint des proches du candidat et de ses adversaires.

Le retour de Valérie Trierweiler et des « sans-dents »

L’ex-compagne du chef de l’Etat a publié, mercredi sur Twitter, un SMS qu’elle attribue à François Hollande daté de 2008, dans lequel il utiliserait l’expression « sans-dents ». L’expression avait fait scandale en 2014 lors de la publication de « Merci pour ce moment », le livre de Valérie Trierweiler.

« Je suis avec ma copine Bernadette dans une grande manifestation dans son canton. Je lui ai fait un numéro de charme. Mais tu ne dois pas t’inquiéter. Dans son discours, elle a fait un lapsus formidable. Rire général, même chez les sans-dents ». F. Hollande, 31/05/2005. 12 h 39, peut-on lire sur le compte Twitter de Mme Trierweiler.

Dans « Un président ne devrait pas dire ça », publié jeudi, M. Hollande qualifie de « trahison » la révélation de ce terme par son ex-compagne dans son ouvrage autobiographique.

« Un problème avec l’islam »

François Hollande évoque dans le livre « un problème avec l’islam » en France, où le président juge qu’« il y a trop d’arrivées » de migrants : des propos susceptibles de raviver un débat politique français obnubilé par l’immigration.

A la question de savoir s’il y a « trop d’immigration » en France, posée par les auteurs le 23 juillet 2014, le président aurait répondu : « Je pense qu’il y a trop d’arrivées, d’immigration qui ne devrait pas être là. »

« Ce n’est pas l’islam qui pose un problème, dans le sens où ce serait une religion qui serait dangereuse en elle-même, mais parce qu’elle veut s’affirmer comme une religion dans la République. Après, ce qui peut poser un problème, c’est si les musulmans ne dénoncent pas les actes de radicalisation, si les imams se comportent de manière antirépublicaine’ »

Interrogé sur le contenu de ce livre de plus de 600 pages, qui a, selon ses auteurs, été écrit après 61 rencontres avec le président, l’Elysée a précisé que « bien entendu, ces propos sont à replacer dans leurs contextes à chaque fois ».

La magistrature, « une institution de lâcheté »

François Hollande a rencontré, mercredi 12 octobre au soir, le premier président et le procureur général de la Cour de cassation, Bertrand Louvel et Jean-Claude Marin, après la publication de ses propos polémiques sur l’institution judiciaire.

En effet, il avait annoncé que la magistrature était « une institution de lâcheté (‘). C’est quand même ça, tous ces procureurs, tous ces hauts magistrats, on se planque, on joue les vertueux’ On n’aime pas le politique. »

Les deux plus hauts magistrats de France, qui avaient demandé cette entrevue, voulaient « essayer de comprendre » les commentaires rapportés dans le livre de confidences des journalistes du Monde. Ils doivent prononcer jeudi, à la Cour de cassation, un discours en réponse à ces déclarations, précise-t-on de source judiciaire.

Jean-Christophe Cambadélis minimise la portée de l’ouvrage

Interrogé en marge d’une conférence de presse devant l’Association des journalistes parlementaires, le premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, a estimé que « tout ceci n’intéresse pas forcément l’ensemble des Français, même si, je le comprends, ça intéresse le paysage médiatico-politique français ».

« Je pense qu’il vaut toujours mieux commenter soi-même que laisser commenter, surtout quand les commentaires ne sont pas amènes », a déclaré M. Cambadélis. « Je trouve ça pas trop mal d’avoir comme ça par petites touches (‘) l’ensemble de son action. Cela lui permet de se débarrasser de cette phase toujours complexe qui est celle du bilan », a estimé le numéro un du Parti socialiste, ajoutant que, « quand il se lancera s’il se lance , nous n’aurons plus à traiter de ces sujets ».

A la veille du premier débat télévisé de la primaire de la droite, M. Cambadélis a aussi souligné que c’était une manière « d’être dans l’agenda et de ne pas laisser la droite occuper totalement l’espace ». « Donc, tout cela me paraît plus intelligent qu’il n’y paraît », a-t-il glissé.

Stéphane Le Foll salue « un exercice de transparence »

Stéphane Le Foll, porte-parole du gouvernement et proche de François Hollande, a défendu un « exercice de transparence » dans la publication de nombreuses confidences.

« Les journalistes font leur travail et la liberté de la presse est une liberté essentielle. Le président de la République a des contacts, comme d’autres d’ailleurs, avec des journalistes qui posent des questions auxquelles on doit répondre », a déclaré M. le Foll lors du compte rendu du conseil des ministres.

Quid de la phrase sur le « problème avec l’islam » de la France ‘ « Aujourd’hui l’islam est utilisé par certains comme une revendication politique, idéologique voire terroriste de déstabilisation des démocraties et de la République française. On ne va pas non plus faire comme s’il n’y avait pas un problème : il y a un problème. En même temps il faut être capable de le surmonter », a argumenté M. Le Foll.

« Trop d’immigration » en France ‘ « La France, et les gouvernements de gauche, depuis trente ans, sont extrêmement vigilants à respecter le droit d’asile (‘) et en même temps à considérer qu’il faut maîtriser l’immigration », a-t-il rappelé.

Quant à la phrase sur « la femme voilée d’aujourd’hui (qui) sera la Marianne de demain », « c’est plutôt un message d’espoir » pour M. Le Foll.

Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France et candidat à la présidentielle 2017, a estimé mercredi que François Hollande « n’a pas été président de la République » et devrait « ne pas se représenter ».

Evoquant le livre des deux journalistes du « Monde », il a dénoncé : « Ce qui m’a le plus surpris c’est quand j’ai appris qu’il avait passé (‘) 61 rendez-vous, 10 dîners » avec les journalistes. « J’aurais préféré que M. Hollande fasse des dîners avec les ouvriers d’Alstom (‘), qu’il passe son temps à gouverner la France (‘) plutôt qu’à être le propre spectateur de son quinquennat », a-t-il poursuivi.

« Quand travaille-t-il ‘ », s’interroge Marine Le Pen

Mercredi, Marine Le Pen, candidate FN à la présidentielle, s’est dite « affligée » par les confidences de François Hollande dans le livre « Un président ne devrait pas dire ça », se demandant « quand travaille » le président, accusé de trop recevoir les journalistes.

« Je suis affligée, comme, je crois, l’est l’immense majorité des Français, car on se pose la question de comment le président de la République trouve autant de temps à accorder aux journalistes », a déclaré Mme Le Pen sur Radio Classique, s’étonnant des « dizaines et dizaines d’interviews » dont font état des livres de journalistes depuis fin août.

« Il est observateur de lui-même, ce n’est pas ce dont la France a besoin », d’après la présidente du Front national.

Le livre fait le bonheur de la presse, à défaut de remporter son adhésion, tant la « communication de gribouille » du chef de l’Etat déconcerte les observateurs.

« Presque 700 pages, nourries par 61 entretiens tout au long du quinquennat, dans lesquelles il commente (beaucoup) son action, se livre (un peu) et multiplie les piques », rend compte Pierre-Alain Furbury dans Les Echos à propos de l’ouvrage. Le Parisien revient largement sur « ces pages qui ébranlent la hollandie » et rapporte les jugements sévères des socialistes eux-mêmes : « consternant », « horrible », « pitoyable ».

Les avis des éditorialistes ne sont pas loin d’être aussi accablants. A droite, Guillaume Tabard, dans sa chronique du Figaro, estime qu’« en voulant jouer le jeu d’une présidence transparente, François Hollande n’est parfois pas loin d’exposer une présidence indécente à force d’être bavarde ».

A gauche, L’Humanité, sous la plume de Maud Vergnol, voit dans ces confidences « un nouveau jackpot pour Marine Le Pen et son Tous pourris’ ».

« Parlant comme un journaliste aux journalistes, le chef de l’Etat brode avec la vérité. Il construit son bilan sans se soucier de la réalité, raconte une histoire sans rapport avec ce que l’Histoire nous dit du quinquennat », assène Nicolas Beytout dans L’Opinion.

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