A Saint-Nazaire l’Etat écarte toute nationalisation

A Saint-Nazaire l'Etat écarte toute nationalisation

La justice coréenne doit examiner, vendredi, le sort du groupe STX placé en redressement judiciaire et qui détient 60 % des chantiers navals français.

Le Monde
| 12.10.2016 à 11h34
Mis à jour le
14.10.2016 à 07h17
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Par Denis Cosnard

Rendez-vous au tribunal du district central de Séoul, en Corée, un grand bâtiment surmonté de deux tours, non loin du fameux quartier huppé de Gangnam. C’est ici que, vendredi 14 octobre, doit se jouer en partie le sort des chantiers navals de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). A l’occasion d’une réunion avec les créanciers du groupe sud-coréen STX, actionnaire majoritaire du site français, les juges doivent étudier les options possibles pour sauver le conglomérat en difficulté. Le cas de Saint-Nazaire figure au c’ur du dossier, suivi de près à Paris : « L’Etat actionnaire jouera pleinement son rôle de stratège, comme nous l’avons fait pour Alstom », a promis Manuel Valls, mardi 11 octobre, à l’Assemblée nationale.

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Pour renflouer le groupe, le projet consistait jusqu’à présent à vendre la filiale STX France, qui exploite les chantiers historiques de Saint-Nazaire. Après des années de disette, leur carnet de commandes est aujourd’hui rempli pour dix ans. Même s’il s’agit d’une activité d’une faible rentabilité, trois candidats se sont manifestés ces derniers mois. D’une part Fincantieri, le grand rival italien des chantiers français. D’autre part Damen, un constructeur néerlandais, allié aux deux principaux clients de Saint-Nazaire, les armateurs MSC et Royal Caribbean. Enfin, un professionnel chinois des croisières, Genting Hong Kong, filiale d’un conglomérat malaisien.

Avec ses 33,34 % de STX France, qui lui donnent un droit de préemption en cas de vente, l’Etat français pensait initialement se retrouver à même d’arbitrer entre les offres. Et une candidature avait clairement ses faveurs, celle de Damen, jugée la plus favorable pour développer les chantiers français sans risque de transfert d’activité ni de technologie vers l’Italie ou la Chine.

Limites du pouvoir

Mais le 4 octobre, surprise : l’entrée en lice d’un quatrième candidat bouleverse la donne. Le tribunal de Séoul annonce alors avoir été approché par une société étrangère prête à reprendre non seulement les chantiers français, mais aussi ceux de Jinhae et Goseong, en Corée. « Nous examinons cette possibilité », précise le tribunal.

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Pour la justice coréenne, c’est la perspective de régler d’un seul coup plusieurs problèmes, et d’obtenir un plus gros chèque pour les créanciers. Mais vue de France, la situation se complique. L’identité de ce quatrième candidat reste en effet mystérieuse. Est-il britannique, ou sino-britannique, comme l’affirment certains ‘ « Nous ne savons pas s’il existe vraiment, reconnaît Christophe Sirugue, le secrétaire d’Etat à l’industrie. Peut-être n’est-ce qu’une rumeur destinée à faire monter les enchères. » En tout état de cause, Fincantieri et Damen ne semblent guère prêts à postuler à la reprise de trois chantiers au lieu d’un seul. Au risque de se retrouver hors course.

Quant au gouvernement, il connaît les limites de son pouvoir, surtout dans le cas d’une vente en bloc des actifs de STX. Lundi, l’idée d’une nationalisation de Saint-Nazaire caressée par certains a été écartée. « L’objectif du gouvernement n’est pas de devenir actionnaire majoritaire de STX France », a tranché Bercy. Les caisses de l’Etat sont trop vides pour un tel pari. En outre, l’arme de la nationalisation n’entre plus dans l’arsenal des socialistes au pouvoir depuis le départ d’Arnaud Montebourg.

En dernier recours, l’Etat n’exclut pas d’utiliser la réglementation sur les investissements étrangers pour empêcher une prise de contrôle des chantiers qui ne serait guère conforme aux intérêts nationaux. « Mais s’il s’agit d’un Chinois, bloquer l’investissement risque d’entraîner des rétorsions violentes, par exemple sur Areva », redoute un bon connaisseur du dossier. A Paris et à Saint-Nazaire, beaucoup espèrent donc que la Corée maintiendra vendredi son projet initial de vente séparée de STX France. Et que Damen l’emportera. Sinon, l’Etat pourrait avoir du mal à faire prévaloir son point de vue.

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