Fraude fiscale , Cahuzac parle de  train de vie  de sa banque de  transparence 

Fraude fiscale , Cahuzac parle de  train de vie  de sa banque de  transparence 

Pourquoi cacher son argent à l’étranger ‘ Pour maintenir le « train de vie » familial, a affirmé, lundi 12 septembre au tribunal correctionnel de Paris, l’ancien ministre du budget, Jérôme Cahuzac. Jugé depuis une semaine pour fraude fiscale et blanchiment, lui et son ex-épouse Patricia Cahuzac encourent jusqu’à sept ans de prison et un million d’euros d’amende.

« Je n’ai pas assumé que mes responsabilités politiques devaient avoir comme conséquence une diminution du train de vie de ma famille », a répondu M. Cahuzac au président qui l’interrogeait sur un retrait en liquide 20 800 euros selon la banque, 10 000 selon le prévenu en septembre 2011. Sous son nom de code, « Birdie », il se fait remettre en espèces, à Paris, cet argent prélevé sur son compte caché géré par la banque Reyl.

« L’électrochoc pour arrêter de frauder, c’est mon élection à la tête de la commission des finances » à l’Assemblée nationale en février 2010, dit-il. Un vent mauvais souffle alors sur le secret bancaire, qui se fissure jusqu’en Suisse. Le compte de l’ancien élu à la banque genevoise Reyl a pris en 2009 la route de Singapour, via des sociétés écran enregistrées à Panama ou aux Seychelles.

« Ma femme n’acceptait pas, ou en tout cas très mal, que je n’assume pas la moitié des dépenses familiales », « je n’ai pas su lever cette contradiction entre l’homme privé et l’homme public », a dit l’ancien ministre du budget, à l’origine du plus grand scandale politico-financier de l’ère Hollande.

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« Conscient de l’illégalité »

Dans l’après-midi, c’est l’ex-épouse du ministre déchu, Patricia Cahuzac, qui a décrit une fraude fiscale familiale ancienne et bien rodée : le couple était dès le début « conscient de l’illégalité » de ses pratiques.

Dermatologue à la maison, avec trois enfants, elle devient en 1996 spécialiste de l’implant capillaire à la clinique du docteur Pierre Pouteaux, chez qui opère déjà depuis six ans Jérôme Cahuzac. Mais le jeune chirurgien « s’ennuie horriblement », veut se consacrer à la politique et prépare les législatives, qu’il remportera en 1997.

« À la clinique, j’apprends la possibilité de déposer des chèques de patients anglais à l’île de Man. C’est le docteur Pouteaux qui nous donne ses secrets » avant de partir à la retraite, relate-t-elle.

Les époux en discutent et décident à leur tour d’envoyer les chèques à l’île de Man, via une société créée en janvier 1997 à Londres (Ellendale), sur un compte ouvert en mars à la Royal Bank of Scotland. « De même que je savais qu’il y avait un compte en Suisse sur lequel j’avais procuration , le compte à Man était pour nous deux, à nos deux noms », dit-elle.

Persona non grata

Elle ira « environ trois fois pas an » à Londres pour retirer du liquide, « 8 à 9 000 euros », souvent le week-end. Evoquant un retrait bien plus élevé, de 57 000 euros en 2007, le procureur demande si cet argent a pu servir à financer la campagne législative de monsieur. « Je ne crois pas. Je n’en ai aucun souvenir », répond-elle, visiblement étonnée.

En 2007, c’est une femme blessée qui décide d’ouvrir un compte en Suisse, à la BNP, « à l’insu » de son mari : « J’avais découvert que mon mari me mentait. Il n’y avait plus rien de solide dans mon couple. Ce n’était pas mon but de frauder, la discrétion a entraîné la fraude. » La filiale suisse de la banque française lui signifie en 2010 qu’elle est devenue persona non grata du fait des responsabilités politiques de son mari.

Ses avoirs suisses sont alors transférés à la banque genevoise Gonet. En 2011, un second compte est ouvert chez Gonet, pour gérer les avoirs anglais et suisses. Des avoirs estimés globalement à plus de 2,5 millions d’euros, qui ont notamment servi à acheter des appartements aux enfants à Londres.

« Transparence totale »

Dans la matinée, les responsables de la banque Reyl devaient aussi répondre de pratiques relevant en France du blanchiment de fraude fiscale. La remise d’argent en liquide à Jérôme Cahuzac fut une erreur « extrêmement dommageable », une « initiative » d’un employé qui a été « notifiée » en novembre 2013, alors que le scandale avait déjà éclaté, a souligné Thomas Fontaine, qui représente Reyl, jugée comme personne morale.

Le président l’a invité à « sortir des éléments de langage », se demandant si la banque genevoise avait « conscience » d’un éventuel problème autour de M. Cahuzac. « Il est difficile pour une personne morale d’avoir une conscience », répond M. Fontaine, défendant en revanche la « transparence totale » des pratiques de son établissement au regard de la loi suisse, qui ne condamne pas le blanchiment. « Nous n’avons plus aucun client européen non déclaré. Nous sommes en avance », a fait valoir M. Fontaine.

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