#BrexitOrNot , Le fonctionnement de l’UE est-il compatible avec les principes du Royaume-Uni

#BrexitOrNot , Le fonctionnement de l'UE est-il compatible avec les principes du Royaume-Uni

PAROLES D’ELECTEURS

Ce salarié des télécoms est affolé par la teneur de la campagne sur le référendum, qu’il trouve « dangereuse », un adjectif qu’il ne cesse de répéter dès qu’il évoque le camp en faveur du « Brexit ».

C’était le dernier chat de cette journée spéciale consacrée aux enjeux du référendum sur le « Brexit ».

La discussion avec Catherine Marshall est terminée, merci à tous pour vos questions.

La perspective que vous proposez ici, tant sur la souveraineté du Parlement britannique que sur le sentiment européen au-delà de la seule participation au marché unique, ne reflète-t-elle pas exclusivement l’attitude dominante dans la nation anglaise terokà 16:16Catherine Marshall : « En effet, l’Ecosse est majoritairement pro-européenne et en particulier les 54 députés aux Communes du SNP (Scottish National Party) sont tous pro-européens. En Irlande du Nord, la nation est partagée entre, d’un côté, les nationalistes qui sont dans le camp pro-européen et les unionistes (huit députés aux Communes), qui sont en faveur du « Brexit ». Le Pays de Galles est généralement pro-européen, mais, on le voit, même si les partisans du « Brexit » sont particulièrement présents dans le sud de l’Angleterre, une grande partie de la nation se retrouve dans cette idée. 

Selon le sondage YouGov d’hier, avec un taux de participation de 80 %, 42 % des électeurs du Royaume-Uni seraient favorables au maintien au sein de l’UE, 44 % seraient en faveur du « Brexit » et 9 % seraient indécis. Et c’est sur ces derniers que tout va se jouer. Quoi qu’il arrive, on le voit bien, le Royaume-Uni reste divisé à deux jours du scrutin.

« In » ou « out » A l’approche du référendum sur l’avenir du Royaume-Uni dans l’Europe, la presse britannique affiche son opinion sur le sujet. Dans un pays où il est commun que les journaux donnent leur position avant un vote, la majorité de la presse s’est positionnée en faveur d’un « Brexit ».

Catherine Marshall: « La campagne a été d’une grande violence, et n’a pas permis d’aborder ce genre de questions. Ce qui a dominé, c’est avant tout les grandes questions liées à l’immigration, à la crise économique, et au droit pour le Royaume-Uni de s’auto-gouverner, alors que les vraies questions liées au fait qu’il est difficile d’avoir une démocratie directe au sein de l’Union européenne ont été éludées. 

Il y a une vraie méfiance envers les élus européens, puisque la critique qui revient est toujours celle de la légitimité démocratique des instances européennes (c’est en particulier le point de vue de Nigel Farage, le leader du UKIP, et de Boris Johnson, ancien maire de Londres). La presse en particulier, qui n’est pas du tout pro-européenne (à l’exception du Guardian), a joué un rôle non négligeable dans le traitement de ces questions, alors qu’elle aurait pu faire davantage oeuvre de pédagogie. » 

La discussion avec Catherine Marshall se termine dans quelques minutes, le temps pour elle de répondre à une ou deux dernières questions.

Catherine Marshall: « La Cour suprême créée en octobre 2009 ne peut pas être considérée comme une cour constitutionnelle, mais est plutôt l’équivalent de notre Cour de cassation. La Constitution britannique est non codifiée et repose sur cinq sources : le droit européen, la législation votée au parlement, la Common Law (la prérogative royale s’y trouve), les conventions non écrites, et les ouvrages constitutionnels qui servent de référence (par exemple, Erskine May). Seul le parlement est souverain et il peut défaire toutes les lois votées par une législature précédente. Depuis la dévolution en 1998, le principe de la souveraineté du parlement a été un peu remis en question, mais le parlement est toujours le lieu historique du débat national où tout se décide. »

Catherine Marshall: « Effectivement, c’est bien la vraie question. David Cameron a joué un drôle de jeu, se montrant ‘pro-européen’ pragmatique au sein du royaume, et presque eurosceptique avec ses partenaires européens, au point d’être difficile à comprendre. Dès 1973, ce qui intéressait les Britanniques, c’était le marché commun, au point même qu’au moment du référendum de 1975, Margaret Thatcher était en faveur de rester au sein de la CEE (Communauté économique européenne). 

Les Britanniques étaient attachés à l’idée d’un marché commun qui répondait à leur vision libérale, à leur désir de libre-échange, à l’antirégulation, et c’est pourquoi aussi ils ont toujours été en faveur d’un élargissement de l’Europe. Dans cette campagne, il n’a jamais été question de ‘désir d’Europe’, les ‘pro-européens’ ne le sont que par pragmatisme pur, et ne comprennent pas le projet européen. Très peu d’hommes politiques sont sincèrement pro-européens, à part les libéraux-démocrates, qui ne sont plus que huit à la Chambre des communes. »

Catherine Marshall: « En France, le principe de souveraineté est important, mais, si jamais les Britanniques votaient pour le « Brexit » jeudi, il serait inenvisageable de vivre ce que nous avons vécu en France après le vote sur le Traité de Lisbonne, à savoir que les parlementaires ne suivent pas l’opinion de la nation. Stephen Kinnock, député aux Communes travailliste, et fils du leader des travaillistes Neil Kinnock (de 1983 à 1992), a affirmé il y a quelques semaines qu’en cas de « Brexit » les députés aux Communes, en majorité pro-européens, pourraient s’opposer au vote de la nation. La réaction a été immédiate, une telle décision – comme celle que nous avons vécu en France en 2005 – amènerait une révolution dans le royaume. En revanche, la question du référendum pose problème puisque, si le parlement est souverain et qu’il représente la nation, on peut se demander pourquoi David Cameron y a eu vraiment recours. » 

Catherine Marshall: « D’un point de vue européen, et encore plus d’un point de vue outre-Atlantique, votre question est tout à fait pertinente. Il est difficile de comprendre la décision de ce référendum sans revenir sur l’histoire difficile des relations entre le Royaume-Uni et l’Europe depuis 1973 (et même avant, depuis les deux vetos de 1963 et 1967). 

Il y a toujours eu, du point de vue des Britanniques, une méfiance envers le projet européen, qui, dans son préambule au Traité de Rome en 1957, indiquait qu’il souhaitait ‘une Union sans cesse plus étroite’. Cette idée-là est contraire à l’idée de souveraineté parlementaire et, par extension, contre l’esprit même de la nation. C’est une nation à la mentalité insulaire pour qui l’indépendance prime avant tout. Cet esprit est lié à son histoire et à cette fierté d’avoir toujours su défendre son indépendance. »

Catherine Marshall: « La Chambre des lords n’est pas l’organe décisionnel puisque ce pouvoir relève de la Chambre des communes et des députés aux Communes élus par le peuple au moment des élections législatives. Depuis les changements constitutionnels sous le gouvernement New Labour de Tony Blair après 1997, la Chambre des lords n’a plus que 92 ‘pairs héréditaires’ et le reste de la Chambre est constitué de ‘pairs non-héréditaires’, qui représentent tous les bords politiques de la nation. Leur rôle est de réviser les lois et d’émettre des avis qui permettent aux députés aux Communes de mieux les voter. La Chambre des lords n’a plus qu’un seul veto, celui de refuser que la Chambre des communes vote une prolongation de son mandat. »

Catherine Marshall: « Selon le constitutionnaliste victorien A.V. Dicey, il y a deux grands principes de la Constitution non-codifiée britannique : la souveraineté parlementaire et la suprématie du droit. Depuis la glorieuse révolution de 1688, le pouvoir du parlement s’est affirmé par rapport au pouvoir de la Couronne. A partir du 19e siècle, plusieurs constitutionnalistes, Bagehot et Dicey en particulier, ont expliqué que la suprématie des lois du royaume votées par le parlement était l’édifice sur lequel reposait la Constitution. Cela signifie que seul le parlement peut faire et défaire les lois, et nulle autre institution ne peut se substituer à lui. Le parlement est souverain parce qu’il représente la nation, c’est donc bien une démocratie parlementaire, et cette souveraineté parlementaire ne peut pas se partager. C’est pourquoi la primauté du droit communautaire européen pose problème aux Britanniques. » 

Pour Pauline Schnapper, professeure de civilisation britannique contemporaine à l’université Sorbonne-Nouvelle Paris-III, le Royaume-Uni pense ne pas avoir besoin du continent pour survivre. 

Catherine Marshall: « C’est la vérité, la campagne a éludé les vraies questions, à savoir pourquoi l’Union européenne est perçue comme un bouc émissaire par un grand nombre de Britanniques. Les vraies questions, à savoir pourquoi il y a un problème au sein de l’Union européenne, un déficit démocratique, mais pourquoi aussi les idéaux de solidarité sont oubliés, et pourquoi le Royaume-Uni avait besoin d’un référendum pour trancher cette question. Toutes ces questions sont passées derrière l’économie et l’immigration. La question de la souveraineté nationale n’a elle-même pas forcément été correctement abordée. »

La discussion avec Catherine Marshall va débuter dans deux minutes, elle répond à vos questions sur la souveraineté britannique.

PAROLE D’ELECTEURS

Après avoir beaucoup hésité, cette commerçante de Leeds s’apprête à glisser un bulletin « leave » dans l’urne.

Pendant un match de cricket entre l’Angleterre et le Sri Lanka, à West Bridgford, le 21 juin (Ed Skyes/Reuters).

 

L’historien britannique Robert Tombs, spécialiste de la France du XXe siècle et de la Commune de Paris, penche en faveur du « Brexit ». Il rappelle que l’adhésion des Britanniques s’est faite dès l’origine à reculons. Selon lui, aujourd’hui, l’attachement à l’idée d’indépendance (le self government) et le rejet d’une Europe fédérale restent forts pour les Britanniques. (A lire en édition abonnés)

La question de la souveraineté

Si les problématiques liées à l’économie et à l’immigration semblent être au c’ur des préoccupations des électeurs, la question de la souveraineté nationale est centrale dans le débat, relève Catherine Marshall, maître de conférence en civilisation britannique.

Selon elle, croire que des hommes politiques européens non élus par les Britanniques puissent prendre des décisions à leur place est contraire aux principes du Royaume Uni. Ne pas comprendre ce principe c’est ne pas comprendre les racines de la vie politique britannique. 

Catherine Marshall répond à vos questions dans une vingtaine de minutes, vous pouvez commencer à les lui poser.

PAROLES D’ELECTEURS

Ce militant écossais du Parti conservateur arbore sur son navire le drapeau de la campagne pour la sortie de l’UE.

Vous pourrez poser vos questions à Catherine Marshall, maître de conférences en civilisation britannique à Science Po Saint-Germain-en-Laye.

Le prochain chat débutera à 15 h 30. Il portera sur la question de la souvraineté, chère aux Britanniques.

La discussion avec Cécile Ducourtieux est terminée, merci pour vos questions. Retrouvez l’intégralité de ce chat bientôt sur le Monde.fr.

Cécile Ducourtieux: « Il y a une voix qui commence à émerger, celle de Donald Tusk, le président du Conseil européen, ex-premier ministre de la Pologne, et qui aujourd’hui a un discours très réaliste et pragmatique sur l’Union, qui lui a l’avantage d’être un discours que peuvent entendre les pays de l’Est, qui ne conçoivent pas l’Union comme un projet politique mais économique. 

Donald Tusk dit depuis plusieurs mois qu’il faut arrêter avec les utopies fédérales parce que les peuples n’en veulent pas, et qu’il faut essayer d’avancer sur ce que nous avons, c’est-à-dire le marché commun, les valeurs démocratiques, et avancer dans la sécurité, une des grandes préoccupations des citoyens de l’Union. Aujourd’hui ce discours porte auprès des dirigeants européens et le rêve des Etats-Unis d’Europe est désenchanté. » 

Cécile Ducourtieux: « Il y a une vraie prise de conscience chez les dirigeants européens que l’Europe va très mal et que le lien avec les citoyens a été en partie rompu et, quelle que soit l’issue du vote, il faut que cela change. Si les Britanniques partent, certains espèrent encore l’avènement de l’Europe à deux vitesses, qui est une vieille idée, maintes fois remise sur la table, mais en fait la réalité politique aujourd’hui laisse peu d’espoir à ce scénario. Sachant que les pays fondateurs de l’Union divergent énormément sur leur manière d’appréhender son avenir. 

On voit par exemple que la France et l’Allemagne n’arrivent pas à se mettre d’accord ne serait-ce que sur l’avenir de l’eurozone. Et il y a des pays comme les Pays-Bas, où l’extrême droite est forte, qui sont l’un des pays fondateurs, et qui ont peu en commun avec l’Italie par exemple, autre pays fondateur, dans leur manière d’appréhender l’avenir de l’Union. Cette idée d’une Europe au sein de laquelle il y aurait un noyau dur des pays fondateurs et une périphérie avec des pays arrivés plus tard qui n’auraient pas le même objectif politique à long terme, cette idée aujourd’hui on n’y croit plus trop, parce que les pays fondateurs n’ont plus les mêmes objectifs politiques. Ils ont tous des partis souverainistes en leur sein qui les obligent à des agendas politiques pas très pro-européens. »

PAROLES D’ELECTEURS

Anna Breskal est une étudiante anglaise de 21 ans. Grâce au programme Erasmus, elle a passé un an à Paris et craint pour son avenir en cas de « Brexit ».

Cécile Ducourtieux: « A priori, Erasmus sera fini pour les étudiants européens qui veulent étudier dans les prestigieuses universités britanniques, à moins que, dans ces négociations de divorce, les parties décident de maintenir la possibilité de ces programmes. Erasmus étant considéré comme un acquis important, un des rares effets positifs de l’UE pour une grande partie de l’opinion publique, il n’est pas impossible que, dans la négociation, les parties essayent de maintenir la possibilité de ces programmes d’échange, mais dans les textes ils tomberont. Il sera toujours possible d’étudier au Royaume-Uni, mais sans les avantages octroyés par Erasmus. »

Cécile Ducourtieux: « Quelle que soit la victoire du ‘Remain’, l’UE s’est engagée auprès de Londres à l’autoriser à mettre des freins à l’installation de travailleurs européens, en leur refusant l’accès aux droits sociaux. L’Union s’est engagée à mettre en oeuvre ces mesures si c’est le ‘Remain’ qui l’emporte. Bruxelles ne peut pas éditer une législation pour un pays en particulier mais dans les faits c’est ce qui sera fait. Elle fera une directive mais fera en sorte dans l’écriture qu’elle ne puisse être mise en oeuvre que par le Royaume-Uni, pour éviter que, en faisant une exception pour eux, on entame de manière grave l’égalité de traitement des citoyens de l’Union et la libre circulation des travailleurs. » 

Cécile Ducourtieux: « Cela ne tient qu’à lui. Espérons que le Royaume-Uni viendra avec un vrai projet pour faire avancer l’Union. Mais on peut d’ores et déjà anticiper qu’il ne s’agira pas d’un projet pour intégrer davantage politiquement l’Union. Ce n’est pas du tout l’agenda britannique. Ils souhaiteront probablement que l’on accélère les négociations du Tafta, le traité de libre-échange avec les Etats-Unis. Ils encourageront la formation d’un vrai marché unique du numérique, qui n’existe pas du tout aujourd’hui. Ils seront aussi moteur dans les négociations pour faire disparaître les dernières frontières liées à la circulation des capitaux dans l’Union. Mais par contre on peut penser qu’ils décourageront les velléités d’aller vers une Europe fédérale. Plus d’intégration, mais une intégration économique et financière, pas une intégration politique. »

Cécile Ducourtieux: « Aujourd’hui, personne n’est capable de répondre précisément à cette question, d’où les inquiétudes des fonctionnaires européens britanniques. Quand on lit les textes, pour être fonctionnaire européen, il faut être ressortissant d’un pays de l’UE. Donc, rien n’empêcherait les institutions de l’Union de prendre acte du « Brexit » et de licencier les quelque 1 500 fonctionnaires européens de nationalité britannique. Mais les syndicats et les dirigeants des institutions pour l’instant parient plutôt sur une négociation, là encore entre Londres et les institutions pour, espèrent-ils, préserver l’essentiel des postes, assurer le paiement des retraites, et assurer le paiement des fonctionnaires qui pourraient rester en poste. Ce qu’anticipent les syndicats, c’est une négociation où l’on va préserver l’essentiel des postes et déterminer qui va continuer à payer les fonctionnaires qui restent. 

Ce qu’on anticipe, mais personne ne peut l’assurer à 100%, c’est que les fonctionnaires de grade inférieur pourront rester, que ceux qui sont en fin de carrière resteront sûrement parce que ces gens là ont la plupart du temps fait leur carrière à Bruxelles et n’ont probablement pas du tout envie de repartir. Par contre, les jeunes qui ont leur carrière devant eux n’auront probablement pas envie de rester dans une institution qui leur sera, quelque part, hostile, et où ils n’auront plus de perspectives de carrière. »

Cécile Ducourtieux : « C’est jamais blanc ou noir, c’est toujours un compromis. Les dirigeants des institutions de Bruxelles sont très, très inquiets d’une contagion à d’autres pays de l’Union européenne. Ils ont peur d’une désintégration de l’Union. Pour éviter cela, de leur point de vue, il faut absolument une négociation dure avec Londres, ne pas lui faire de cadeaux. Si on commence à en faire, à négocier une relation avec Londres sans contrepartie – ce qui est la grande demande des Brexiters -, c’est-à-dire sans payer sa part au budget européen, c’est le début de la fin de l’Union, parce que tous les pays vont demander un traitement favorable similaire. 

Les dirigeants envoient un signal politique et ont dit clairement que, si Londres s’en va, il n’y aura pas de retour possible et il y aura un vrai divorce, la relation avec l’Union ne sera plus la même. Le problème, c’est que rien ne garantit aujourd’hui que les 27 pays de l’Union seront dans cet état d’esprit. A priori Paris et Berlin s’accorderont pour être relativement durs. »

Cécile Decourtieux: « Au delà de ce que Cameron a négocié, il arrivera probablement à imposer l’agenda britannique dans l’Union, qui est davantage de libre-échange, de libéralisation, la priorité au marché intérieur, et on met en veilleuse les velléités d’intégration politique de l’Union européenne. » 

Cécile Ducourtieux: « La réponse est oui, à condition que le ‘Remain’ l’emporte franchement, et qu’il y ait un très fort plébiscite de Cameron et de son agenda pro-européen. Si le ‘Remain’ l’emporte à 56%, le message sera très, très clair et, comme Cameron est le seul leader politique qui a eu le courage de poser cette question existentielle à ses concitoyens, il arrivera à Bruxelles avec très certainement un très, très fort pouvoir de négociation.

Il obtiendra très certainement ce qui a été négocié entre lui et les dirigeants européens en février 2016, lors d’un sommet au cours duquel David Cameron avait obtenu des dérogations à la non-discrimination des citoyens européens, c’est-à-dire que le Royaume-Uni puisse priver de droits sociaux des citoyens de l’Union en Angleterre, même s’ils travaillent. Ce n’est pour l’instant pas possible. Londres aura aussi une forme de droit d’intervention sur les décisions des pays de l’eurozone. Il pourra être consulté systématiquement à chaque décision de l’eurozone. Il obtiendra aussi que les parlements nationaux aient le droit de s’opposer à une législation européenne. »

Cécile Ducourtieux: « Les avis sont très partagés. D’abord, il est en partie faux de dire que les Britanniques bloquaient le processus d’intégration européen ces dernières années. Ce qui est vrai, c’est que, depuis deux ans que le référendum se prépare au Royaume-Uni, l’attitude de Londres à Bruxelles n’était clairement pas très constructive. Pour prendre un sujet concret, la fiscalité, ces derniers mois, Bruxelles a adopté beaucoup de textes pour lutter contre l’évasion fiscale et le Royaume-Uni n’était pas le pays le plus bloquant. 

Si le Royaume-Uni décide de « prendre son indépendance », comme disent les Brexiters, on ne peut pas dire que l’Union sera libérée d’un poids. En réalité il faudra une forte volonté politique des 27 pays restants d’avancer. Ce qu’on pense ici à Bruxelles, c’est que l’Europe ne poursuivra pas son intégration politique si la France et l’Allemagne ne décident pas en commun d’avancer. » 

Cécile Ducourtieux: ‘En parallèle, le jour où le divorce sera prononcé, le Royaume-Uni ne pourra plus profiter de tous les accords internationaux que l’Union a signé avec des pays tiers, il y a des dizaines d’accords qui existent. Donc il faudra, mais les avis divergent, dans l’intérêt du Royaume-Uni, que Londres négocie en parallèle le divorce et, de l’autre côté, commence à renégocier dans l’immédiat une relation commerciale avec l’Union européenne, pour pouvoir continuer à faire du commerce dans des conditions privilégiées. Si Londres ne renégocie pas une relation commerciale spécifique à l’UE, le commerce ne s’arrêtera pas du jour au lendemain le jour où le divorce sera prononcé. Mais le problème, c’est que Londres aura accès au marché intérieur comme un pays tiers, avec des droits de douane relativement élevés. »

Cécile Ducourtieux: « La simple déclaration des résultats, en soi, n’est pas une sortie. Si le « Brexit » l’emporte, le Royaume-Uni restera membre de l’UE tant que la négociation du divorce durera. A priori cette négociation dure deux ans, selon les traités de l’Union depuis le traité de Lisbonne de 2009. L’article 50 permet de faire une demande de divorce volontaire et unilatérale.

Les jours qui suivent, si le « Brexit » l’emporte, le gouvernement britannique, en toute logique et s’il respecte le choix des électeurs, fera cette demande de déclenchement de l’article 50 auprès des autres Etats membres de l’Union. Cet article très bref dans le traité de l’UE dit que la négociation commencera à partir de ce moment-là et durera deux ans. Cette période sera renouvelable si les Etats membres sont d’accord.

La discussion avec Cécile Ducourtieux, correspondante du Monde à Bruxelles, va débuter dans trois minutes.

Sur les enjeux du référendum pour l’Union européenne

A Bruxelles, c’est l’hypothèse du « Brexit » qui affole le plus : les dirigeants européens redoutent une déflagration, un coup d’arrêt brutal à ce qui reste de l’utopie européenne, et le début d’un délitement, d’autres pays risquant de réclamer eux aussi leur « indépendance ». Au-delà de ces considérations politiques, une sortie du Royaume-Uni bouleverserait complètement l’agenda européen.

PAROLES D’ELECTEURS

Ce Français, installé au Royaume-Uni depuis vingt ans, est privé de droit de vote pour le référendum sur le « Brexit », ce qui ne l’empêche pas de faire campagne pour le maintien dans l’UE.

Re-bonjour à tous ! Dans trente petites minutes, Cécile Ducourtieux, correspondante du Monde à Bruxelles, répondra à vos questions sur les enjeux du référendum du 23 juin pour l’Union européenne. Vous pouvez commencer à lui poser vos questions.

Philippe Bernard, correspondant du « Monde » à Londres, a répondu à vos questions sur les enjeux politiques du scrutin. (Re)lire la discussion.

En attendant que les discussions reprennent, revivez le chat avec l’écrivain britannique Stephen Clarke.

PAROLES D’ELECTEURS

Chefs d’entreprise, étudiants, syndicalistes ou agriculteurs, il y a ceux qui veulent quitter l’UE, ceux qui veulent y rester et ceux qui sont tiraillés.

Sortir de l’UE, combien ça coûterait Alors que les Britanniques s’apprêtent à voter, les études divergent, mais indiquent dans l’ensemble un lourd ralentissement économique en cas de « Brexit ».

Nous allons mettre ce direct en suspens pour un temps. Nous le reprendrons avant 14 heures et la discussion sur les conséquences du référendum pour l’Union européenne, avec Cécile Ducourtieux, correspondante du Monde à Bruxelles.

PAROLES D’ELECTEURS

Contrairement aux organisations de travailleurs britanniques, le syndicaliste écossais Duncan Smith est favorable à la sortie de l’UE. Selon lui, Bruxelles ne sert que les intérêts du patronat.

Le programme de cet après-midi :14 heures : Vu de Bruxelles, quelles conséquences d’un éventuel « Brexit » pour l’Union européenne Discussion avec Cécile Ducourtieux, correspondante du Monde à Bruxelles.15 h 30 : Le fonctionnement de l’Union européenne est-il compatible avec les principes du Royaume-Uni Discussion avec Catherine Marshall, maître de conférences en civilisation britannique à Sciences Po Saint-Germain-en-Laye.

Les discussions reprennent à partir de 14 heures avec un chat sur les enjeux d’un éventuel « Brexit » sur l’Union européenne. Cécile Ducourtieux, correspondante du Monde à Bruxelles, répondra à vos questions.

C’est la fin de la discussion avec Philippe Bernard, merci beaucoup pour vos questions. Retrouvez l’intégralité du chat bientôt sur Le Monde.fr.

@Je vois clair

Philippe Bernard: « La moyenne des derniers sondages prévoit un résultat extrêmement serré, puisqu’on en est à 50-50, ou plus exactement 44-44 compte tenu de 12 % d’indécis. Le meurtre de Jo Cox, jeudi dernier, semble avoir stoppé l’élan du camp pro-« Brexit », il n’est pas certain que ce drame ait une conséquence directe sur le vote des gens déjà décidés, mais il pourrait inciter les indécis à aller voter, probablement en faveur de la stabilité et donc de l’Europe.

Le meurtre de Jo Cox a aussi imposé un ton plus modéré à la campagne pro-« Brexit » sur l’immigration. Il l’empêche aussi de présenter le choix comme opposant le peuple pro-« Brexit » à l’élite pro-européenne. Jo Cox était en effet issue d’un milieu populaire, et semble personnifier l’élue proche de ses électeurs. En réalité, le vote va se jouer sur la participation : plus elle sera forte, plus le camp pro-européen a de chances de l’emporter. La météo jouera donc, elle prévoit pour jeudi un mélange de soleil et d’averses. »

Lire notre article sur la question de la fiabilité des sondages :

Que disent les plus récents sondages

@Ositoblanco

Philippe Bernard: « Probablement pas sous la forme espagnole, grecque ou italienne. Pour l’instant, les tendances comparables à Podemos ou à Syriza sont plutôt rangées derrière Jeremy Corbyn, le leader du Labour, qui est très à gauche de son parti. Mais les choses pourraient changer en cas de « Brexit », si la direction du Labour venait à être mise en cause. Le référendum risque surtout de favoriser le parti xénophobe et antieuropéen UKIP, c’est sous sa pression que le référendum a été organisé. Consulter le peuple sur l’Europe est sa principale revendication depuis des années. Il pourrait profiter d’un éventuel éclatement des tories, en accueillant ses éléments les plus europhobes. »

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