À l’accueil mères et enfants , des conseils pour la vie (1/2)

En passant la grille, rue Lalo, le vert du parc est éclatant et l’on croise deux grues cendrées. L’accueil mères et enfants, au château de la Roseraye depuis 1958, est à mille lieux de l’idée d’un foyer social. Ici, 57 familles, souvent des femmes seules avec leur bébé, et quelques pères à titre expérimental, sont accompagnées par 50 professionnels de diverses disciplines. Pour apprendre à être mère.

« 
Je ne voulais pas être dans la précarité, dans la promiscuité, lance Carine, une des mères « pensionnaires ». Pour ma part c’était le dernier recours, je n’avais pas d’autre solution. Ma grossesse s’était très mal passée, j’étais très faible psychologiquement. J’ai voulu donner toutes ses chances à mon fils. À la préadmission, j’ai demandé comment sont les studios, s’ils ne sont pas trop proches… Je croyais que les familles étaient peut-être mal élevées. Dès la première semaine, j’ai changé d’avis.
 » Carine est là avec son fils depuis un an, l’âge de son bébé.

« Pour ma part c’était le dernier recours, je n’avais pas d’autre solution. »

Au premier étage de la résidence des Amandiers, on entend des pleurs, légers. Proteanu, 37 ans, et Maria, 18 ans, changent et habillent leur petite Denisa, 8 mois. Ils sont à l’EPDSAE depuis le 5 septembre, et « 
ici, c’est très bien
 ». Éducateurs, psychologues, conseillers en matière de budget, sont là pour entourer les familles, tout en leur laissant assez d’autonomie pour qu’un jour, elles puissent se gérer seules.

« 
Ne stressez pas
 », demande, doucement, l’adjointe de direction Catherine Joliveau à Maria qui tente de faire entrer le petit bras potelé, et agité, de Denisa dans une minuscule manche. Dans les locaux de l’EPDSAE, « 
il y a toujours une présence, 24 h/24
 », d’auxiliaires puéricultrices notamment. Au cas où. Parfois, les mères veulent juste se rassurer. « 
Il y a des trucs que fait notre bébé, on ne sait pas si c’est normal. Alors, ici, ils nous donnent des conseils
 », détaille Laury, 21 ans.

La blondinette a dû quitter précipitamment le foyer de jeunes travailleurs où elle était hébergée, parce qu’elle est « 
tombée enceinte
 ». Et ‘ « 
On ne pouvait rester que jusqu’à 6 mois de grossesse.
 » « 
Quand on est maman la première fois, on ne sait pas trop à quoi s’attendre…
 » Léonor, « 
bientôt 2 ans et demi
 », sourit à qui veut bien le regarder. Et sa mère sait faire les courses en gérant un budget. « 
Il ne faut pas manger fast-food ou des plats préparés tous les jours, ajoute Catherine Joliveau. F
aire attention à la consommation d’énergie, savoir couper la télé quand on part…
 » Laury s’exclame, fière : « 
En veille, ce n’est pas vraiment coupé !
 »

Chaque famille paie un loyer : « 
Le but est aussi de les responsabiliser
 », indique le directeur Thierry Fontaine. Les mères doivent quitter le cocon quand leur enfant a 3 ans. Après, il relève de la responsabilité de l’État.

Thierry Fontaine, directeur: «Ça peut toucher nos familles»

 
 Combien de familles sont suivies par l’EPDSAE ‘

« Sur l’ensemble de l’établissement, 162 familles sont suivies, par 142 professionnels, à Lambersart, Hellemmes, Douai et Avesnes-sur-Helpe. À Lambersart, les professionnels sont une cinquantaine pour 57 places. Ce n’est pas trop : une place, cela peut être une mère avec plusieurs enfants. La durée moyenne de séjour est de 8 mois, et quand l’enfant à 3 ans, elles doivent partir. Elles ne sont plus prises en charge par le Département. »

 
 Quel est le profil des mères suivies ‘

« Au départ, en 1958, il s’agissait souvent de personnes de bonnes familles qui se retrouvaient enceintes hors mariage, des filles-mères comme on disait. Aujourd’hui, les profils sont plus diversifiés. Vous savez, ça peut toucher nos familles. On a des mineures (il y a une recrudescence des mères mineures en France), des victimes de violences conjugales, quelques migrantes, des toxicomanes… À Noël dernier, une maman est passée nous voir, je ne l’avais pas reconnue ! Nous l’avions vue arriver ici anorexique et toxicomane, elle est désormais responsable d’un cabinet d’architecture ! »

 
 Savez-vous ce que toutes ces femmes deviennent, une fois que leur enfant atteint les 3 ans ‘

« Oui. Récemment, l’université de Nanterre a fait une étude sur notre établissement, en interrogeant des mères cinq ans après leur départ d’ici. 80 % des familles accueillies avaient un boulot et un appartement. Ça nous a confortés dans notre investissement ! »

Deuxième volet de notre reportage à l’EPDSAE dimanche.

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