Ces autres affaires qui ont miné des campagnes présidentielles

Ces autres affaires qui ont miné des campagnes présidentielles

De Pompidou à Chirac, les affaires ont, sous la Ve République, régulièrement interféré avec les agendas électoraux.

1969 : Pompidou face à l’affaire Markovic

Nous sommes au début de l’année 1969. Georges Pompidou et sa femme Claude se retrouvent mêlés malgré eux à l’affaire Markovic, du nom de l’ancien garde du corps d’Alain Delon, retrouvé assassiné dans une décharge publique en octobre 1968. Alors que l’enquête piétine, une rumeur laisse entendre que Claude Pompidou pourrait être à l’origine du meurtre de ce play-boy yougoslave, qui l’aurait fait chanter avec des photos d’elle prises lors de parties fines.

L’affaire est d’autant plus embarrassante que Georges Pompidou, qui a quitté Matignon en juillet 1968, apparaît, à droite, comme le candidat le plus plausible à la succession du général de Gaulle. Dans l’entourage du Général, on ne voit pas forcément d’un bon il cette candidature. Pour ses rivaux, l’affaire est donc une aubaine. La justice s’est vite rendue compte que ces clichés étaient des faux et que Mme Pompidou n’avait rien à voir avec cette histoire sordide. En dépit de ce qui apparaîtra comme une machination, l’ancien premier ministre du général de Gaulle à qui il tiendra rigueur de ne pas avoir défendu son honneur est élu président, le 15 juin 1969.

1974 : Chaban Delmas et ses impôts

C’était bien avant l’obligation pour les ministres de rendre public leur patrimoine. En janvier 1972, Jacques Chaban-Delmas est à Matignon depuis deux ans et demi, quand Le Canard enchaîné publie sa feuille d’impôt et révèle qu’il n’a pas versé un centime au titre de l’impôt sur le revenu de 1967 à 1970, période au cours de laquelle il a été président de l’Assemblée nationale, puis premier ministre.

Cette affaire vient entacher l’image d’un homme politique déjà écornée par une affaire précédente. Quelques mois plus tôt, l’hebdomadaire avait déjà révélé qu’il avait bénéficié d’un taux d’imposition bien inférieur à la normale pour des revenus pourtant importants, cumulant l’effet de plusieurs avantages fiscaux. Les révélations du Canard contribueront, deux ans plus tard, à miner sa candidature à l’élection présidentielle. Il termine troisième avec 15,1 % des suffrages.

1981 : les diamants de Giscard

Le 9 octobre 1979, Valéry Giscard d’Estaing est au pouvoir depuis un peu plus de cinq ans et demi quand Le Canard enchaîné titre « Quand Giscard empochait les diamants de Bokassa », à moins de deux ans de l’élection présidentielle. En cause : une plaquette de diamants de 30 carats environ, cadeau de l’ancien empereur de Centrafrique, que M. Giscard d’Estaing a reçue six ans auparavant, alors qu’il était ministre des finances. A l’époque, la valeur du cadeau est estimée à un million de francs.

Le président peine à s’expliquer sur ce cadeau embarrassant. Il refuse d’abord de répondre, avant d’opposer, aux questions sur la valeur de ces cadeaux, un « démenti catégorique » et « méprisant ». Le 10 mars 1981, il tente une explication à la télévision : « Ce n’était pas du tout, comme on l’a dit, des diamants, c’est-à-dire de grosses pierres ayant une grande valeur et que l’on pouvait garder pour soi. » Las, l’affaire lui colle à la peau. Deux mois plus tard, François Mitterrand est élu et le remplace à l’Elysée.

1995 : la plus-value de Balladur

Outre l’affaire Schuller-Maréchal, dossier politico-financier, dans lequel Edouard Balladur, installé à Matignon, a dû admettre avoir avalisé un placement sous écoute administrative illégal, l’ancien premier ministre, qui est candidat à l’Elysée, est lui aussi, en mars 1995 attaqué sur son patrimoine en pleine campagne.

Le Canard enchaîné, toujours lui, révèle qu’il a réalisé une importante plus-value en revendant des actions de la société GSI pour laquelle il a travaillé. Il avait souhaité se défaire de ces actions quand il est devenu ministre en 1986 puis premier ministre en 1993. Un acte qu’il avait pensé comme une preuve de probité puisque rien ne lui interdisait d’être propriétaire de ces actions en tant que ministre mais qui finit par se retourner contre lui en pleine campagne. Son incroyable popularité de janvier 1995 chute en flèche. Il ne parvient finalement pas à se qualifier pour le second tour de la présidentielle auquel accèdent Jacques Chirac et Lionel Jospin.

2002 : les billets d’avion de Chirac

Le 5 mai 2002, Jacques Chirac que « Les guignols de l’info » ont alors baptisé « Supermenteur » , réussit à se faire réélire président, malgré un climat de turpitudes loin de lui être favorable. Les juges traquaient l’ancien maire de Paris et ancien patron du RPR. Entre autres affaires, il était accusé de s’être fait offrir, au profit de lui et ses proches, pour 400 000 euros de billets d’avion et de frais de déplacement au début des années 1990.

Son adversaire socialiste, Lionel Jospin, avait tenté d’en faire un argument de campagne. Pour se sortir de l’ornière, M. Chirac avait mimé l’outrage et violemment contre-attaqué. On connaît la suite : au second tour, il est opposé à Jean-Marie Le Pen, face à qui il s’impose avec plus de 80 % des suffrages.

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2007 : l’ancien appartement de Sarkozy à Neuilly

Alors qu’il peine, depuis 2004, à se défaire des soupçons de l’affaire Clearstream à partir d’affirmations qui seront finalement fausses , Nicolas Sarkozy affronte pour sa première campagne présidentielle, une autre affaire. Nous sommes le 28 février 2007, soit deux mois avant le premier tour de la présidentielle.

Le Canard enchaîné affirme que celui qui est alors ministre de l’intérieur et candidat UMP à l’élection, aurait acquis, en 1997, dans des conditions fort avantageuses un appartement situé sur l’île de la Jatte, à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), commune dont il était maire, du fait de la proximité qui existait, à cette époque, entre le promoteur et la mairie de Neuilly. En outre, M. Sarkozy n’aurait réglé qu’une partie réduite des travaux du duplex. Le rabais obtenu se chiffrerait à 300 000 euros, selon l’hebdomadaire satirique qui affirme également qu’en revendant l’appartement le couple Sarkozy avait alors réalisé une importante plus-value.

L’intéressé dément fermement, se posant en victime d’allégations qui n’auraient pour but « que de [l]e salir » à quelques mois de la présidentielle. « L’affaire » des conditions d’acquisition de son ancien appartement ne l’empêchera pas de remporter l’élection face à Ségolène Royal, elle aussi contrainte de se débarrasser d’une rumeur l’ayant amenée à publier son patrimoine.

2007 : Royal a-t-elle cherché à éviter l’ISF ‘

En janvier 2007, une rumeur selon laquelle le couple Royal-Hollande utiliserait une société civile immobilière pour échapper à l’ISF commence à se propager. Un député UMP les en accuse publiquement dans la presse.

Pour faire taire la rumeur, la candidate socialiste à la présidentielle décide de rendre public le détail de son patrimoine, et invite son adversaire Nicolas Sarkozy à faire de même. Elle souligne n’avoir jamais cherché à s’exonérer de l’ISF, dont elle s’acquitte avec son compagnon. Celle qui n’entend pas « se laisser faire par ces intimidations » défend un patrimoine constitué « en partant de rien » et dénonce une « campagne de racaille » de l’UMP, tandis que M. Hollande porte plainte pour diffamation contre le député UMP. Mais à peine trois mois plus tard, le Canard Enchaîné épingle le couple, affirmant qu’ils auraient sous-estimé de moitié leur patrimoine et qu’ils auraient ainsi dû s’acquitter d’une somme sept fois supérieure au titre de l’ISF.

Reste que ces deux affaires concernant Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal n’imprimeront pas autant leur marque sur la campagne de 2007, que d’autres auparavant.

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