En Argentine de nouvelles enquêtes pour corruption contre l’ex-présidente Cristina Kirchner

En Argentine de nouvelles enquêtes pour corruption contre l'ex-présidente Cristina Kirchner

Le Monde
| 14.09.2016 à 11h41
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Par Christine Legrand (Buenos Aires, correspondante)

La saga judiciaire impliquant l’ancienne présidente péroniste Cristina Fernandez de Kirchner dans plusieurs affaires de corruption a connu de nouveaux rebondissements. L’organisme officiel chargé de détecter des mouvements de blanchiment d’argent, l’Unité d’information financière (UIF), a réclamé vendredi 9 septembre à la justice fédérale de placer sous séquestre tous les biens figurant dans la succession de l’ex-président Néstor Kirchner (2003-2007), décédé en octobre 2010, et auquel sa femme, Cristina, a succédé de 2007 à 2015.

Et cela, pendant toute la durée de l’instruction engagée contre Mme Kirchner pour enrichissement illicite et blanchiment d’argent.

Sur Twitter, Cristina Kirchner a répondu en accusant le gouvernement de centre droit de Mauricio Macri « de persécuter et d’attaquer ceux qui ne sont plus là et ne peuvent pas se défendre ». « Le désastre économique provoqué par ce gouvernement est chaque jour tellement plus grand que, pour tenter de le dissimuler, il ne lui est plus suffisant de m’attaquer », a-t-elle ajouté.

Comptes bancaires gelés

Depuis l’arrivée au pouvoir de M. Macri, le 10 décembre 2015, l’étau judiciaire ne cesse de se resserrer sur la famille Kirchner. Les comptes bancaires de l’ex-présidente ont également été gelés. Les biens des enfants de l’ancien couple présidentiel, Maximo, député, et sa s’ur cadette Florencia pourraient bientôt être concernés.

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Deux procureurs ont demandé et obtenu l’ouverture d’enquêtes visant à démontrer l’existence d’un « schéma de corruption » destiné à vider les caisses de l’Etat moyennant des projets fictifs de travaux publics. Julio de Vido, ancien ministre des travaux publics, est lui-même accusé d’enrichissement illicite. L’ex-présidente et lui devront témoigner devant la justice le 20 octobre.

A Buenos Aires, la députée de gauche Margarita Stolbizer, à l’origine des dénonciations les plus retentissantes contre Mme Kirchner, est devenue la star de la lutte contre la corruption. Après avoir souffert une cuisante défaite lors de la présidentielle d’octobre 2015, où elle était arrivée en 5e position avec à peine 2,5 % des voix, elle occupe désormais le devant de la scène.

« J’accuse »

Elle vient de publier un livre au titre révélateur, Yo acuso (« J’accuse », non traduit). Sur 430 pages nourries de documents et de témoignages, elle épluche « la structure de corruption » des gouvernements Kirchner. MMes Kirchner et Stolbizer se sont côtoyées, en 2000, à l’époque où elles étaient toutes les deux députées et intégraient une commission parlementaire chargée d’enquêter, justement, sur le blanchiment d’argent.

L’enquête de Mme Stolbizer sur Cristina Kirchner, explique la députée au Monde, est issue d’un travail « personnel » et non pas de fuites judiciaires. C’est presque « par hasard », dit-elle, qu’en examinant la déclaration d’impôts de Mme Kirchner son attention « a été attirée par une participation actionnaire dans la compagnie Hotesur SA », propriétaire de luxueux hôtels en Patagonie, fief des Kirchner.

Constatant des « irrégularités », elle a découvert une relation « suspecte » entre des entrepreneurs ayant des contrats avec l’Etat et « un complexe hôtelier présentant des contrats et des revenus d’origine douteuse ». Elle a trouvé par la suite des irrégularités semblables au sein d’une autre société qui gère de nombreuses propriétés appartenant à la famille Kirchner.

Mme Kirchner a engagé un procès pour diffamation contre elle. Traitée « d’âne » sur les réseaux sociaux par l’ex-présidente, Margarita Stolbizer s’est transformée en une figure médiatique que se disputent le président Macri et le péroniste dissident Sergio Massa, lui aussi candidat malchanceux à la présidentielle, à la tête du Front rénovateur, antikirchnériste.

Ils rêvent tous deux de la convaincre d’être candidate au Sénat en 2017. Dans un pays où la corruption est perçue comme un des plus graves fléaux, Mme Stolbizer bénéficie d’une image de probité et de travailleuse acharnée qui l’a rendue populaire.

« La société le réclame »

Margarita Stolbitzer est confiante. Cristina Kirchner « peut être condamnée, car les délits sont avérés et les preuves aussi ». « La société le réclame », ajoute la députée, qui qualifie la gestion des Kirchner comme « la plus corrompue de l’histoire démocratique argentine ».

Affirmant « n’envisager aucune alliance électorale pour le moment », elle est reconnaissante au président Macri d’avoir « changé le climat politique, de promouvoir la coexistence et de respecter toutes les opinions ».

Elle signale toutefois des erreurs, « un manque de politique », estimant malgré tout qu’on « ne peut demander au gouvernement de résoudre en neuf mois le désastre laissé par les gouvernements des douze dernières années ».

Margarita Stolbizer considère toutefois que « le gouvernement devrait expliciter un plan et une stratégie économiques pour résoudre les trois principaux problèmes reçus en héritage : récession, inflation et pauvreté ».

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