En Espagne les militants de Podemos rejettent une alliance avec les socialistes et les centristes

En Espagne les militants de Podemos rejettent une alliance avec les socialistes et les centristes

Le Monde
| 18.04.2016 à 06h45
Mis à jour le
18.04.2016 à 13h44
|

Par Sandrine Morel (Madrid, correspondance)

Plus de 88 % des militants de Podemos ont voté contre un soutien à l’investiture d’un gouvernement socialiste, selon les résultats présentés lundi 18 avril par le porte-parole du parti de la gauche anti-austérité, Pablo Echenique.

Avec ce résultat, ce sont les derniers espoirs qu’un gouvernement socialiste soit formé en Espagne avant le 2 mai, date limite avant la dissolution des assemblées, qui s’envolent. Sauf coup de théâtre, de nouvelles élections législatives devraient être convoquées le 26 juin en Espagne.

Depuis celles du 20 décembre 2015, qui ont accouché d’un Parlement très fragmenté avec l’irruption de deux partis forts, Podemos, à la gauche du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), et Ciudadanos, au centre, le pays vit un blocage politique.

Le chef du gouvernement en fonction, Mariano Rajoy, du Parti populaire (PP, droite), a rapidement abandonné l’idée de se présenter au vote d’investiture, faute de soutiens. Quant aux socialistes, ils ont échoué à obtenir la confiance du Parlement le 4 mars.

Pablo Iglesias a donné aux militants le dernier mot

Les dernières cartes se trouvaient entre les mains des militants de Podemos. Entre le 14 et le 16 avril, les 400 000 inscrits au parti étaient appelés à voter pour ou contre « un gouvernement basé sur le pacte Rivera-Sanchez ‘ », en référence à l’accord d’investiture, comportant 200 mesures sociales, économiques et politiques, signé entre le secrétaire général socialiste, Pedro Sanchez, et le président de Ciudadanos, Albert Rivera.

Cet accord qui dispose du soutien de 131 députés sur 350 a besoin de l’appui de Podemos. Or le parti de la gauche radicale, qui défend un gouvernement de coalition avec le PSOE, soutenu par les indépendantistes catalans en échange de la tenue d’un référendum d’autodétermination, s’y est opposé.

Mais pour ne pas être tenu responsable du blocage et de la tenue de nouvelles élections, le secrétaire général de Podemos, Pablo Iglesias, avait donné aux militants le dernier mot.

Participation record

Tout portait à croire que les inscrits allaient suivre les consignes de la direction du parti, qui s’est fortement mobilisée en faveur du non sur les réseaux sociaux. La participation a été très forte. Près de 150 000 personnes ont voté, dix fois plus que lors du dernier vote, en novembre 2015, qui portait sur le programme électoral de Podemos.

Les défenseurs d’un vote « pragmatique », souvent d’anciens électeurs du PSOE, prêts à soutenir l’accord avec Ciudadanos afin d’en finir au plus vite avec le gouvernement de Mariano Rajoy et commencer à mettre en place des mesures économiques et sociales de gauche, n’ont représenté que 11 % des votes.

A la deuxième question posée par Podemos, « Êtes-vous d’accord avec la proposition de gouvernement de changement que défend Podemos, En Comú podem et En Marea [le nom de ses alliances régionales en Catalogne et en Galice] ‘ », les militants ont voté oui à 91,8 %.

La « proposition » en question est celle d’un gouvernement de coalition du PSOE et de Podemos, qui obtiendrait le soutien de 169 députés.

Cependant, pour aboutir à une investiture, cette formule devrait aussi obtenir le soutien de Ciudadanos, qui s’oppose à ce que Podemos entre au gouvernement, ou bien l’appui des indépendantistes catalans. Or, ces derniers posent comme condition sine qua non la tenue d’un référendum d’autodétermination, auquel s’oppose le PSOE.

Les militants de Podemos ont renforcé la ligne officielle défendue par Pablo Iglesias, qui considère qu’il vaut mieux aller à de nouvelles élections plutôt que soutenir un programme qui n’est pas celui de Podemos et un gouvernement dans lequel le parti de la gauche radicale n’entrerait pas.

Beaucoup ont l’espoir qu’une coalition puisse êtrescellée entre Podemos et les écolo-communistes de la Gauche unie (IU Izquierda Unida, en espagnol), qui pourrait leur permettre de devancer les socialistes et obtenir une majorité de gauche plus claire.

Ils sont prêts, pour cela, à prendre le risque de voir le PP et Ciudadanos, annoncé en forte hausse dans tous les sondages, obtenir à eux deux la majorité absolue au Parlement.

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