Adélaïde l’enfant qui est morte parce qu’elle n’existait pas

Adélaïde l'enfant qui est  morte parce qu'elle n'existait pas

Elles portent le même prénom, peut-être était-ce un signe. Fabienne Roy-Nansion, avocate chevronnée et estimée au barreau de Boulogne, va défendre toute cette semaine Fabienne Kabou, mère infanticide dont le geste incompréhensible a bouleversé tout le pays.

Mais Me Roy-Nansion est allée au côté de cette suspecte au profil si particulier tout de suite après son interpellation. Depuis, l’avocate rend visite à sa cliente chaque semaine, à la prison de Sequedin, et au terme de ces deux ans et demi de relations si sensibles, elle a cerné sa mission : «
Nous aurons à disséquer son histoire pour essayer de la comprendre.
»

Une femme complexe

La délicate mission de l’avocat pénaliste. On en a tellement parlé ailleurs, ces dernières semaines. Fabienne Roy-Nansion s’apprête à la porter au plus haut à son tour. Elle a déjà relevé ce défi, dans le passé, elle en connaît les pièges.

Alors, déjà, elle parle de sa cliente. «
Une femme très belle, très sensible, dont les experts disent la complexité. Elle fait d’ailleurs une lecture très pointue de ces rapports. Elle a les outils sémantiques pour en comprendre toutes les nuances.
» Une jeune femme intelligente, donc. «
Élevée à Dakar, entre un père traducteur à l’ONU et une mère enseignante.
» Fabienne Kabou est venue en France pour poursuivre ses études supérieures, qui parlent aussi de cette intelligence que souligne l’avocate : «
Elle a fait architecture, puis du droit immobilier, puis philo, à Paris VIII.
»

Elle en était à s’attaquer à sa thèse («
La théorie du réel
»), et à se débattre dans une relation compliquée avec un homme de trente ans plus âgé qu’elle quand tout a basculé. «
Un couple féru de culture, de voyages, d’architecture’
» Mais disant cela, l’avocate se demande s’il s’agissait bien d’un couple, au fond : «
Il n’a jamais présenté à quiconque Fabienne comme étant sa compagne. Il était marié et père depuis longtemps.
»

« Elle ne sortait qu’une fois par jour de sept à huit heures le matin »

Une compagne niée, une grossesse non désirée’ «
Quand elle est tombée enceinte, Fabienne s’est coupée de tout : plus de relations sociales, plus de compte bancaire, plus de Sécu, plus rien. Un isolement absolu. Et même quand Adélaïde est née : elle ne sortait qu’une fois par jour de sept à huit heures le matin, pour ne rencontrer personne au cours de sa promenade au bois de Vincennes.
»

Et lui «
Il a vécu à côté d’elles.
» Me Roy-Nansion expose ainsi l’histoire de sa cliente, que la cour d’assises va étudier de près aujourd’hui, et la mère qu’elle est n’oublie pas, surtout pas, la fillette de quinze mois : «
C’était l’enfant fantôme d’une femme fantôme. Adélaïde n’est pas morte parce qu’elle gênait, elle est morte parce qu’elle n’existait pas.
»

Leave A Reply