Affaire Tapie , de quoi Christine Lagarde est-elle accusée ‘

Affaire Tapie , de quoi Christine Lagarde est-elle accusée '

L’ex-ministre de l’économie doit répondre de fait de négligence dans l’affaire Tapie, et en particulier dans l’attribution de 405 millions d’euros d’argent public.

Le Monde
| 19.12.2016 à 11h53
Mis à jour le
19.12.2016 à 12h37
|

Par Les Décodeurs

La patronne du Fonds monétaire international (FMI) et ancienne ministre de l’économie, Christine Lagarde, qui est jugée depuis une semaine par la Cour de justice de la République, sera fixée lundi 19 décembre sur son sort.

Elle est accusée de « négligence » dans la question de l’arbitrage qui avait été rendu en faveur de Bernard Tapie en 2008, et risque à ce titre jusqu’à un an de prison et 15 000 euros d’amende.

Concrètement, il s’agit pour les trois magistrats, les six députés et les six sénateurs de décider si la ministre n’a pas renoncé un peu vite à remettre en cause l’arbitrage privé qui a accordé plusieurs centaines de millions d’euros d’argent public à l’homme d’affaires marseillais.

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Pressions pour l’arbitrage privé

Ce dernier, désireux de solder son litige avec l’ancienne banque publique Crédit lyonnais, a proposé la médiation d’un tribunal arbitral, un tribunal privé formé pour l’occasion et constitué de juristes censés être strictement indépendants. Il est rarissime qu’un tribunal arbitral soit mis en place alors que le litige a déjà été porté devant des juridictions ordinaires, et encore plus quand une telle somme d’argent public est en jeu.

Mais, surprise, le ministère de l’économie, dirigé alors par Christine Lagarde, donne en 2007 son accord pour que la procédure soit engagée. L’enquête montrera plus tard que de multiples pressions ont été exercées, en particulier sur les représentants du consortium public chargé de gérer le passif du Crédit lyonnais  son administrateur, Patrick Peugeot, démissionnera l’année suivante. Il met notamment en cause Stéphane Richard, alors directeur du cabinet de Christine Lagarde et actuel président-directeur général d’Orange, et au-delà de lui la ministre de l’économie elle-même.

Deuxième surprise, moins d’un an après, en juillet 2008, le tribunal arbitral donne raison à Bernard Tapie et condamne le consortium, c’est-à-dire l’Etat, à verser à l’homme d’affaires 405 millions d’euros, dont 45 millions d’euros au titre du préjudice moral.

« Frêle limite entre politique et judiciaire »

Les juges ont estimé que la banque avait « failli à ses obligations, que ce soit au titre de l’obligation de loyauté ou de l’interdiction de se porter contrepartie » et ont au passage dénoncé « l’exceptionnelle brutalité » du Crédit lyonnais vis-à-vis de son ancien client. Cette décision, qui alloue 405 millions d’euros du contribuable, provoque de vives critiques.

L’Etat renonce ensuite à déposer un recours en nullité contre la sentence arbitrale. C’est en particulier sur ce point que Christine Lagarde est jugée actuellement. Elle aurait conclu, un peu rapidement selon les enquêteurs, que les arguments juridiques pour un recours étaient trop minces. « Devant une décision aussi scandaleuse, même si nous n’avions qu’une chance sur mille de gagner », il fallait y aller, a affirmé de son côté Bruno Bézard, qui dirigeait alors l’Agence des participations de l’Etat.

Pour le procureur général Jean-Claude Marin, « prendre une mauvaise décision n’est pas (‘) en soi seul un délit ». « C’est à la frêle limite entre le politique et le judiciaire que vous aurez à vous déterminer », a-t-il résumé à l’adresse des membres de la Cour.

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